Couverture du journal du 07/05/2024 Le nouveau magazine

RecovR, le jeu anti-discrimination

Développé par la start-up The Seed Crew, installée à Labège, le jeu vidéo RecovR sensibilise aux discriminations en entreprise. Un support ludique pour aborder des thèmes sensibles.

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Julie Landès et Chabane Hadji cherchent désormais à lever 350 000€ pour le développement commercial de RecovR © The Seed Crew

Le développement du jeu par les équipes de la start-up The Seed Crew à Labège a pris trois ans mais ça y est : RecovR est prêt. Déjà plus de 2 000 utilisateurs ont pu s’immerger dans cette histoire. « C’est la force du jeu vidéo, explique Chabane Hadji, l’un des fondateurs de RecovR. On embarque dans un scénario dont vous êtes l’acteur. » Les créateurs ont choisi l’immersion par le jeu pour son côté dynamique. « Ce n’est pas infantilisant, on ne vous fait pas la morale dans ce jeu. Vous déroulez l’histoire, c’est presque un jeu de rôle. »

Cinq modules d’une heure

Au total, cinq modules permettent d’aborder cinq discriminations principales : le sexisme, le validisme, l’âgisme, le racisme et les LGBT-phobies. « Chaque module est séparé en quatre épisodes qui durent environ 15 à 20 minutes chacun. » L’objectif est d’identifier les comportements et propos discriminants en appuyant sur un drapeau. « C’est un red flag », explique Chabane Hadji. « Vous cliquez dessus si vous estimez que ce qui vient d’être dit est problématique. Certaines situations sont flagrantes, d’autres sont un peu plus difficiles à repérer. Tout est dans la nuance. »

Des dialogues vont ensuite se lancer entre votre personnage et vos collègues virtuels. Les choix que vous allez faire vont déterminer la suite de l’histoire. « L’interactivité est importante car elle permet de se poser des questions, de changer notre vision sur certains comportements, certains mots. » Et à terme, peut-être modifier certains comportements grâce aux émotions suscitées par le jeu.

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Extraits du jeu avec le red flag en bas à droite © The Seed Crew

Ateliers en complément

En tout cas, la prise de conscience semble rapide. « On remarque une vigilance accrue des salariés dans les jours qui suivent le jeu », note Julie Landès, qui complète l’expérience jeu par des ateliers en entreprise. En effet, il est possible de jouer directement sur le lieu de travail, de façon individuelle ou collective. « Quand on joue à plusieurs, on va être encore plus vigilant sur la manière de se comporter. On va voter sur les choix à effectuer. Cela permet aussi d’entamer des discussions. »

Des réticences existent toujours relativise Julie Landès. « Des personnes vont estimer qu’elles n’ont pas besoin de sensibilisation à certains sujets. D’autres vont penser que le sexisme ou le racisme, ce n’est pas un problème dans leur entreprise. L’émulation collective va permettre à certains d’ouvrir les yeux sur des discriminations qu’ils ne voyaient pas. »

Si chaque intervention est modulable en fonction de la structure, il faut compter entre 10 et 50€ par salarié pour pouvoir jouer à RecovR. Les résultats des salariés sont ensuite communiqués à l’entreprise. « Mais pas de façon individuelle, précise Chabane Hadji. L’idée, c’est de faire progresser le collectif, de pointer les thèmes qui ont bien fonctionné et ceux qui ont besoin d’être travaillé plus en profondeur. »

L’interactivité permet de se poser des questions, de changer notre vision sur certains comportements

Levée de fonds en cours

The Seed Crew intervient dans plusieurs structures un peu partout en France. « En Haute-Garonne, on travaille notamment avec le Sicoval (communauté d’agglomération du Sud-Est toulousain, ndlr) mais aussi avec des clubs RH pour former les décideurs », détaille Chabane Hadji. Aujourd’hui, la start-up a entamé une levée de fonds de 350 000€ pour le développement commercial de sa solution. Une traduction en anglais est en préparation pour élargir le marché et rentabiliser le développement du jeu qui a coûté entre 400 et 500 000€.

Fort de ce projet, la jeune pousse compte aller plus loin comme le confirme Chabane Hadji. « On voudrait maintenant parler d’autres problèmes comme le harcèlement scolaire par exemple. Comme je suis un ancien conseiller principal d’éducation, c’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur. Peut-être que cela passera par la création d’un autre jeu vidéo car on ne s’adresse à des enfants comme à des adultes en entreprise. »