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[ Dordogne ] Guyenne Papier : Ode à l’industrie

Implantée à Nanthiat, près de Thiviers, Guyenne Papier se distingue sur des supports à valeur ajoutée pour l’industrie graphique et textile, la transformation papetière et l’impression digitale. Ce fleuron se développe avec le soutien de France Relance.

Guyenne Papier

© D. R.

Acteur majeur de la filière bois-papier- carton en Dordogne, l’entreprise spécialisée dans le couchage apporte des propriétés spécifiques (d’impression, techniques, esthétiques) à tout type de support souple. Guyenne Papier est une vieille dame qui affiche plus de 300 ans d’existence (1689) avec des hauts (jusqu’à 400 employés dans le nord Dordogne) et des bas dans un contexte général d’effondrement de l’industrie papetière marqué au niveau national par la perte de pointures internationales comme le fabricant de papier de niche Arjowiggins, en 2019. Face à la désindustrialisation et à la mondialisation de la filière, l’entreprise s’est accrochée pour prendre un virage serré en s’orientant vers des produits de niche, avec un effectif ramené à 42 salariés. Elle compte parmi les deux sites en Europe à fabriquer des papiers fluorescents, l’autre concurrent étant allemand.

Pour un projet estimé à 1,2 million, Guyenne Papier va recevoir 292 000 euros de France Relance

« Nous étions fabricants de papier, nous ne le sommes plus : nous sommes devenus coucheurs enducteurs », résume Céline Procop, qui a repris l’entreprise en 2012. « Nous achetons des produits souples, papier, textile ou film, et nous y ajoutons une couche qui va apporter des propriétés particulières. Ce qui donne des papiers peints, du papier photo jet d’encre pour des marques d’imprimante bien connues ou encore du papier fluorescent. Nous intervenons vraiment sur des spécialités. »

© D. R.

Un élan pour conjuguer patrimoine et avenir

Guyenne Papier souhaite créer un pôle finition-transformation afin de développer des activités actuellement confiées en sous-traitance à des partenaires européens et asiatiques. Avec l’aide de France Relance, elle va prolonger son activité en réintégrant des pans de son patrimoine : embossage, bobinage, découpe, contrecollage sont autant de métiers qui gravitaient autour de l’industrie papetière et qui ont disparu lorsqu’elle a dû se concentrer sur son cœur d’activité. « En réduisant la taille de l’entreprise pour obtenir plus de flexibilité et traverser les difficultés, ces métiers ont été délégués. Mais quelques salariés dans l’effectif de Guyenne Papier ont conservé ces savoir-faire et il est encore temps de les sauvegarder. Nous avons toujours les machines, nous pouvons les remettre en route et nous réapproprier ces connaissances, avant le départ en retraite de ceux qui en ont la mémoire. C’est maintenant ou jamais : c’est ce qui m’a motivée pour déposer le dossier à France Relance. » Le préfet, qui suit le plan de près, ajoute que pour accompagner cette transmission de compétences, des aides pourront aussi être mobilisables pour former les salariés.

Guyenne Papier

Céline Procop © D. R.

Céline Procop se dit agréablement surprise par la simplicité de montage de ce dossier déclaratif, qui lui a permis de se projeter au-delà de la crise : « Sans ce plan, nous n’aurions rien envisagé, par manque de souffle et de marge de manœuvre ». Pour un projet estimé à 1,2 million, Guyenne Papier va recevoir 292 000 euros de France Relance au titre du soutien à l’investissement industriel dans les territoires. En plus de contribuer à valoriser ce patrimoine, cela va permettre de créer et de consolider des emplois : a minima, une quinzaine de recrutements sont prévus graduellement. Céline Procop, fière d’intégrer ce plan de relance, s’y trouve légitime : « ce dispositif s’adresse à des entreprises dont le modèle économique est viable, il permet ici de perpétuer une histoire qui a de l’avenir ».

Ode à la réindustrialisation

« France Relance est une opportunité pour reparler de la désindustrialisation, dont on a beaucoup souffert : nos campagnes se sont perdues, désertifiées. Il y a quarante ans, de belles entreprises portaient tout un territoire, elles en étaient les piliers économiques. » Céline Procop rappelle que pour un euro produit par l’industrie, celle-ci consomme 70 centimes de biens intermédiaires. « C’est un vrai générateur en effet cascade pour nourrir des économies locales ou connexes. À vouloir importer des choses qui ne se fabriquent plus chez nous, on a perdu cet effet d’entrainement : pour 1 euro dans les services, la dépense n’est que de 40 centimes. L’effet levier n’est pas le même. »

À titre personnel, la présidente de Guyenne Papier s’intéresse aux grands prédateurs, les requins notamment, observés à la Réunion, où elle a vécu. De quoi établir quelque parallèle. « J’ai été contactée il y a peu par un ancien acheteur d’une papeterie devenue coquille vide.

Il a perdu son emploi après avoir longtemps travaillé dans cette industrie et, depuis, il importe d’Inde des papiers fluorescents, qu’il m’a proposés… » Continuer à ancrer une activité en France relève parfois de la résistance et du militantisme : « Notre combat est souvent compliqué pour des raisons réglementaires, mais il est porté par des valeurs : France Relance donne un vrai coup de pouce aux entreprises qui ont la volonté de faire vivre leur territoire. »

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