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Nouvelle-Aquitaine : reprise confirmée

La forte reprise d’activité anticipée par les entreprises néo-aquitaines en 2021, après l’arrêt brutal subi en 2020, pourrait être freinée par les difficultés de recrutement, d’approvisionnement et par l’augmentation du prix des matières premières. Trois ombres qui planent sur tous les secteurs de l’économie, préviennent a Banque de France et la CCI Nouvelle-Aquitaine.

© D.R.

Où en est l ’économie du pays et où en sont les entreprises de Nouvelle-Aquitaine près d’un an et demi après l ’éclatement de la crise sanitaire ? C’est pour répondre à ces questions que la Banque de France (1) et la CCI de Nouvelle-Aquitaine (2) ont réuni un parterre de chefs d’entreprises, le 28 septembre, à la Station Ausone de la Librairie Mollat, et présenté les résultats de leurs enquêtes respectives de conjoncture à la mi-année. Pour débuter, Denis Lauretou, le directeur régional de la Banque de France en Nouvelle-Aquitaine, a rappelé le contexte macro-économique et les prévisions de croissance du PIB en zone euro, estimées à 5 % par la Banque centrale européenne. Un chiffre revu à la hausse, notamment en  France, et qui traduit « une poussée très forte de l’activité des entreprises, à laquelle on ne s’attendait pas forcément », cela malgré « une hausse de l’inflation – considérée comme temporaire – en 2021 », explique-t-il.

POINTS DE VIGILANCE

Le retour de l’activité à son niveau de 2019 est donc attendu au second semestre 2022 pour les entreprises françaises. Néanmoins, cette dynamique de croissance reste freinée dans l’Hexagone par un problème structurel de recrutement, et par deux problèmes conjoncturels liés à la crise sanitaire : la difficulté et les délais d’approvisionnement, ainsi que l’augmentation du coût des matières premières. Il faudra donc rester vigilant sur ces points, mais aussi « à la poursuite de la maîtrise de la crise sanitaire ; au contexte international, et notamment à l’augmentation du prix de l’énergie ; au comportement des agents économiques, dont les ménages, qui ont accumulé une épargne estimée à 157 milliards d’euros ; et enfin à la soutenabilité de la dette publique », a prévenu Denis Lauretou. Sur le territoire néo-aquitain, « le quoi qu’il en coûte » de l’État a joué à plein et permis « l’amélioration de tous les indicateurs, même si on ne retrouve pas encore le niveau d’avant-crise, en particulier dans l’hôtellerie-restauration », a précisé Jean-François Clédel, le président de la CCI Nouvelle-Aquitaine. Malgré tout, 79 % des dirigeants d’entreprise interrogés restent confiants dans l’avenir de leur entreprise, selon le baromètre de la CCI et « la reprise économique est là », insiste-t-il.

La dynamique de croissance reste freinée par un problème structurel de recrutement.

SURSAUT DANS L’INDUSTRIE

Dans le détail, « un sursaut de l’activité dans le secteur de l’industrie est attendu en 2021 », avec une hausse des chiffres d’affaires estimée à 5,6 % sur l’année, a indiqué Jacky Philips, chef du département des entreprises et des activités économiques régionales à la Banque de France Bordeaux. Et si un tiers des entreprises sont confrontées à des difficultés de recrutement et d’approvisionnement « au point que cela impacte leur activité », la situation reste très disparate d’une filière à l’autre, « l’aéronautique commercial étant à la peine », tandis que « l’alimentaire se maintient bien », précise-t-il. Même constat du côté de la CCI, dont les entreprises retrouvent les chiffres d’affaires d’avant-crise et des carnets de commandes bien orientés. Néanmoins, « le secteur souffre au niveau de la trésorerie et des marges, en raison de l’augmentation du prix des intrants, de l’énergie et des transports », a poursuivi Martine Domecq, responsable de l’information économique de la CCI Nouvelle-Aquitaine.

79 % des chefs d’entreprises restent confiants dans l’avenir.

