Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Savonnia sort de sa bulle

Quatre copains se sont associés pour reprendre l’activité de Nia Jenkins, l’une des maître-savonnières les plus respectées de sa profession. Ils ont installé leur laboratoire à Mussidan.

Jean-Christophe et Marie-Hélène Félix dirigeants de Savonni

Jean-Christophe et Marie-Hélène Félix dirigeants de Savonnia © Loïc Mazalrey

Qui a dit qu’il n’y avait plus de place pour l’inconnu dans sa vie professionnelle après 50 ans ? À 53 ans, Jean-Christophe Félix, un ancien cadre de l’industrie agroalimentaire reconverti depuis trois ans dans l’accueil en chambres d’hôtes à Bourgnac, en Bergeracois, a décidé de reprendre l’activité de sa voisine, la maître savonnière Nia Jenkins. Il a convaincu son épouse, Marie-Hélène Félix, de se lancer avec lui dans cette nouvelle aventure et proposé à un couple d’amis d’en faire autant. « Un jour, on a reçu un mail de Jean-Christophe intitulé « I have a dream » avec un powerpoint en pièce jointe. On l’a ouvert, feuilleté le powerpoint et presque aussitôt répondu à son expéditeur que nous étions partants pour l’accompagner dans ce nouveau défi », racontent Pascal, 51 ans, salarié dans la vente de denrées alimentaires, et sa femme, Patricia, 56 ans, secrétaire dans une entreprise agricole.

Passion savon

Les quatre copains ont repris la savonnerie de Nia Jenkins en mai 2023 et installé dans la foulée leur laboratoire dans les locaux d’un ancien commerce de Mussidan. La maître savonnière leur a cédé ses recettes, ses deux marques (Passion savon et Savonnia) et pris l’engagement de former pendant quatre ans Jean-Christophe et Patricia à la création de savons. « Nous partions de zéro », confie l’instigateur du projet. « Tout ce que nous savons, nous l’avons appris de Nia. »

Savon fraise-champagne, savon à l’artichaut, savon au monbazillac… Nia Jenkis a mis au point des parfums aussi inattendus que le sont les propriétés de certains savons

Accompagnement de quatre ans

Les quatre associés pouvaient difficilement espérer de meilleures conditions de reprise et pour cause. Nia Jenkins, maître savonnière depuis bientôt quarante ans, est une référence pour sa profession. Originaire du Pays de Galles, elle a emporté son savoir-faire avec elle et l’a fait rayonner en Dordogne depuis la petite commune de Bourgnac où elle a longtemps vécu avant de déménager un peu plus à l’ouest du département. « Nia a réussi là où beaucoup d’autres savonniers ont échoué : elle a réussi à faire de sa passion une activité rentable en commercialisant des produits de qualité en volume », souligne Jean-Christophe Félix.

« Fabriquer un savon basique, ce n’est pas ce qu’il y a de plus dur, c’est même très simple. En deux jours, n’importe qui peut en réaliser chez lui », abonde son épouse, Marie-Hélène. D’où le soin mis depuis son arrivée en Périgord par Nia à se distinguer de la concurrence en proposant des gammes de produits « à valeur ajoutée ».

L’entreprise recherche activement de nouveaux locaux pour y faire grandir le laboratoire de la savonnerie

« Nia a mis ses connaissances d’aromathérapeute professionnelle au service de la technique de fabrication des savons », indique Patricia, admirative du travail réalisé par sa formatrice. Savon fraise-champagne, savon à l’artichaut, savon au monbazillac… Nia Jenkis a mis au point des parfums aussi inattendus que le sont les propriétés de certains savons. « Au total, notre maître savonnière a conçu une centaine de recettes », complète Jean-Christophe Félix qui est encore loin de toutes les connaître. « J’en maîtrise une cinquantaine et j’en ai encore cinquante à apprendre dans les prochains mois », estime l’intéressé.

Un fort potentiel de développement

L’ancien cadre dans l’industrie agroalimentaire veut prendre le temps de « faire les choses bien », en cherchant à consolider ses sources d’approvisionnement en matières premières locales. « Nous achetons déjà plu- sieurs ingrédients en Dordogne, à l’instar des fraises que nous prenons chez un fraisiculteur du pays vernois, de l’huile de noix que nous achetons au moulin de Laveyssière de Neuvic ou du monbazillac que nous achetons chez un vigneron du Bergeracois. Notre souhait est de continuer en ce sens et d’aller plus loin, quitte à devoir payer un peu plus cher qu’en important la matière de l’étranger », glisse l’artisan, plein d’ambitions pout la savonnerie.

« Nous avons hérité de bases solides avec un site Internet dynamique, des partenariats avec des comités d’entreprise établis de longue date e t une boutique dans le centre-ville de Mussidan qui emploie une salariée », admet Marie-Hélène Félix, convaincue que les ventes de la savonnerie peuvent encore progresser à condition d’avoir un outil de production adapté. « Ce n’est pas le cas pour l’instant », reconnaît l’intéressée qui recherche activement de nouveaux locaux pour y faire grandir le laboratoire de la savonnerie. « L’idéal serait de pouvoir disposer d’un bâtiment de 300 mètres carrés dans la vallée de l’Isle », confie Marie-Hélène Félix.

Dans l’attente d’une bonne nouvelle, les quatre copains s’organisent déjà pour inscrire la savonnerie dans les circuits touristiques locaux de la vallée de l’Isle. « Il y a un savoir-faire, une histoire à raconter. Les gens raffolaient de voir Nia Jenkins travailler dans son atelier. Ils seront ravis de pouvoir continuer à partager ce moment avec nous », veulent croire les quatre associés.