L’envahissement du siège social de LVMH et les jets de peinture contre la façade de la Fondation Vuitton lors des manifestations contre la réforme des retraites sont un scandale et une injure symbolique à l’excellence de la filière française du luxe et à l’ensemble des parties prenantes (salariés, clients, fournisseurs, actionnaires) qui contribuent à sa réussite. Très impressionnant de détermination et de sérénité lors de l’assemblée générale des actionnaires d’approbation des comptes annuels 2022, Bernard Arnault, qui aurait été sûrement anobli au Royaume Uni, a eu raison de faire appel à Nicolas Bouzou pour démontrer durant quelques minutes l’impact positif du groupe LVMH sur l’économie française. Le marché du luxe pèse économiquement au niveau mondial 1 350 milliards d’euros qui se répartit de la manière suivante : produits du luxe (montres, sacs, bijoux) : 400 milliards d’euros, automobile : 600 milliards d’euros ; hôtellerie : 100 milliards d’euros ; vins et spiritueux : 80 milliards d’euros ; gastronomie : 50 milliards d’euros ; équipements : 50 milliards d’euros ; jets : 30 milliards et autres : 40 milliards, et se révèle en constante progression depuis quelques années. Et, d’ici à 2030, le marché devrait compter 100 millions de nouveaux clients, soit une progression impressionnante de 20 %.
UNE FILIÈRE EXTRÊMEMENT COMPÉTITIVE
La filière française du luxe est extrêmement compétitive, possédant à la fois des grands groupes qui sont des leaders mondiaux mais également un tissu de PME, en général familiales, et particulièrement performantes. Parmi les 5 plus importantes sociétés mondiales (LVMH, Kering, Estée Lauder, Richemont, Chanel), 3 sont françaises (LVMH, Kering, Chanel) sans oublier la division luxe de L’Oréal et la toujours subjuguante et étonnante Hermès. Les marchés financiers, toujours semi-efficients au sens de l’économiste américain Eugène Fama, ne s’y sont pas trompés faisant des KHOL françaises (Kering, Hermès, L’Oréal, LVMH) l’équivalent des GAFAM, dans le secteur du luxe.
De manière impressionnante, les KHOL représentent 30 % de la capitalisation boursière du CAC 40 et expliquent pour une grande partie son augmentation depuis le début de l’année. Les marchés financiers, points de rencontre entre des millions d’investisseurs acheteurs et vendeurs de titres de sociétés tous les jours, ne s’y sont pas trompés : au cours des derniers jours, le cours de LVMH a atteint 900 euros et Hermès a donné lieu à une cotation stratosphérique de 2 000 euros. Heureux les actionnaires de LVMH et d’Hermès et chapeau bas à tous les collaborateurs de ces différents groupes qui, pour certains d’entre eux, sont des actionnaires salariés via les contrats d’intéressement et les montants investis dans les PEE (Plan d’Épargne Entreprise).
DES PME RÉGIONALES PERFORMANTES
Ensuite, l’économie française a la chance de posséder une galaxie de PME et ETI familiales dont la performance humaine, financière, organisationnelle, sociale et sociale est au rendez-vous. La Région Nouvelle-Aquitaine possède notamment une filière cuir extrêmement dynamique. Pour n’en citer que quelques unes, c’est le cas de la maison Weston à Limoges (chaussures), de la société Repetto en Dordogne (ballerines), de la ganterie de Saint-Junien ou de la maison Lafargue à Saint-Jean-de-Luz (maroquinerie et travail du cuir). La réussite de la filière luxe est l’illustration la plus parfaite que la solution à nos problèmes économiques est celui de la construction d’une économie de l’offre articulée autour du « beau » travail et de l’innovation, et surtout d’une compétitivité valeur qui permet de traduire dans le prix de vente tout le savoir-faire des artisans des maisons de luxe françaises. La compétitivité valeur est la clef de la réduction de notre déficit commercial à travers un redressement des exportations. Mais, de manière plus précise, quels sont les facteurs explicatifs de la performance hors norme de cette filière ?
Le luxe est lié au temps qui passe. Jean-Louis Dumas (Hermès)
STORYTELLING
Tout d’abord, le storytelling. Le luxe à la française a une histoire ancienne depuis les Manufactures sous Colbert en passant par les malles Vuitton ou la vie hors norme de Coco Chanel. Ensuite, les marques françaises ont une image très forte et qui s’est consolidée au cours du temps par un effet démultiplicateur et selon une logique d’agrégation. Le groupe LVMH est pour cela remarquable. Ses marques sont uniques : il n’existe qu’une marque de champagne Dom Pérignon, qu’un Christian Dior ou qu’un parfumeur Guerlain. ■