Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Pastels Girault, un pastel sinon rien

C’est un morceau de couleur qui a traversé 250 ans d’histoire jusqu’à nous : les Pastels Girault, à côté de Montignac-Lascaux, prolongent le geste des premiers artistes de l’Humanité pour inscrire ce pan des Beaux-Arts dans une dynamique d’avenir.

Pastels Girault

Prix Pastel ©SBT

La Truffe, association des Périgourdins de Paris, donne traditionnellement rendez-vous à ses membres vers la mi-août, à Périgueux, pour une remise de prix distinguant des entreprises. Pour sa 17e édition, Jean-Luc Soulé et les membres du jury, placés sous la présidence de Marie-Claude Arbaudie, productrice de cinéma, ont salué la réussite des Pastels Girault. La dotation de 3 000 euros va aider l’entreprise à financer sa participation, en juin prochain, à un salon américain réputé, le continent comptant de très nombreux pastellistes ; une belle occasion de consolider le rayonnement à l’international.

Cette entreprise artisanale, fondée à Paris sous l’Ancien Régime déclinant, en 1780, déplacée à Montreuil en 1927 puis en Périgord, a été reprise en 2016 dans le souci de sauver un savoir-faire unique : c’est la plus ancienne marque de pastels secs encore en activité dans le monde. Karine Loiseau est la nièce du dirigeant qui avait choisi de déplacer l’entreprise près de Montignac, en 1998 : elle est la 4e génération à prendre la relève, la famille de Christian Petit ayant pris la suite de la lignée des fondateurs, Girault… Neuf générations, sur deux familles, se sont ainsi succédé en gardant intact le procédé de fabrication des 526 teintes du nuancier d’origine, lequel reste une valeur sûre pour les grands musées internationaux qui font appel à cette gamme pour restaurer des œuvres. La disponibilité des références remonte progressivement vers l’intégralité du dégradé originel, avec 300 teintes préservées et fournies régulièrement depuis trente ans.

Opération réalisée en interne

Karine et son mari, Stéphane, ont quitté une vie et une carrière bien établie en région parisienne pour répondre à la proposition de leur oncle. Ils se sont lancés avec la même passion dans l’aventure entrepreneuriale pour développer l’activité sans jamais négliger son aspect patrimonial : dans cette Vallée de l’Homme, à deux pas de la grotte de Lascaux, impossible d’oublier le lien avec les premiers artistes qui ont manié des pigments pour orner les parois. Le couple a d’ailleurs créé, en forme d’hommage, une palette spéciale « art pariétal » déclinant les teintes ocrées et cuivrées des origines.

Stéphane a appris les gestes qui font perdurer le fragile équilibre de l’union des pigments et du kaolin (une recette secrète) tandis que Karine assure la gestion et l’approche commerciale. Le couple maîtrise de A à Z, de la réalisation à l’expédition, le sort de ses petites séries. En plus de la quinzaine de salons spécialisés où expose l’entreprise et qui comptent pour 20 % du chiffre d’affaires, un secteur bouleversé par la crise sanitaire, c’est par internet que sont commandés l’essentiel des 150 000 bâtons produits chaque année, livrés en France et aussi diffusés, pour moitié, partout dans le monde (Amérique du Nord, Australie, Russie, Europe, Japon). En cinq ans, le couple est en passe de gagner le double pari de la transmission et de la modernisation, en conservant précieusement le processus de fabrication qui reste le cœur de métier et en rapprochant l’atelier dans un bâtiment aménagé à proximité de l’espace de vente et d’exposition, bien en vue à l’entrée nord de la ville. Cet investissement permet de faciliter la production, avec l’acquisition d’une nouvelle machine pour élargir l’offre, et d’améliorer le stockage de ces fragiles bâtonnets aux mensurations précises (61 mm de long pour 6 mm de diamètre).

Ils se dessinent dans leur perfection au bout d’un cycle de trois semaines : tout commence avec la pesée et un broyage homogène, une étape de haute-technicité ; puis un pressage-extrusion (avec un appareil vieux de 150 ans) avant un découpage précis et un marquage, gage d’appartenance à cette dynastie colorée, et enfin le séchage défini en fonction du climat extérieur.

Labellisés Entreprise du Patrimoine Vivant (EPV) depuis 2013, les Pastels Girault présentent l’étendue de leur talent mais aussi celui des artistes qui utilisent le pastel sec puisqu’ils ont ouvert une galerie d’exposition, vitrine d’un art en plein renouveau comme de la boutique où l’on peut se procurer directement les couleurs à leur source. Il est aussi possible de venir se perfectionner à l’occasion d’ateliers et stages animés par des pointures de la discipline.

Le parti-pris d’excellence a valu à la marque de représenter la Dordogne lors de la Grande exposition du Fabriqué en France proposée à l’Élysée, le 3 juillet. Un retour triomphal dans la capitale qui l’a vu naître et lui avait déjà décerné, lors des Expositions Universelles de 1878, 1889 et 1900, la médaille d’argent qui avait conféré à ces pastels une renommée internationale.

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