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UnaBiz vise l’équilibre

Haute-Garonne - Un an après la reprise du Toulousain Sigfox, spécialisé dans l’internet des objets, UnaBiz annonce vouloir retrouver l’équilibre à la fin d’année 2024 porté par un secteur en pleine croissance.

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Le compteur connecté mis en place par UnaBiz et le distributeur de gaz japonais Nicigas (UnaBiz) © Maxime Fayolle

L’annonce avait fait grand bruit en janvier 2022. Sigfox, la pépite toulousaine qui avait réussi à lever 300 millions d’euros pour développer des solutions dans l’Internet des objets, était placée en redressement judiciaire. Neuf candidats s’étaient portés volontaires pour la reprise de l’activité devant le tribunal de commerce de Toulouse. C’est finalement UnaBiz, qui exploitait le réseau mis en place par Sigfox à Singapour, qui a raflé la mise en avril 2022 pour un peu plus de 3 millions d’euros. Au total, 126 emplois sur les 168 ont pu être conservés.

UN ANCIEN DE SIGFOX AUX MANETTES

Le repreneur n’est pas un inconnu dans les locaux de Labège, où Sigfox a implanté son siège. Il s’agit d’Henri Bong, qui avait ouvert les bureaux de Sigfox à Singapour avant de quitter l’entreprise en 2016 pour fonder UnaBiz. « Quand j’ai appris les difficultés financières via la presse, j’ai de suite dit qu’on ne laisserait pas tomber Sigfox. C’était impensable. On a monté une offre, on a convaincu les salariés, les opérateurs dans tous les pays, les clients. Il ne manquait que l’accord de Bercy. »

Le ministère des Finances est en effet plus que réticent à l’idée de confier les rênes de l’ex-pépite à un groupe singapourien, d’autant plus que des capitaux publics ont été investis dans la levée de fonds. « J’ai écrit une lettre ouverte à Emmanuel Macron pour lui demander de nous suivre », rembobine Henri Bong. Des négociations débutent alors au printemps 2022 : « On nous a demandé de déplacer notre siège social en France. On est en train de travailler sur un déménagement à Toulouse. Il nous faut encore un délai supplémentaire. » Il a fallu surtout convaincre de la trajectoire économique empruntée. « On a réduit les dépenses d’exploitation de 60 %. Elles ne pèsent plus que 20 millions d’euros aujourd’hui, contre 54 millions auparavant. Et vu que nous n’avons perdu aucun client, on a pu augmenter notre chiffre d’affaires. » Le chiffre précis reste cependant chasse gardée. « Vous comprenez que l’année 2022 a été très particulière », souligne Patrick Cason, le directeur général Europe du Sud d’UnaBiz. « On se félicite de cette progression et on espère continuer pour 2023. »

Mais les pertes sont encore conséquentes. Près de 20 millions en 2022 et une prévision à 15 millions cette année. « Nous visons malgré tout le retour à l’équilibre pour la fin d’année prochaine », promet Henri Bong, qui s’interdit toutefois de donner des chiffres irréalistes.

On travaille à un déménagement de notre siège social à Toulouse

PAS L’ELDORADO ATTENDU

L’internet des objets (IoT, pour Internet of Things) n’est en effet pas l’eldorado attendu. En 2019, les dirigeants de Sigfox misaient sur 1 milliard d’objets connectés en 2023. UnaBiz en compte un peu plus de 11 millions dans son giron. C’est peu par rapport à l’objectif initial, mais c’est toutefois 16 % de mieux sur un an (+ 1 million d’appareils).

Plusieurs réussites sont également à signaler. En janvier dernier, UnaBiz s’est associé au distributeur d’eau Sogedo pour déployer plus de 20 000 compteurs connectés. L’objectif : repérer les fuites et pouvoir ainsi intervenir plus rapidement pour économiser une ressource qui se fait plus rare. Et ça marche ! Depuis 2016 et la première mise en place par Sogedo de compteurs connectés, plus de 90 000 m3 d’eau ont été économisés.

UnaBiz compte un peu plus de 11 millions d’objets connectés dans son giron

UNE PROBLÉMATIQUE ENVIRONNEMENTALE

Pour l’avenir, UnaBiz s’est fixé un cap : utiliser le moins d’énergie possible pour les échanges entre les objets connectés. Aujourd’hui, ces 11 millions d’objets s’échangent près de 100 millions de messages par jour. Les serveurs, basés un temps à Toulouse, ont été déplacés « ailleurs en Europe » sans plus de précision de la part des dirigeants.

Mais si l’entreprise veut atteindre des millions d’objets connectés supplémentaires, la question environnementale va inévitablement se poser. « Aujourd’hui, votre téléphone est en 5G. Nos objets communiquent en 0G. Donc, il y a déjà un gain d’énergie. Mais nous voulons aller encore plus loin en divisant la consommation d’énergie de notre protocole par trois », annonce Henri Bong.

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Henri Bong, le PDG d’UnaBiz 2 et Patrick Cason, le DG Europe du Sud d’UnaBiz © Maxime Fayolle

NOUVELLE LEVÉE DE FONDS À VENIR

En novembre dernier, une levée de fonds a permis d’investir 50 millions de dollars dans la R&D. Une nouvelle levée est prévue dans les 12 mois. « Avec pour objectif de faire mieux que la dernière fois », souligne Henri Bong. Si cette année, UnaBiz n’a pas pu développer de nouveaux brevets ni même embaucher de nouvelles têtes, l’avenir pourrait ouvrir des portes.

« Nous avons repris les 223 brevets innovants de Sigfox, et nous avons l’ambition d’en déposer de nouveaux. Quant au recrutement, il n’est pas d’actualité, mais on verra après la nouvelle levée de fonds. » UnaBiz compte aujourd’hui 224 salariés, dont 124 en France (113 sur le site de Labège, 11 à Paris).