Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Wyve façonne les planches du futur

Produire des planches respectueuses de l’environnement est le défi de l’industrie du surf. Avec leur procédé breveté, Sylvain Fleury et Léo Bouffier fabriquent des planches en impression 3D en utilisant un bioplastique d’origine végétale. Une levée de fonds de 1,1 million d’euros réalisée en mai dernier devrait leur permettre de concrétiser leur ambition industrielle.

Sylvain Fleury et Léo Bouffier Wyve

Sylvain Fleury et Léo Bouffier © Maud Fryda

Fabriqués en polyuréthane issu de la pétrochimie, les pains de mousse composant les planches ne sont pas recyclables. Ceux en polystyrène le sont mais au sein de la filière surf, la démarche est rarissime. Enrobés de fibre de verre les pains de mousse sont solidifiés par des résines polyester ou époxy, également issues de la pétrochimie, polluantes voire même toxiques. Pas facile à assumer pour des surfeurs se revendiquant en osmose avec la nature. Quant à la communication des marques de surf, qu’elles vendent des vêtements ou du matériel, difficile de se prétendre écoresponsable malgré de sincères engagements.

En France, une poignée d’ateliers de planches de surf dispose du label Ecoboard certifiant une fabrication durable. L’entreprise Nomads Surfing de Bordeaux est quasiment la seule à recycler des pains de mousse en polystyrène. À Anglet, depuis 10 ans, l’atelier Notox est précurseur dans l’emploi de matériaux vertueux comme la fibre de lin ou le liège. Arrivée sur ce marché en 2020, la société Wyve relève à son tour le défi de la planche durable avec un nouveau procédé.

DU BIOPLASTIQUE PRODUIT À BASE D’AMIDON DE MAÏS

À la fin de leurs études d’ingénieurs, Sylvain Fleury et Léo Bouffier, passionnés de surf, ont eu le projet de concevoir une planche plus solide et éco responsable. Ils ont pu expérimenter leur concept sur l’imprimante 3D de l’incubateur de Polytechnique à Paris. La fabrication additive, connue sous le nom d’impression 3D, consiste à fabriquer un objet par ajout de matière que la machine dépose couche par couche. Les deux jeunes ingénieurs ont utilisé du PLA, un bioplastique d’origine végétale produit à partir d’amidon de maïs, pour façonner le « shape » de la planche en impression 3D. Cette forme a ensuite été enrobée de fibre de verre puis consolidée avec une résine époxy thermodurcissable. C’est la phase finale de stratification précédant l ’ajout des dérives. « Nous utilisons une résine époxy biosourcée à 40 %. C’est la résine la moins pire du marché en termes d’impact environnemental », déplore néanmoins Sylvain Fleury. Présentée et testée ensuite lors d’un voyage en Californie, la planche a convaincu l’écosystème du surf.

Présentée et testée en Californie, la planche a convaincu l’écosystème du surf

UNE PLANCHE TROIS FOIS PLUS RÉSISTANTE À L’IMPACT

« Nous avons déposé un brevet international sur le procédé de fabrication qui va de la partie impression 3D de la structure de la planche jusqu’au procédé de stratification qui est assez particulier. Nous sommes les premiers à l’opérer sur une structure creuse », explique-t-il. Fin 2019, la société est créée à Anglet d’abord sous le nom d’Hexa Surfboards puis change de nom pour Wyve. Les deux créateurs auraient pu se contenter de lancer un atelier artisanal de planches comme il en existe une bonne centaine en France mais ils ont choisi une stratégie industrielle. Ils ont conçu 18 modèles de planche déclinés chacun dans une dizaine de tailles offrant ainsi 150 possibilités depuis une commande via un questionnaire personnalisé sur leur site web.

« Notre valeur ajoutée concerne l’intérieur de la planche. De par notre matériau nous obtenons une structure plus résistante à l’impact et nos tests d’énergie de rupture en labo ont montré qu’elle est trois plus résistante à l’impact », argumente Sylvain Fleury.

Wyve

© Leo Gurthertz

400 PLANCHES PRODUITES EN 2022

Les planches Wyve sont vendues de 650 à 850 euros, ce qui les rend compétitives sur le marché. Il y aurait près de 40 millions de pratiquants dans le monde dont 450 000 en France. Pour les surfeurs du dimanche, les touristes et les pratiquants réguliers, environ 30 000 planches seraient fabriquées en France chaque année et 20 000 importées d’Asie. Wyve souhaite terminer l’année sur une production d’environ 400 planches et un chiffre d’affaires de 300 000 euros. La levée de fonds de 1,1 million d’euros de mai dernier va permettre d’agrandir le centre de production d’Anglet, de s’équiper en nouvelles machines et d’augmenter les effectifs actuellement de 10 personnes à une trentaine dans 18 mois.

Wyve

© Ian Thurtell

L’ objectif es t de produire 1 000 planches par an et de contrôler toute la chaîne de valeur : recherche & développement, fabrication, commercialisation. « Notre pari est de tout faire sur place et de manière internalisée, c’est comme cela que l’on sera innovant », assure Sylvain Fleury. Avec leur look translucide, les planches Wyve se remarquent et l ’engagement écoresponsable de la marque renforce sa notoriété.