Couverture du journal du 07/05/2024 Le nouveau magazine

Pyrénées : le changement (climatique) c’est maintenant !

Entre crise énergétique et crise climatique, les stations pyrénéennes sont appelées à revoir leur modèle économique et à s’adapter. 2023-2024 s’annonce comme une saison de transition avec de gros investissements et de nouveaux efforts côté développement durable. Les directeurs de station se disent mobilisés et motivés quant à la suite.

Pyrénées

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Après une saison dernière contrastée, 2023-2024 tiendra-t-elle ses promesses ? La Compagnie des Pyrénées, propriétaire de la marque N’PY, a réuni à Ibos début novembre les directeurs des stations du premier réseau de domaines skiables non reliés de France pour lancer le début d’une ambitieuse saison hivernale. Régis Lignon, directeur général délégué pour la Compagnie des Pyrénées et qui assure l’intérim depuis le récent départ de Christine Massoure, tranche rapidement dans le vif : « La saison dernière a été en demi-teinte à cause d’un enneigement capricieux. Mais, les vacances de février ont enregistré une fréquentation en hausse de 7 % par rapport à février 2022 qui était une saison exceptionnelle ». Les huit domaines N’PY ont cumulé pour l’exercice 2022-2023 un chiffre d’affaires de 60,03 millions d’euros, en recul de 6,2 %, pour 1 995 527 journées de ski. La saison 2021-2022 avait bien sûr fait exception par son enneigement et cela c’était ressenti dans les résultats avec un chiffre d’affaires de 64,3 millions d’euros pour 2 156 862 journées de ski.

Les vacances de février 2023 ont enregistré une fréquentation en hausse de 7 % par rapport à février 2022 qui était une saison exceptionnelle

Un été satisfaisant

L’attrait post-Covid pour la montagne en saison estivale se confirme et l’enneigement non optimal de la saison hivernale a été, en partie, compensé par une bonne fréquentation estivale. « L’été a été très positif, il était déjà en hausse de 8 % l’an dernier et a encore progressé de 5 % cette année. Les Pyrénées attirent. Il y a de plus en plus d’itinérances et de divertissements en station », a souligné Régis Lignon. La fréquentation du pic du Midi et du pont d’Espagne a gagné 6 %, les activités comme les Bike Parks, la Maison du Tourmalet et les tyroliennes ont été plébiscitées. Le Grand Tourmalet a par exemple enregistré une augmentation de fréquentation de 24 % pour son Bike Park.

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© Peyragudes

Du mouvement à la tête de la Compagnie des Pyrénées

Christine Massoure, qui était à la tête de la Compagnie des Pyrénées et avait participé au démarrage de N’PY, a quitté l’entreprise fin octobre pour rejoindre l’ARAC de la Région Occitanie en tant que consultante. Régis Lignon, qui occupait le poste de directeur général adjoint, assure l’intérim en tant que directeur général délégué. Un recrutement est en cours mais aucune date n’a été communiquée.

Régis Lignon, DG délégué pour la Compagnie des Pyrénées

Régis Lignon, DG délégué pour la Compagnie des Pyrénées © D.R.

Des réservations en hausse de 4 %

Pour cette année, les ventes commencent bien d’après Guillaume Roger, directeur opérationnel chez N’PY. « Malgré un démarrage tardif, nous sommes déjà à +4 % sur nos réservations et nous avons vendu autant de forfaits que l’an dernier à la même période », témoigne-t-il. Côté expérience client, c’est un parcours de vente sans couture que propose la marketplace N’PY. Elle permet de tout réserver du forfait, à l’hébergement, en passant par les activités et le transport du dernier kilomètre, de manière agrégée. 600 prestataires sont recensés sur la place de marché et N’PY rend aussi disponible le paiement en plusieurs fois. « Nous proposons des tarifs très avantageux notamment sur les hébergements car nos commissions sont moindres que sur les autres plateformes. Nous sommes en moyenne 10 % moins cher que Booking et Airbnb », souligne Guillaume Roger. Sur la saison 2022-2023, N’PY Résa et sa plateforme ont réalisé 23,8 millions d’euros de chiffre d’affaires en vente de forfaits de ski, soit 38 % du chiffre d’affaires total des stations et des sites touristiques.

