C’est au pas de course que Patrice Duboé enchaîne ses journées, une matinée à Gavarnie, une autre au plateau du Bénou. Avec son entreprise Lean Connected, qu’il a créée en 2017, cet ingénieur télécom s’est donné pour mission d’aider les bergers à mieux localiser leurs troupeaux et avec les premières transhumances, en cette mi-juin, les commandes affluent. « Le collier connecté permet de géolocaliser les troupeaux quels que soient l’endroit et le temps dans des zones où il n’y a pas de réseau. Dans ces zones isolées, une transmission satellite est nécessaire pour renvoyer l’information que le berger visualise ensuite sur notre plateforme », explique Patrice Duboé. L’entrepreneur a mis au point des colliers ultralégers qui ne blessent pas les bêtes. Il recherche l’efficience en les équipant de panneaux solaires les plus petits possibles tout en garantissant la transmission des données de géolocalisation.
Une aide pour les bergers
« Les colliers connectés permettent aussi de détecter les prédateurs en fonction d’un comportement anormal des animaux équipés. Ce sont les attaques de loups et d’ours qui sont redoutées par les bergers. Le GPS donne la possibilité de détecter les troupeaux par temps de brouillard, d’identifier les zones de pâturage et où ils dorment grâce aux cartes proposées sur notre plateforme », ajoute le dirigeant. Un vrai gain de temps pour Baptiste Sabatut, un jeune berger installé à Pragnères, entre Luz-Saint-Sauveur et Gavarnie, et à la tête d’un troupeau de 300 brebis. Sur les recommandations de Patrice Duboé, il a équipé 1 % de son troupeau, en règle générale les brebis dites meneuses. « Nous étions embêtés par la prédation, nous sommes en montagne, isolés et je montais tous les jours. Ces colliers sont une économie d’énergie, un gain de temps et de confort, j’en avais pour une heure de voiture et deux heures de marche. Pour faire perdurer le métier, il faut que notre vie se rapproche d’une vie normale », souligne le jeune berger.
« Pour faire perdurer le métier de berger, il faut que notre vie se rapproche d’une vie normale »
EDF pour premier client
Issue d’une famille de bergers, Patrice Duboé avait conscience des problématiques du métier. « Mon parrain à 85 ans continuait de transhumer. Alors je lui ai d’abord installé un bouton visio pour qu’il puisse émettre un appel tous les matins et rassurer notre famille, cela lui permettait aussi de contacter le vétérinaire. Il avait également un téléphone de secours en cas d’urgence », explique en détail l’ingénieur télécom. L’ex-ingénieur télécom finit par lier sa passion pour la montagne à son métier et enregistre pour premier client EDF. Pour le fournisseur d’énergie, il met au point des stations connectées, équipées d’un panneau solaire et d’une connexion satellite. « Ces stations ont pour objectif de vérifier une installation après une avalanche ou que des feuilles mortes ne bouchent pas certaines grilles du réseau d’eau. J’installe un mât de 6 mètres sur lequel une caméra prend des photos et les envoie via son antenne satellite. Cela évite également des rotations d’hélicoptère hebdomadaires », note Patrice Duboé.
Une station de secours pour le parc national des Pyrénées
Le fondateur de Lean Connected a mis au point une station de secours pour le parc national des Pyrénées. Installée au lac d’Ayous depuis 2 ans, elle va être déplacée du côté de l’Aubisque où le réseau téléphonique ne passe pas. Sur la réserve ornithologique de Puydarrieux, Lean Connected a également installé une caméra pour compter les oiseaux. « Dernièrement j’ai travaillé à la supervision de granges isolées où les vols sont de plus en plus fréquents », termine l’entrepreneur, déjà en route vers son prochain rendez-vous.
Le collier connecté, cœur d’activité
Les colliers connectés pour les troupeaux restent l’activité principale de Lean Connected car le besoin est réel et peu de produits sont disponibles sur le marché. « Avec les retours en estives, il y a un gros boom en ce moment, je passe une commande aux États-Unis tous les 10 jours pour m’approvisionner. J’ai peu de stock car c’est un matériel coûteux. Nous avons 10 modèles colliers avec des usages très différents. Certains bornent 1 fois par jour d’autres 6 fois. En moyenne, je mets 1 an pour développer un modèle », continue Patrice Duboé. S’il gère la partie télécom et physique, il compte un salarié en charge du développement de la plateforme en ligne. « Tous nos bénéfices partent dans l’innovation », explique le fondateur de Lean Connected.