Couverture du journal du 02/04/2025 Le nouveau magazine

Pyrénées : de nouveaux horizons

Régis Lignon a pris la direction générale de la Compagnie des Pyrénées, la société mixte propriétaire de la marque N’PY, le réseau réunissant huit stations de montagne entre les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques. Dans un secteur en pleine mutation, qui cherche de nouveaux relais de croissance pour pallier les années où la neige se fait timide, N’PY reste optimiste et fidèle à son ADN : l’innovation.

Pyrénées

Régis Lignon, directeur général de la Compagnie des Pyrénées © Lilian Cazabet - La Vie Economique

La Vie Économique : Quels sont les résultats de la saison 2023-2024 ?

Régis Lignon : « Nous avons connu un enneigement en dent de scie mais les techniciens ont maintenu un bon niveau de neige. Certaines stations progressent de 14 % et d’autres sont en recul de 20 %. Au global, la fréquentation est en recul de 3,25 % avec 1 898 927 journées ski enregistrées contre 1 962 888 l’année précédente. Le chiffre d’affaires progresse, lui, de 2 % passant de 61,25 millions d’euros en 2022-2023 à 62,9 millions d’euros en 2023-2024. Cet été, après un mois de juillet catastrophique en termes de météo, la fréquentation progresse de 2 % par rapport à la moyenne des trois années précédentes avec 262 516 forfaits vendus. Les six bike parks du réseau ont enregistré une hausse de la fréquentation de 34 % avec 21 101 forfaits vendus. N’PY Résa a comptabilisé 39 % du chiffre d’affaires des stations. La carte No Souci, un forfait offrant des réductions avec lequel le skieur ne passe pas par la billetterie et est directement prélevé sur son compte en banque, progresse de 12 % avec 106 000 abonnés pour un taux de renouvellement de 80 %. Elle enregistre 13 millions d’euros de chiffres d’affaires. »

LVE : Comment fonctionne le réseau N’PY ? Comment travaillez-vous avec les stations ?

R. L. : « La Compagnie des Pyrénées se positionne en soutien des stations de montagnes. Nous partageons nos compétences à travers des groupes de métiers qui se réunissent sur différentes thématiques dont l’éco-engagement et la RSE, la diversification de l’offre client, la prévention des risques professionnels et la performance commerciale. Nous accompagnons les stations sur les sujets RH, finance, maîtrise d’ouvrage, système d’information, appui au changement et évolution du modèle. Nous fournissons aussi des services pour d’autres stations en leur donnant accès à la carte No Souci, ce sont des contrats commerciaux comprenant l’usage de la carte d’abonnement et des produits communs à 14 stations dans les Pyrénées. »

Nous devons adapter notre modèle, mais, nous n’avons pas la recette miracle

LVE : Vous avez déclaré avoir effectué votre bilan carbone.

R. L. : « Domaine Skiable de France a exprimé la volonté d’engager les stations sur des éco-engagements dont fait partie le bilan carbone. La profession s’est engagée à générer zéro émission d’ici 2037. Nous avons tous fait nos bilans carbone il y a deux ans et en parallèle nous avons candidaté au protocole d’expérimentation de la méthode Assessing Low Carbon Transition (ACT) lancée par l’Ademe pour construire une stratégie de décarbonation. Nous avons été sélectionnés avec neuf autres sociétés touristiques pour bénéficier de la prise en charge de l’accompagnement par les bureaux d’études Ekodev et BL Évolution. La Compagnie des Pyrénées suit ce travail et maintenant chaque station doit aller dans le détail. »

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Peyragudes © Tristan Buchot / N’PY

LVE : Quelles conclusions en avez-vous tirées ?

R. L. : « De cette étude ressort que 8 % de l’impact total est imputable à l’activité des stations. C’est pourquoi une station comme Peyragudes fournit cette année l’ensemble de ses dameuses en carburant HVO (huile végétale hydrotraitée) réduisant ainsi jusqu’à 90 % leurs émissions de CO2. 14 % des émissions de gaz à effet de serre induites par l’activité des stations de ski proviennent des collectivités territoriales avec par exemple l’éclairage public et la gestion des déchets. Les 78 % restants découlent des visiteurs dont 19 % pour leur transport. Nous avons donc beaucoup réfléchi à ce que nous pouvions apporter et la plateforme Pyrénées Express, que nous avons lancée en novembre, est un moyen de responsabiliser nos visiteurs qui choisissent entre le trajet le plus écologique, économique ou rapide et mesurent leur impact en émissions carbone. »

L’appétence pour la montagne progresse encore

LVE : Comment définissez-vous la diversification et quels sont les chantiers d’avenir ?

