Couverture du journal du 03/09/2024 Le nouveau magazine

Le Téfécé vise toujours plus haut

Champion de Ligue 2 en 2022, vainqueur de la Coupe de France en 2023, le club toulousain revit au plan sportif. La dynamique insufflée depuis l’arrivée de l’actionnaire américain RedBird Capital Partners en 2020 apporte aussi un regain de popularité aux Violets. Mais pas question de s’arrêter là pour le directeur général du Téfécé, Olivier Jaubert.

TFC, football téfécé

Olivier Jaubert, directeur général du Toulouse FC © TFC

La Vie Economique du Sud-Ouest : Quel bilan tirez-vous des trois premières années depuis le changement d’actionnaire ?

Olivier Jaubert : « L’idée est d’amener le club le plus haut possible. Notre objectif est de nous stabiliser en Ligue 1 et à terme disputer la coupe d’Europe une année sur deux. À notre arrivée, on a constaté qu’il fallait reconstruire la marque Téfécé. Je vous donne un exemple, quand je suis arrivé à Toulouse, je suis allé dans un commerce un soir de match, personne ne savait que l’on jouait, ni contre qui. Le club n’était plus dans sa ville. On a débuté ce travail au cours d’une année 2020-2021 particulière avec des stades à huis clos à cause du Covid. Il fallait donc une stratégie forte sur les réseaux sociaux pour renouer le lien avec nos supporters. La deuxième saison nous a permis de rouvrir le Stadium et d’y faire le plein en fin de saison quand on jouait la montée. On a pu préparer au mieux notre arrivée en Ligue 1 avec un programme commercial sur les hospitalités. Aujourd’hui, nos loges sont pleines et de nouveaux partenaires nous rejoignent comme GLS, Actual, le groupe Accor ou encore Burger King. »

L’actionnaire RedBird déjà vendeur du club ?

Selon les informations de l’agence américaine Bloomberg, l’actionnaire RedBird Capital Partners envisagerait déjà de revendre le TFC trois ans après son rachat. Une rumeur que le club ne souhaite pas commenter. Si rien ne permet d’affirmer que RedBird voudrait se séparer du Téfécé, on constate toutefois que la valeur du club a considérablement augmenté depuis le rachat de 85% des parts pour 11 millions d’euros en 2020. A titre d’exemple, le club de Strasbourg – en L1 depuis la saison 2017-2018 – a été vendu cet été au consortium américain de BlueCo pour la somme de 75 millions d’euros.

LVE : Comment parvenez-vous à convaincre ces marques de signer avec le Téfécé ?

O. J. : « C’est beaucoup de travail. Mais soyons humbles car aujourd’hui, c’est encore nous qui faisons sonner le téléphone chez les autres que l’inverse ! C’est l’élévation de notre marque qui va nous aider à générer de nouveaux revenus. Pour cela, il faut une identité de marque. Nous l’avons reconstruit grâce à notre collaboration avec une agence qui ne travaille pas avec des clubs de football généralement. Il s’agit de Buzzman qui accompagne Burger King par exemple et qui est à l’origine de notre slogan « Debout toujours ». On a recentré notre plateforme de marque sur le violet, sur l’Occitanie, sur la croix occitane … Nos maillots portent cette identité. Tout cela crée de l’attractivité pour les marques. On évoquait le groupe Accor, il n’y a que le PSG et nous qui sommes avec eux en France. Pareil pour GLS dont l’autre club est le Borussia Dortmund. De grands annonceurs vont nous rejoindre ces partenariats vont nous aider à croître. »

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Le Stadium plein de plus de 30 000 personnes © TFC

LVE : Comment allez-vous faire si les loges du Stadium sont déjà pleines aujourd’hui ?

