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Antabio : un espoir contre l’antibiorésistance

La biotech toulousaine Antabio a bouclé mi-décembre une levée de 25 millions d’euros. Objectif : financer les essais de son candidat-médicament contre l’antibiorésistance. Un phénomène qui pourrait tuer plus de 10 millions de personnes par an à l’horizon 2050.

Antabio, Toulouse

© Franck Sonnet

C’est une levée record que vient de boucler la biotech haut-garonnaise Antabio. Vingt-cinq millions d’euros en série B, obtenus auprès de ses investisseurs historiques (BNP Paribas Développement, Relyens Innovation Santé / Turenne Capital, IRDI Capital Investissement et Christophe Ricard, ancien président d’OM Pharma), mais également auprès de nouveaux partenaires internationaux : l’AMR Action Fund et le fonds EIC de l’Union européenne. « C’est la première fois que l’AMR Action Fund (fonds spécialisé dans la recherche sur l’antibiorésistance, N.D.L.R.) finance une entreprise européenne », se félicite Marc Lemonnier, fondateur et PDG d’Antabio.

Avec cette opération financière, la société implantée à Labège va pouvoir poursuivre les recherches sur son candidat-médicament contre l’antibiorésistance. Un espoir pour le secteur médical et des millions de patients dans le monde.

Un phénomène encore plus dangereux que le cancer

Marc Lemonnier, PDG d’Antabio. ©Anaïs Bertrand

« La résistance aux médicaments antimicrobiens a été reconnue comme une priorité critique par l’Organisation mondiale de la santé. Elle aurait contribué à près de 5 millions de décès en 2019 et pourrait conduire à plus de 10 millions de morts par an à l’horizon 2050, c’est-à-dire causer plus de décès que le cancer », déclare Marc Lemonnier. Parmi les explications au phénomène : le développement de maladies bactériennes de plus en plus virulentes et une résistance accrue aux antibiotiques liée à la surconsommation de ces derniers.

Pour contrer la situation, Antabio développe une solution inédite qui vise à casser l’antibiorésistance. « Notre molécule vient détruire l’armure des bactéries afin que les antibiotiques ayant aujourd’hui perdu de leur efficacité puissent à nouveau remplir leur rôle », explique le PDG de la biotech.

Lancement de la phase 2

La levée de 25 millions d’euros va permettre à Antabio de travailler sereinement jusqu’à la fin de l’année 2026, c’est-à-dire mener la phase 2 des essais. La phase 1, qui vise à tester des volontaires sains pour s’assurer de la sûreté du candidat-médicament, s’achève. La phase suivante qui sera préparée dès 2024 pour être réalisée en 2025 devra permettre de tester l’efficacité du médicament auprès d’environ 200 patients sujets à des infections résistant aux antibiotiques. « Il s’agit souvent d’infections nosocomiales, ou d’infections qui touchent des personnes déjà fragilisées dans les hôpitaux. »

En 2026, l’entreprise devra à nouveau trouver des financements pour la phase 3 des essais, qui correspond à « la répétition générale auprès de milliers de patients », avant la mise sur le marché. « Il faudra penser à un nouveau tour de table ou à nouer un partenariat avec un industriel pharmaceutique pour cette étape. »

Depuis sa création, l’entreprise qui emploie une vingtaine de salariés a levé plus de 50 millions d’euros.

L’impératif des financements

Antabio qui travaille en parallèle sur deux autres projets, toujours en lien avec la lutte contre les maladies bactériennes, est également en recherche de financement pour avancer sur ces travaux. « Dans le milieu des biotechnologies et de la biopharmacie, il faut du temps avant que les entreprises soient rentables, puisqu’il faut de nombreuses années de recherche avant la commercialisation des médicaments », rappelle Marc Lemonnier.

Depuis sa création, l’entreprise qui emploie une vingtaine de salariés a levé plus de 50 millions d’euros. Si toutes les étapes de test du candidat-médicament se passent sans encombre, Antabio espère une mise sur le marché de son médicament pour 2029… Soit 20 ans après la création de la société.

Anticiper l’avenir

Ambitieuse, l’entreprise prévoit ensuite de poursuivre son travail sur d’autres bactéries émergentes. « Avec les échanges internationaux, nous allons être de plus en plus confrontés au développement de bactéries et à de nouvelles pathologies qui en découlent », prévient Marc Lemonnier. La crise mondiale du Covid n’aura peut-être été qu’une répétition aux épidémies qui pourraient intervenir dans les années à venir. Face à ce danger, Antabio veut utiliser et renforcer son expertise en bactériologie pour proposer, depuis Toulouse, des moyens de lutte à l’échelle mondiale.