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Dordogne : grippe aviaire, une désolation

Après d’autres régions, le Périgord est touché par une sévère crise de grippe aviaire qui se répand comme un vent mauvais chez les éleveurs et gaveurs.

canard, grippe aviaire dordogne

© D. R.

Tous pensaient avoir réchappé à l’épizootie en cette sortie d’hiver, sans jamais perdre de vue l’évolution malheureuse des autres départements, Landes et Vendée surtout. Et voilà. Ce mardi 5 avril après midi, ce gaveur installé sur deux sites, à Vergt et à Cendrieux, attend l’équipe chargée d’euthanasier les canards qu’il gavait. Une piqûre pratiquée à la chaîne, 2 000 animaux sur chacun des sites, l’un touché par le virus, l’autre décimé à titre préventif. Quand le camion partira vers l’équarrissage, avec ses heures de travail tôt levé pour rien, il restera une somme de questions que le professionnel tournera en boucle, seul à bord après la procédure de chômage technique lancée pour ses quatre salariés. Terres du sud, la coopérative régionale à laquelle il adhère, est à ses côtés pour faire face à la crise qui menace la filière palmipèdes du groupe, laquelle représente 125 millions d’euros de chiffre d’affaires, mais aussi la branche volailles (136 millions d’euros)

QUEL AVENIR IMMÉDIAT ET AU-DELÀ ?

Les mesures radicales prises sur les sites concernés visent à protéger un maximum de producteurs et à sauver la saison de consommation estivale. Le chef d’entreprise se dit que ses bâtiments condamnés au vide sanitaire ne pourront sûrement accueillir aucun palmipède avant l’automne, ce qui peut condamner le rendez-vous essentiel des fêtes de fin d’année. Après l’ambiance morose liée au Covid, à la hausse des prix et à la guerre en Ukraine, c’est le coup de massue de trop.

Quelle indemnisation et quand ? Sera-t-il possible de trouver de quoi réapprovisionner la filière alors que les couvoirs ont été vidés en Vendée ? Les premières régions touchées, comme les Landes, seront les premières à relancer la production : comment le Périgord pourra-t-il revenir sur le marché ? « Les autres ont été frappés à l’aller des migrations, nous le sommes au retour. On cherche des raisons. Les animaux sont enfermés durant la période de gavage, on prend toutes les précautions. » L’un des canards arrivés le 24 mars devait incuber la maladie ou être asymptomatique. Le chef d’entreprise s’interroge même jusqu’aux rafales de vent qui ont balayé le département ces dernières semaines. « Nous avons l’impression d’être condamnés à revivre régulièrement ces contaminations liées aux déplacements saisonniers des oiseaux. »

Les restaurateurs craignent de manquer de spécialités prisées par les touristes

UN ÉLAN COUPÉ, DES MESURES STRICTES

L’entreprise basée à Vergt s’était développée de façon constante après le premier épisode de grippe aviaire qui avait touché la Dordogne, en 2016, sans la frapper. Les mesures de biosécurité avaient alors été renforcées. Les investissements initiaux sont amortis et depuis l’automne dernier, l’entreprise s’était lancée dans la vente directe de produits transformés avec un site marchand en ligne et une belle identité visuelle. Le stock de conserves à commercialiser va lui permettre d’aborder la première ligne droite de traversée du désert.

La situation évolue jour après jour en Dordogne, l’inquiétude des éleveurs et des gaveurs gagne les transformateurs et jusqu’aux restaurateurs qui craignent de manquer de spécialités prisées par les touristes qui choisissent le Périgord. En concertation avec les producteurs, le préfet a pris le 5 avril un arrêté déterminant un périmètre réglementé après la découverte de trois foyers d’influenza aviaire hautement pathogène à Saint-Geniès, en Périgord noir, et à Val-de-Louyre-et-Caudeau, près de Vergt. Très évolutive, l’épizootie a d’abord conduit à l’abattage de 45 000 volailles par les services vétérinaires, avec des interventions préventives sur sept foyers, puis à dépeupler encore les élevages en portant à plus de 100 000 le nombre de volailles euthanasiées (254 tonnes orientées vers l’équarrissage).

Neuf autres foyers ont en effet été confirmés au 8 avril, deux dans les communes précédentes et à Fouleix, Vergt, Sanilhac, Pressignac-Vicq, Sainte- Foy-de-Longas, Lanouaille et Ladornac. Et le premier périmètre a été étendu, passant de 6 à 40 communes dans la zone de protection (3 km autour des foyers confirmés) et de 89 à 270 communes concernées par le périmètre de surveillance de 20 km qui interdit le transport de volailles. La cartographie montre que cela impacte plus de la moitié du département. La préfecture indique que « les mesures déjà prises visent à créer les conditions d’un vide sanitaire dans un périmètre suffisamment large autour des foyers confirmés, afin de freiner la propagation du virus et de protéger les élevages indemnes », et rappelle que l’État compensera les pertes des exploitations concernées « dans le respect des réglementations européenne et nationale ».

La France et l’Europe sont confrontées depuis plusieurs semaines à un épisode d’influenza aviaire hautement pathogène (IAHP). « Ce virus atteint exclusivement les oiseaux, circulant dans la faune sauvage et se manifestant à l’occasion des migrations. Il n’est ni transmissible à l’homme par voie directe, ni par la consommation de viande d’origine aviaire, œufs, foie gras et plus généralement de tout produit alimentaire. »

LA FILIÈRE AVICOLE EN DORDOGNE

700 producteurs pour environ

100 millions d’euros de chiffre d’affaires.

En palmipèdes gras : 3 millions de têtes et 60 millions d’euros de CA (300 producteurs de canards gras en filière courte, 200 en filière longue, une trentaine de producteurs pour 60 000 oies), 2 couvoirs canards, 1 couvoir oie, 4 principaux abattoirs.

En volailles de chair : 6 millions de têtes pour 36 millions d’euros de chiffre d’affaires, 200 producteurs de volailles, 3 principaux abattoirs.

(chiffres : cellule de crise Influenza aviaire)

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