O. J. : « Nous avons des ambitions pour ce stade. Aujourd’hui, il y a 1 200 places hospitalités. La norme tourne autour de 2 800 à 3 000. On travaille avec des cabinets d’architectes, on étudie des programmes d’investissements. Mais il faut avant tout modifier la relation contractuelle avec Toulouse Métropole afin de reprendre l’exploitation intégrale du Stadium. C’est un projet dans un coin de notre tête depuis notre arrivée mais on savait que cela ne pouvait pas se concrétiser avant la Coupe du Monde de rugby. Aujourd’hui, le projet est en discussion et nous aimerions parvenir à un accord à partir de la saison prochaine. Nous nous sommes montrés rassurants pour la métropole et je pense qu’ils nous voient comme des gens suffisamment sérieux pour gérer cela. Maintenant, il faut que cet accord soit équilibré pour toutes les parties. »

Nous avons un projet à très long terme, d’ici 10 ou 15 ans, de construire un grand stade de 42 000 places

LVE : En cas d’échec, envisageriez-vous la construction d’un nouveau stade ?

O. J. : « La moyenne de spectateurs à Toulouse était de 23 500 personnes la saison dernière et de 26 500 cette saison. On a un stade de 33 000 places donc on a encore du chemin à faire. Le jour où on jouera à guichets fermés tous les matchs, la question se posera. Nous avons un projet à très long terme d’ici 10 ou 15 ans avec un stade de 42 000 places. Grâce à ce chiffre, vous accueillez des compétitions internationales, les demi-finales du Top 14, les équipes de France de football et de rugby … Mais il faudra étudier la faisabilité et voir à quel endroit on pourrait construire. Cela ne sera probablement pas sur l’île du Ramier. La question du coût se posera aussi car un nouveau stade c’est 200 ou 300 millions d’euros et ça ne se trouve pas comme ça. Aujourd’hui, notre priorité c’est la construction du centre de performance du club sur l’ancien restaurant universitaire Daniel Faucher, qui devrait ouvrir en juillet 2025. On réfléchit également à créer notre propre centre d’entraînement à une vingtaine de kilomètres de Toulouse. »

LVE : Vous avez lancé un plan « Ambitions 2027 » pour doper les revenus du club, comment est-ce que cela se traduit ?

O. J. : « Il fallait mettre notre département des revenus en conformité avec nos ambitions. Nous avons recruté Jennifer Darbas comme directrice générale adjointe en charge des revenus ainsi qu’un nouveau responsable billetterie, Max Clavel. Côté produits dérivés, Régis Rodas, qui a dirigé le Nike Store des Champs-Elysées, nous rejoint. Sur les partenariats également, nous nous sommes attachés les services de Pierre-Nicolas Moreau qui nous vient de la Ligue Nationale de Rugby. »

LVE : Quels leviers pouvez-vous activer aujourd’hui pour augmenter les revenus du Téfécé ?

O. J. : « Un club a plusieurs sources de revenus. La principale c’est les droits TV qui sont actuellement en renégociation entre la Ligue et les diffuseurs. On peut agir sur les autres postes comme le sponsoring. Prenons exemple sur les clubs allemands. Certains ont plus de 25 sponsors mais seulement 3 sur le maillot. Est-ce que ce modèle est transposable ici ? Peut-être que l’on peut vendre séparément le sponsoring des maillots d’entraînement, des féminines, des jeunes … Ce sont des pistes. D’ici 2027, l’objectif est de multiplier nos recettes sponsoring par 2. On va également changer d’équipementier la saison prochaine, on a eu 8 propositions et de grands noms s’intéressent à nous. »

Ce n’est pas parce qu’il y a le plus grand club de rugby du monde à quelques kilomètres qu’on ne peut pas exister

LVE : Qui sera le futur équipementier du club ?

O. J. : « Il est encore trop tôt pour le dire. Mais vous savez, je suis un ancien de Nike, notre directeur marketing Sébastien Duhamel vient d’Adidas et nous avons beaucoup d’amis chez Puma. Il est probable que le vainqueur soit l’un des trois. »

LVE : Comptez-vous jouer sur le prix des billets au Stadium ?

