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Layrac-Dubaï – Itinéraire d’un banquier d’affaires

Un Lot-et-Garonnais originaire de Layrac, à côté d’Agen, vit aujourd’hui le nouvel eldorado oriental. Installé à Dubaï, il travaille pour une entreprise appartenant à l’État saoudien, Acwa Power. Rencontre avec Julien Manana, un globe-trotter de la finance internationale.

Julien Manana dubaï

Julien Manana © D. R.

Retracer le parcours professionnel de Julien Manana, c’est parcourir la carte mondiale des places financières. Londres, Francfort, Paris, Luxembourg, Dubaï sont autant de destinations que le jeune trentenaire a cochées sur son CV. Pourtant, tout a démarré sur les bords de Garonne, à Layrac. Né en 1991 de parents d’origine malgache, Julien a un parcours scolaire classique qu’il conclut par un baccalauréat scientifique au lycée Palissy d’Agen. Pas encore déterminé sur son avenir, il enchaîne avec un diplôme universitaire assez généraliste en commerce.

 

LA CRISE FINANCIÈRE DE 2008 : UN DÉCLIC POUR LUI

De son propre aveu, ces années ne sont pas les meilleures de son parcours. Cependant, la crise financière de 2008 et ses conséquences vont provoquer un déclic chez lui : « L’affaire Jérôme Kerviel au sein de la Société Générale, la chute de Lehman Brothers ou encore l’affaire Tapie m’ont passionné. J’ai donc essayé de comprendre les mécanismes qui ont mené à cela. De plus, la finance allie des thèmes que j’apprécie beaucoup : le monde de l’entreprise, l’investissement et la politique. C’était le cocktail professionnel parfait pour moi ».

DÉBUTS AU LUXEMBOURG

La réussite au concours de l’école de commerce Skema de Nice va permettre à Julien d’entrer pleinement dans le monde de la finance. Ses deux stages réalisés à la BNP Paribas et à la Banque Rothschild au Luxembourg signent son entrée dans cet univers fantasmé pour certains, honni pour d’autres. Face à ces critiques, Julien Manana tient à rappeler le cœur de sa mission : « mon métier est de financer les grands projets d’infrastructures d’utilité publique comme des universités, des autoroutes, des lignes ferroviaires, des ports, des aéroports, des stades ou des centrales électriques en trouvant des fonds sur le marché mondial. À la Société Générale, j’ai travaillé par exemple sur le financement de Nord Stream 2, le célèbre pipeline de gaz entre la Russie et l’Allemagne. À la banque de Chine, j’ai participé aux financements des Nouvelles Routes de la Soie, souhait du président Xi Jinping. Cette vision et ce côté de stratégie politique m’ont beaucoup plu ».

L’ÉVOLUTION À LA CITY

Après un passage éclair à La Banque postale à Paris, puis un détour outre-Rhin à Francfort, au sein de la Société Générale, c’est la City londonienne qui attire Julien au sein de la banque de Chine. L’empire du Milieu dispose d’une réserve monétaire importante qui sert à financer des projets sur tous les continents, étendant ainsi sa zone d’influence politique. Suite aux différentes COP, la problématique du réchauffement climatique devient planétaire et va jusqu’à toucher le monde de la finance : « les financements se sont tournés de plus en plus vers les énergies renouvelables, au détriment des énergies fossiles. J’ai donc commencé à me tourner vers le financement des projets éoliens et photovoltaïques. Cela m’a
amené à travailler dans un jeune fonds d’investissement créé en 2020 à Londres, spécialisé dans les énergies renouvelables et appartenant à un trader suisse et à un fonds de pension australien : Nala Renewables. J’étais le banquier de la boîte m’occupant des levées de fonds auprès des institutions financières ».

L’ARRIVÉE À DUBAÏ

Bien installé à Londres, Julien se voyait bien poser ses valises de globe-trotter pour un temps. Mais sa carrière est aussi animée que les cours de la bourse : « j’ai été régulièrement approché par des chasseurs du Moyen-Orient pour travailler là-bas et on m’a présenté une opportunité professionnelle au sein d’Acwa Power (développeur industriel en énergie renouvelable) ». Cette entreprise est une entité appartenant à l’Arabie saoudite au travers de son fonds souverain, le PIF. « L’Arabie saoudite affiche une vision pour 2030 avec de grandes ambitions et de grandes infrastructures à construire, j’ai naturellement été séduit par ce projet avec de nouvelles villes à construire et tout reste à faire dans le renouvelable », ajoute t-il. Et quand l’on évoque avec lui les polémiques liées au régime saoudien, Julien répond : « je travaille avant tout pour un développeur en énergie renouvelable, saoudien évidemment, mais le secteur du renouvelable et l’ambition du pays dans ce domaine et dans celui des infrastructures est le plus important pour moi. Le Moyen-Orient évolue plus vite que l’image qu’on en a en Occident ».

JULIEN MANANA : CV EXPRESS

2012-2013 : Bachelor en Business International avec Erasmus en Irlande
2013-2016 : Master 2 Finance d’entreprise
à l’école de commerce de Skema
2014 : stage à la BNP Paribas au Luxembourg
2015 : stage à la banque Edmond de Rothschild au Luxembourg
2018-2019 : La Société Générale à Francfort sur le Main
2019-2022 : Banque de Chine à Londres
2022-2023 : Nala Renewables à Londres : fonds d’investissement suisse dans les énergies renouvelables
Depuis septembre 2023 : Acwa Power, développeur en énergie
renouvelable détenu par le fonds souverain d’Arabie saoudite