R. L. : « Le ski est une activité mature quand l’appétence pour la montagne progresse encore. Il faut adapter notre modèle et chercher cet équilibre entre été et hiver, nous n’avons pas la recette miracle, mais, nous y travaillons. La diversification, c’est aller chercher des business models durables en intégrant la restauration, l’hébergement, le thermoludisme pour avoir de l’activité sur l’ensemble de l’année. Il faut travailler le divertissement : les stations ne doivent pas se transformer en parc d’attractions mais trouver des activités complémentaires comme le contemplatif. Nous combattons l’investissement mono ski, les changements de remontées mécaniques sont pensés en multi-activité, les télésièges sont remplacés par des télécabines. L’altitude et les crêtes ne doivent pas être réservées qu’aux montagnards. Avec les télécabines, on amène tout le monde vers des panoramas et de la promenade en altitude, cela fait partie du divertissement. Les Pyrénées sont une destination globale mais chaque station est un prototype. Elles doivent chacune avoir leur point d’attractivité. Certaines auront plus de facilités que d’autres, les trois prochaines années vont être importantes alors que notre activité est indispensable pour le territoire quand la montagne enregistre de plus en plus de fréquentation et devient un espace de fraîcheur. »

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Cauterets © Paul Quintana / N’PY

LVE : De quelle manière continuez-vous d’innover chez N’PY ?

R. L. : « Nous mesurons nos indicateurs de performances avec l’outil de business intelligence data Xplore qui capte toutes les sources de données de chaque station et réalise des mesures en instantané du nombre de skieurs, de la météo, de la consommation énergétique, de la masse salariale, des systèmes de hauteur de neige, de la captation en eau, etc. Cet outil de pilotage permettra à terme de faire de la prédiction et d’anticiper les jours où la fréquentation est très forte. La Compagnie des Pyrénées dispose d’expertises qui sont mises à disposition des stations pour la performance collective : nous avons une équipe digitale de quatre personnes à laquelle s’ajoute un développeur full stack. Notre politique est d’acquérir des compétences et l’innovation fait partie de notre ADN. »

Notre chiffre d’affaires 2023-2024 est de 62,9 millions d’euros, en progression de 2 %

La Compagnie des Pyrénées, c’est quoi ?

N’PY a été lancé en 2004 par quatre directeurs de stations. Les élus, séduits par l’idée, prennent l’initiative de créer une société d’économie mixte en 2005 qui porte la marque N’PY, une carte d’abonnement et des ventes par Internet, une petite révolution à l’époque. En 2019, la Région Occitanie entre au capital et est créée la Compagnie des Pyrénées, suivie en 2020 par l’arrivée de la Nouvelle-Aquitaine au capital. La Compagnie des Pyrénées, avec ses 13 salariés, accompagne les projets stratégiques et opérationnels des stations. Elle compte trois filiales : la SAS N’PY Résa et ses 28 salariés gérant la commercialisation et la communication, la SAS Compagnie des Pyrénées participations, qui participe au capital de certaines stations comme Grand Tourmalet, et la Foncière des Pyrénées dont l’objectif est la montée en gamme de l’hébergement.

Régis Lignon : un profil atypique

Nouveau capitaine à bord du navire, Régis Lignon a d’abord rejoint la Compagnie des Pyrénées en 2020 comme directeur général adjoint après plus de 20 ans passés dans la construction chez Eurovia, filière de Vinci, où il occupait le poste de directeur régional Midi Pyrénées. Il a choisi de changer de carrière par goût du défi et pour apporter son regard extérieur aux stations. Passé par le processus d’appel à candidature, Régis Lignon, qui ne se définit pas comme un pur produit de la montagne, est devenu directeur général de la Compagnie des Pyrénées cette année.