Durant l’été 2023, le Grand Tourmalet a enregistré une augmentation de fréquentation de 24 % pour son Bike Park

Neutralité carbone en 2037

L’an dernier, les stations avaient dû faire face à la hausse des coûts de l’énergie, « même s’ils sont maintenant revenus au niveau d’il y a 2 ans », comme le remarque le directeur général délégué de la Compagnie des Pyrénées. Les stations du réseau N’PY ont dû faire des économies. « Nous avons mis en place un plan de sobriété qui nous a permis de réduire de 10 % la consommation énergétique de nos stations », souligne Régis Lignon. Mais, c’est tout le modèle qui est remis en question : « Pour un modèle économique viable, la durée d’exploitation moyenne doit être de 100 jours. Donc s’il y a moins de jours d’exploitation, il faut s’adapter. Il est même urgent d’investir pour adapter l’outil. Nous avons un impact social, avec 600 emplois permanents et 1 080 en saison pleine. 1 euro investi en station équivaut à 7 euros reversés sur la vallée. Nous avons des projections sur les 20 ans qui arrivent et nous souhaitons atteindre la neutralité carbone en 2037 », continue-t-il. Chaque station a réalisé son bilan carbone en 2022 et en parallèle la SAEM a candidaté au protocole d’expérimentation de la méthode Assessing Low Carbon Transition (ACT) de l’Ademe pour construire une stratégie de décarbonation. La Compagnie des Pyrénées fait partie des 10 entreprises retenues et bénéficiera du soutien technique des cabinets Ekodev et BL Évolution.

Nous avons des projections sur les 20 ans qui arrivent et nous souhaitons atteindre la neutralité carbone en 2037

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Autosuffisance énergétique

Les stations s’activent également pour réduire leur consommation énergétique : Peyragudes, Piau, Grand Tourmalet et Cauterets ont installé des appareils de sous-comptage qui permettent de connaître la dépense de chaque poste. Cauterets a réduit de 30 % la vitesse de ses télécabines ce qui lui a permis d’économiser 50 % sur ce poste. « En allant à 4 mètres par seconde au lieu de 6 mètres par seconde, nos clients montent en 15 minutes au lieu de 12 ce qui est indolore pour eux », témoigne Dorian Noyer, le directeur général tourisme de Cauterets. La station de Grand Tourmalet a annoncé remplacer 100 % de ses enneigeurs énergivores. Des études sont aussi menées au Grand Tourmalet et à Peyragudes pour la production d’hydrogène sans avoir recours au raccordement du réseau public en utilisant les eaux. Tout est question d’optimisation et de modernisation. À Peyragudes et Cauterets, le système Snowsat permet de produire la juste neige au bon endroit. Il calcule les apports nécessaires par guidage satellite et en ajustant la production de neige de culture. Cette saison, ce sont Piau, Grand Tourmalet, Gourette et Cambre d’Aze qui vont s’équiper. Entre autres, 70 % de la consommation énergétique liée à la production de neige de culture se fait grâce aux barrages hydroélectriques. L’eau des barrages est d’abord utilisée pour produire l’électricité avant d’être envoyée dans le réseau de neige de culture.

No Souci Pyrénées

N’PY offre aussi depuis 2005 la carte No Souci Pyrénées, un forfait intelligent qui permet au skieur de ne pas passer par la case billetterie en étant détecté automatiquement lorsqu’il emprunte une remontée mécanique. La saison dernière cette carte d’abonnement a généré 311 853 journées de ski par 95 069 abonnés et un chiffre d’affaires de 8,9 millions d’euros. Comme l’an dernier, la carte No Souci Pyrénées intègre maintenant les trois domaines ariégeois d’Ax 3 Domaines, Mont d’Olmes et Guzet Neige, ainsi que les stations TRIO (Porté Puymorens, Formiguères et Cambre d’Aze dans les Pyrénées-Orientales).