Des 35 piliers sur lesquels était bâtie sa halle, ne reste désormais que des dalles gravées de notes de musique. Comme un destin qui change de partition et s’échappe de l’oubli pour inventer sa propre mélodie. Depuis 1298, c’est la signature de la bastide royale qui s’obstine à regarder plus loin pour ne jamais être où on l’attend. Lovée dans les vallons gersois, elle aurait pu n’être qu’une douce campagne où seul le chant des oiseaux accompagne l’été… Marciac la rebelle a encore une fois refusé le fatalisme et leur a offert les plus grands noms du jazz pour leur donner le diapason. Comment une petite commune de 1 300 habitants est devenue la référence mondiale de la musique a tout d’une épopée légendaire. A l’image d’un son du roi Buddy Bolden qualifié de blues rural, la ville s’est accordée à cette musique qui lui ressemble, prenant toutes les règles établies pour les tordre à sa guise, elle a créé l’impossible : Jazz in Marciac.
Fidèle à sa programmation hors du commun, la 45ème édition parle d’elle-même : Selah Sue, Ben Harper, Suzanne Vega, Gilberto Gil…
45 ans de concerts exceptionnels
Chaque année, le festival réunit des artistes dont l’évocation donne le vertige. Fidèle à sa programmation hors du commun, la 45e édition, qui aura lieu du 20 juillet au 6 août, parle d’elle-même : Selah Sue, Ben Harper, Suzanne Vega, Samara Joy, Abdullah Ibrahim, Norah Jones, Gilberto Gil & Family… Autant d’étoiles qui ne signent que l’excellence. La routine pour une terre qui a vu Jeff Beck, Michel Portal, Kool & the Gang, Sting, Santana, Joan Baez, Avishai Cohen ou encore Paco de Lucia et Joe Cocker envoûter ses scènes. Marciac, une place entourée d’arcades, quelques rues et le charme intact d’un passé flamboyant… Marciac, épicentre du jazz, internationalement célèbre, faisant briller les yeux de tous les musiciens qui rêvent de s’y produire comme une consécration. Les deux définitions sont les siennes, aucune fausse note dans ses quotidiens qui semblent aux antipodes mais un chef, virtuose de ce défi fou devenu réalité, Jean-Louis Guilhaumon, à la fois maire, président de la communauté de communes, fondateur et âme du festival.
Le projet de l’impossible
Pourtant, lorsque le projet a vu le jour il y a 45 ans, rien ne lui prédisait un tel destin. Fort de souvenirs fabuleux, son fondateur s’en amuse aujourd’hui : « Il était difficile de cumuler davantage de handicaps qu’à l’origine : un encadrement rural, aucune voie de communication, pas de gare à moins de 50 km, pas d’hôtel, très peu de restaurants… Si nous avions mené une étude, elle aurait jugé le territoire dans l’incapacité totale de pondre un événement de cette importance ». A cela on peut aisément ajouter un détail qui n’en est pas un, la ville ne comptait aucune scène. Pour Jean-Louis Guilhaumon, adjoint au maire à l’époque, la mise en place du rendez-vous était certes un défi mais surtout un écho à sa passion, jeune étudiant il avait même été musicien. Le jazz s’est évidemment imposé comme le fil conducteur d’un nouveau rendez-vous, en pleine campagne, là où personne ne l’attendait.

Boule Corea, Garrett Haynes, MC Bride © francisvernhet
800 visiteurs en 1978
En 1978, la première édition du festival a bien lieu et prend place dans les arènes municipales habituellement dédiées à la course landaise : « On n’y avait jamais entendu de concert et surtout pas de jazz ». Orchestres amateurs et professionnels se produisent avec une programmation autour de John Luther, ils signent un premier succès avec 800 visiteurs et pour Marciac, qui est loin d’imaginer l’aventure hors-normes qui débute, c’est déjà une vraie réussite. L’année suiva…