O. J. : « Nous n’allons pas faire exploser les prix. On ne peut pas demander à des familles qui viennent à 4 au stade de sortir plus de 150€, c’est trop cher. Nous devons garder ce côté populaire, et proposer de nombreuses places à des tarifs abordables. Aujourd’hui, nous avons le public le plus jeune de France, avec 20% de femmes abonnées, nous devons pérenniser ce public et ça passe aussi par des places plus abordables. Nous avons encore du travail pour faire revenir au stade des gens qui habitent dans des communes en périphérie de Toulouse. Mais l’avantage aujourd’hui, c’est que notre public s’identifie à l’équipe et au projet, c’est ainsi qu’on construit la fidélité à un club. »

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Stadium de Toulouse © TFC

LVE : Cette politique tarifaire s’applique-t-elle aussi à vos partenaires ?

O. J. : « Oui, quand on pourra construire plus de places en loges, on le fera et les tarifs évolueront. Mais on ne fera pas tout et n’importe quoi. Dans la Haute-Garonne, plus de 90% des entreprises sont des TPE/PME qui ne peuvent pas mettre 10 000 euros par an pour une loge. Il faut être lucide. À nous de convaincre des entreprises de nous rejoindre, même celles qui ne pensent pas forcément au Téfécé quand on évoque le sport à Toulouse. Mais ce n’est pas parce qu’il y a le plus grand club de rugby du monde à quelques kilomètres qu’on ne peut pas exister. »

LVE : Renommer le Stadium est-il à l’ordre du jour ?

O. J. : « Nous avons un stade sans nom donc il est possible d’accoler une marque devant. Aujourd’hui, ce chantier n’est pas prioritaire. Nous souhaitons d’abord multiplier les partenariats. Mais si on rencontre un partenaire titre pour le Stadium, c’est en effet une belle source de revenus possible. Si on a l’exploitation du stade, on peut espérer 3 millions d’euros par an. »

LVE : Le club a ouvert une boutique en centre-ville rue de Rémusat, n’est-elle pas aujourd’hui sous-dimensionnée ?

O. J. : « Nous avons l’ambition de créer d’autres boutiques. Elles ne seront peut-être pas en centre-ville mais dans des centres commerciaux en périphérie de Toulouse. Le merchandising est une source de revenus qu’on doit encore améliorer. Il y a un gros potentiel, on l’a vu la saison dernière avec 26 000 maillots vendus et 30 000 produits écoulés en lien avec la Coupe de France. Aujourd’hui, le Téfécé est un club qui gagne de l’argent car nous travaillons différemment des autres. La route est encore longue. C’est comme grimper l’Alpe d’Huez, mais nous n’en sommes qu’au 8e virage. Le seul scénario, c’est d’aller plus haut. »

Toulouse Football Cœur, atout mécénat

À Toulouse, la politique RSE est ancrée dans les habitudes. Les premiers projets sport et citoyenneté remontent à 2001 mais il faut attendre 2010 pour la création de la Fondation du Toulouse FC. Il y a deux ans, le club s’est doté d’un fonds de dotation « Toulouse Football Cœur » pour organiser des événements et lever des fonds dans les domaines de la santé et la précarité. « C’était une étape naturelle » rembobine le président du Téfécé, Damien Comolli. « Nous voulions impulser une nouvelle dynamique à notre engagement vers la communauté toulousaine. » En deux ans, près d’une cinquantaine de projets ont été soutenus et deux diners de gala ont permis de lever plus de 150 000€. « Nous tentons d’accompagner une association par mois » explique Manon Lombard, responsable RSE. « On cherche donc des mécènes pour nous aider à concrétiser nos projets sur notre territoire. » À cette fin, le Comex 40 du Medef est un partenaire du Toulouse Football Cœur et vise l’implication d’entreprises locales pour soutenir les actions de mécénat.

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Damien Comolli, président du Toulouse FC, Manon Lombard, responsable RSE et Line di Guglielmo, chargée de mission RSE © TFC