Couverture du journal du 07/05/2024 Le nouveau magazine

Thermalisme, vers un retour à la normale

Si la fréquentation des établissements thermaux est encore en baisse par rapport à 2019, Marie-Hélène Blanque, directrice des Grands Thermes de Bagnères-de-Bigorre et de l’association Therm’ô 65, dresse le bilan d’un secteur d’activité qui n’a pas dit son dernier mot dans les Hautes-Pyrénées.

Thermalisme

© Lilian Cazabet - La Vie Economique

La Vie Economique : Vous avez récemment pris la tête de l’association Therm’ô 65 qui réunit les directeurs d’établissements thermaux des Hautes-Pyrénées et êtes administratrice du CNETh, le conseil national des exploitants thermaux. Comment se porte le secteur du thermalisme à l’échelle nationale et plus spécifiquement dans le département ?

Marie-Hélène Blanque : « Au niveau national, en 2023, la fréquentation est en recul de 15 à 19 % par rapport à 2019. Notre secteur d’activité a été très touché par la pandémie de Covid-19. Cette baisse de fréquentation s’explique par les pathologies que portent nos patients. Par exemple, certains médecins en ORL étaient réfractaires à ce que leurs patients évoluent en milieu humide et confiné. Nos curistes ont un certain âge et sont aussi plus prudents. Mais, cette saison, nous voyons revenir des patients que nous n’avions pas vus depuis 2 ou 3 ans. Dans les Grands Thermes de Bagnères-de-Bigorre, en 2019 nous avions 8 600 visiteurs, contre 7 700 en 2023 et 6 800 en 2022. Nous avons donc déjà récupéré 1 000 curistes depuis l’an dernier. Notre chiffre d’affaires de 2023 sera d’environ 10 millions d’euros. Nous sommes en progression. »

Marie- Hélène Blanque, Présidente de Therm'ô 65 Thermalisme

Marie- Hélène Blanque, Présidente de Therm’ô 65 © Lilian Cazabet – La Vie Economique

LVE : Comment oeuvrez-vous avec Therm’ô 65 et les autres directeurs d’établissements thermaux pour rétablir les niveaux de fréquentation de 2019 ?

M.-H. B. : « Nous nous sommes associés en 2020 pendant la pandémie de Covid-19 car nous avions été contactés par la CCI pour faire un état des lieux du thermalisme dans les Hautes-Pyrénées. Nous avons échangé sur le sujet pour tirer un bilan et des chiffres : le thermalisme génère 35 millions d’euros d’activités dans le département. Pour avancer ensemble, nous mettons en place des opérations commerciales communes et nous travaillons notre communication. D’ici la fin de l’année, nous allons mettre en place un site Internet commun aux sept établissements du département. »

LVE : Comment les Hautes-Pyrénées peuvent-elles se démarquer et tirer leur épingle du jeu ?

M.-H. B. : « Les Hautes-Pyrénées sont le premier département thermal de France avec sept stations thermales. Les établissements des Hautes-Pyrénées ont des atouts à faire valoir avec un véritable patrimoine architectural et des bâtiments construits pendant le XIXe siècle. C’est notre marque de fabrique. Nous souhaitons allier tradition et modernité. Dans les Hautes-Pyrénées, nous pouvons traiter 12 indications thérapeutiques comme les affections psychosomatiques à Bagnères-de-Bigorre, qui est l’un des 4 centres en France qui le proposent. Capvern-les-Bains propose le traitement des affections de l’appareil urinaire ce qui est également très rare. Nous avons beaucoup d’atouts et nous devons les travailler ensemble. Les cures thermales sont aussi un avantage pour le département. À Bagnères-de-Bigorre nous recevons près de 8 000 curistes soit autant que d’habitants. Ils dépensent en moyenne 1 200 euros ce qui représente 10 millions d’euros injectés dans le territoire. »

Cette saison, nous voyons revenir des patients que nous n’avions pas vus depuis 2 ou 3 ans

LVE : Vous avez reçu l’an dernier un prix de l’innovation pour une de vos initiatives durables. Quelles actions avez-vous mené pour rendre les Grands Thermes plus durables ?

M.-H. B. : « Nous avons reçu le Trophée de l’Innovation décerné par l’Agence Française des Techniques Hydrothermales pour notre recyclage de la boue et sa pasteurisation. Cette boue thermale est utilisée en soin et appliquée sur nos curistes dans le cadre de leurs traitements. Chaque application représente 5 kg de boue. Auparavant nous utilisions 180 tonnes d’argile sur la saison. Avec le système de recyclage que nous avons mis en place, nous n’utilisons plus que 30 tonnes d’argile. Nous avons travaillé sur tous nos postes de dépenses énergétiques, notamment en intégrant une blanchisserie, ou encore, en utilisant l’eau thermale qui sort naturellement à 55 °C pour maintenir la boue en température. En 2021, nous avons refait notre huisserie et investi dans des installations de géothermie. Entre fin 2014 et fin 2022, nous avons économisé 493 tonnes de CO2 par an et réduit notre facture énergétique de 38 %. »

LVE : Vous avez aussi entamé la rénovation d’un établissement haut de gamme, l’Hôtel Bellevue Thermes de la Reine. Où en êtes-vous ?

M.-H. B. : « La Mairie de Bagnères-de-Bigorre a confié par délégation de service public à la Semetherm, la société d’économie mixte à la tête des Grands Thermes, l’Hôtel Bellevue Thermes de la Reine. Nous voulons faire évoluer cet établissement vers du premium en proposant un hébergement 4 étoiles avec un établissement de cure intégré. 30 suites de deux personnes au maximum seront disponibles. Tous les appels d’offre ont été faits en 2022 et le chantier a débuté en décembre 2022. Nous avons investi 5 millions d’euros dans ce projet qui doit ouvrir au deuxième semestre 2024. »