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Maison Vaux, terroir en tête

Dordogne - À Sarlat et bien au-delà du Périgord noir, la Maison Vaux est un temple du savoir-faire, une charcuterie de campagne authentique. Jean-René Lapié, qui a repris cette PME familiale il y a une dizaine d’années, concilie la qualité artisanale et des organisations acquises lors de son parcours international. Une bonne recette.

Maison Vaux

© Loïc Mazalrey

Ce que met en œuvre Jean-René Lapié depuis sa reprise de l’entreprise sarladaise Vaux, en avril 2012, est le fruit d’un parcours à l’international au sein de grands groupes, doublé d’un attachement au terroir périgourdin et de l’envie de diriger sa propre structure. Il a mobilisé son réseau pour trouver la perle rare, sur fond de grande confidentialité, comme c’est souvent le cas. « Une transmission tellement discrète que les salariés l’ont apprise lors de mon arrivée dans l’entreprise. » Michel Vaux tenait l’affaire de son père Élie, lequel l’avait fondée en 1960. Une institution locale. Le changement s’est fait dans la continuité car Jean-René Lapié conserve les recettes qui ont fait le succès de la Maison Vaux.

QUALITÉ, PROXIMITÉ, RÉACTIVITÉ

Quand l’affaire sarladaise s’est présentée, elle répondait à tous ses critères. « Tout d’abord les produits, j’ai grandi dans une ferme et je connais le goût des bonnes choses. Je ne pourrais pas être patron d’une entreprise dont je ne serais pas le client. » La grande diversité des métiers de la charcuterie au sein d’une même entreprise est une richesse rare. « Nous recevons les carcasses de l’abattoir, nous réalisons le désossage-découpe avec une vente en gros et demi-gros, la saucisserie crue, la salaison sèche et saumurée, les conserves, les produits fumés au bois de hêtre naturel, les produits cuits y compris oie et canard. Cette variété est un capital de savoir-faire. » La spécialité palmipède représente tout de même 25 % de l’activité, avec des pénuries d’approvisionnement en Dordogne et dans le Lot lors de la récente épizootie aviaire. « La diversité de gammes et de clientèle permet d’amortir les crises. Pendant le Covid, la proximité nous a permis de suivre le transfert de lieux de consommation, de compenser la fermeture des restaurants par d’autres créneaux. »

Maison Vaux

© Loïc Mazalrey

La spécialité palmipède représente 25 % de l’activité avec des pénuries d’approvisionnement en Dordogne

EN ADÉQUATION AVEC SON TERROIR

Sa stratégie depuis plus de dix ans ? « Ne pas changer ce qui mérite d’être gardé », dit en souriant celui qui a précisément choisi cette entreprise pour pérenniser ce que son prédécesseur a bien réalisé avant lui. Son expérience humaine et professionnelle lui permet d’ajouter son empreinte. « L’équipe connaît son métier et n’a pas besoin de moi pour bien faire. » L’entreprise essaie de transformer le moins possible, dans le respect des matières nobles qu’elle utilise, sans apposer de label hormis l’origine Porc français, même si elle se fournit en partie en IGP.

Maison Vaux

Jean-René Lapié, directeur de la Maison Vaux. © Loïc Mazalrey

SOUCI DU CADRE DE TRAVAIL

Vaux reste une entreprise attachée au modèle de production artisanal, tout en faisant progresser les volumes de 3 à 4 % par an depuis 10 ans. La journée de la quarantaine de salariés est aménagée pour libérer les après-midis, « avec une évolution dans la configuration des équipes, moins d’intérimaires, une sécurité d’emploi et une transmission via l’apprentissage : j’ai réussi à recruter pour remplacer les départs à la retraite ». Pas de chaîne, des ateliers autonomes et une délégation de management « car c’est celui qui fait qui sait ». Le chiffre d’affaires d’un peu plus de 4 M€ à la reprise atteint 5 M€ en 2022, malgré une période de fêtes perturbée par la crise aviaire. Le développement se poursuit sur le même modèle et les mêmes valeurs, et Vaux continue à prendre des parts sur un marché pourtant en décroissance puisque la consommation de viande diminue en moyenne de 2 % par an.

Maison Vaux continue à prendre des parts sur un marché pourtant en décroissance

APPROVISIONNEMENT LOCAL

Commercialement, les circuits sont très variés : la vente aux professionnels (grande distribution, bouchers-charcutiers, restauration, sites touristiques, matière première pour les conserveurs, plats traiteurs) cohabite avec la boutique « historique » sur le site de Madrazès et un camion magasin sur les marchés de Souillac et Gourdon. Du fait de son parcours, Jean-René Lapié a créé une activité export, au gré de contacts en Europe centrale, en Afrique du Sud, au Maroc, à Malte, « des Français expatriés comme des touristes fidèles ». Il a aussi développé la vente dans d’autres régions, dans des épiceries fines. « L’essentiel pour nous se fait dans un périmètre entre Limoges, Bordeaux et Toulouse. J’ai renforcé nos gammes pour les décliner localement. »

Le dirigeant continue de faire évoluer l’entreprise sur la base de ses convictions profondes. Et il se trouve que les attentes du marché vont exactement dans le même sens.

(lire aussi le portrait de Jean-René Lapié