La Vie Economique : Qui vous a donné la passion de la cuisine ?
Michel Dussau : « La seule coupable, c’est ma mère Georgette. Je suis issu d’une famille de paysans, un terme noble et pas péjoratif. Je viens d’une ferme dans un village landais : Saint-Loubouer. Nous étions une fratrie de 4 dans un berceau agricole où l’été, ma mère faisait manger 40 salariés saisonniers pour le castrage du maïs semence. À l’époque, tout était manuel. Elle ne m’a pas transmis que la cuisine, elle m’a transmis l’envie de faire plaisir aux autres. J’étais tout le temps dans ses jupons. Mon père avait 80 hectares et il était précurseur. Il a creusé son lac il y a 30 ans, il avait surélevé son élevage d’oie pour éviter les maladies des migrateurs. Il était en avance sur son temps. De mon père, j’ai gardé l’esprit d’innovation et l’idée qu’à plusieurs, on est plus performants. Je n’ai pas passé mon enfance devant la télé. »

Michel Dussau © Louis Piquemil – La Vie Economique
MICHEL DUSSAU SON PARCOURS :
1965 Naissance à Aire-sur-l’Adour (40)
1980 Apprentissage à 15 ans au Relais du Pavillon à Saint-Sever (40), 1 étoile au Michelin
1982 Commis de cuisine au Bâcon à Antibes (06), 1 étoile au Michelin
1983-1987 Grand Hôtel de Saint-Jean-de-Luz (64)
1988-1992 recruté par Alain Ducasse à Monaco, d’abord au Grill puis au Louis XV, 3 étoiles au Michelin
1992-1995 chef au Château de Mercuès (46), 1 étoile au Michelin
1995-2006 Reprise de L’Auberge du Pont Napoléon à Moissac (82)
2006 à aujourd’hui La Table d’Armandie devenue La Table de Michel Dussau à Agen
LVE : Comment avez-vous démarré dans le métier ?
M.D. : « Il y avait un étoilé Michelin à Saint-Sever : Le Relais du Pavillon. Un ami de la famille, Gérard Bouey, y mangeait tous les vendredis. Un jour en passant à la maison, ma mère lui a avoué désespérée que je voulais être cuisinier, faire un apprentissage et ne plus aller à l’école. J’avais 15 ans, il a pris son téléphone sous mes yeux et a appelé Le Relais du Pavillon. Mes parents ont tout fait pour essayer de me convaincre de ne pas y aller, pour me protéger. Après mes 2 ans d’apprentissage au Relais du Pavillon, j’ai eu mon CAP et j’ai fait une année supplémentaire. Dès mon jeune âge, je me suis surpassé pour être au niveau demandé. J’avais moins de facultés que certains mais j’ai toujours trimé. En 1983, un client passe manger et demande à voir le chef avec qui il avait fait l’école de Capbreton : c’était Alain Ducasse. À l’époque, il avait 2 étoiles au Juana à Juan Les Pins. »
De mon père, j’ai gardé l’esprit d’innovation et l’idée qu’à plusieurs, on est plus performants
LVE : C’est le début d’une grande histoire entre vous et Alain Ducasse ?
M.D. : « Oui, et on continue de s’appeler encore aujourd’hui. À la fin de ma 3e année à Saint-Sever, Alain Ducasse m’a trouvé une place à An…