4 GRANDS TÉMOINS DE LA REPRISE

Pour illustrer les chiffres de leurs enquêtes, la Banque de France et la CCI Nouvelle-Aquitaine ont invité quatre grands patrons néo-aquitains à témoigner sur la santé de leurs entreprises. Des « patrons heureux », selon les mots de Christian Maviel, président de Cacolac, « qui a bénéficié de l’intérêt des Français pour les marques nationales » et termine l’année 2021 en forte accélération avec l’ouverture d’une nouvelle usine. Même son de cloche chez Geosat, expert de la mesure de précision, qui a « retrouvé une dynamique très forte en 2021 », affirme son président Mathias Saura, qui insiste pour sa part sur la dimension RSE imposée par la crise aux entreprises, et sur la nécessaire vigilance à garder nos industries sur le territoire, en dépit de la dématérialisation des échanges. Dans la construction, en revanche, la reprise s’est avérée plus compliquée pour le géant girondin Fayat, malgré tout parvenu à retrouver un niveau d’activité en ligne avec celui de 2019 en 2021, mais avec une rentabilité moindre, « en raison du coût des matières premières » et d’une activité contrainte par les difficultés à recruter. « C’est d’ailleurs un des enjeux pour l’avenir de nos métiers : être attractif pour attirer les jeunes sur les chantiers », analyse-t-il. Denis Mollat, enfin, hôte de l’assemblée, a évoqué la bonne santé du livre, reconnu « essentiel » durant la crise, et sa vision pour l’avenir de la librairie, qui sera agile, digitale et « innovante à tous les niveaux »

SITUATIONS DISPARATES DANS LES SERVICES

Dans les services marchands, et notamment l’hébergement, « le trou d’air a été très important en 2020 », rappelle Jacky Philips, avec une baisse d’activité de 4 % liée aux mesures sanitaires (fermetures, jauges, couvre-feu…) et un bond de l’activité est attendu en 2021, de l’ordre de 5 % au global. Avec une fois encore d’importantes disparités en fonction des secteurs.« Les services informatiques ont notamment énormément progressé. » « Mais les difficultés de recrutement sur certains types de profils vont brider la progression des effectifs et donc la progression d’activité », note Jacky Philips. Si les prévisions sont plutôt stables, notamment pour les cafés et restaurants, selon Martine Domecq, « 70 % des dirigeants d’entreprises de services déclarent rencontrer des difficultés principalement liées à la demande et aux difficultés de recrutement », ajoute-t-elle. Le secteur du commerce, qui inclut les cafés-hôtels-restaurants, a également « beaucoup souffert en 2020 et 2021 », en raison des restrictions sanitaires. . « Très soutenus par les pouvoirs publics », ils ont néanmoins réussi à retrouver « des perspectives stables », et même favorables pour le commerce de détail, « grâce une forte capacité d’adaptation », estime la responsable de l’information économique de la CCI.

reprise

© Jennifer Wunsch

BAISSE DE RENTABILITÉ DANS LA CONSTRUCTION

Le secteur de la construction a été pour sa part « violemment impacté en 2020 » par la fermeture des chantiers, dont la reprise a été « progressive et compliquée », analyse Jacky Philips de la Banque de France. Et malgré l’effet de rattrapage important au deuxième semestre 2020, l’activité a été en repli de 7 % sur l’année. Une hausse de 11 % est donc attendue en 2021, portée « par une forte reprise de la construction de maisons individuelles, par la rénovation énergétique et par la commande publique ». Mais le prix des matières premières, les problèmes de recrutement, ainsi que les délais et difficultés d’approvisionnement pourraient entraîner « une hausse des marges bien moindre que la hausse du niveau d’activité », prévient Jacky Philips. Finalement, les prévisions sont stables pour la construction selon la CCI, le secteur étant celui « qui va le mieux en termes de résultat économique. Mais dans lequel 9 chefs d’entreprise sur 10 indiquent rencontrer des difficultés ».

PGE : 6 À 7 % DES ENTREPRISES À SURVEILLER

Durant la crise, « le système bancaire et les banques centrales ont joué leur rôle de financement des entreprises et de l’économie », assure le directeur régional de la Banque de France, Denis Lauretou. Avec 140 milliards d’euros distribués en France, dont 9,8 milliards en Nouvelle-Aquitaine, répartis entre 68 000 entreprises, « les banques ont accordé à 98 % des entreprises les PGE demandés », estime-t-il. Aidées en cela par la médiation du crédit, qui a permis à 7 500 entreprises d’obtenir leurs prêts et de sauvegarder plus de 62 000 emplois. Selon les calculs de la Banque de France, il existe au global une « zone de vulnérabilité » de 6 à 7 % d’entreprises en difficulté, qui pourraient donc peiner à rembourser leur PGE. Ces dernières devraient faire l’objet d’un suivi spécifique, le montant de leur emprunt représentant en tout 8 milliards d’euros.

(1) L’enquête de mi-année sur « Les Perspectives de l’économie en Nouvelle-Aquitaine » a été réalisée par la Banque de France au début du mois de juillet (avant la connaissance et la mise en place du pass sanitaire), sur un échantillon de 950 entreprises régionales des secteurs de l’industrie, des services et de la construction, représentant 150 000 emplois.

(2) Le Baromètre de la CCI Nouvelle-Aquitaine, réalisé entre le 28 juin et le 13 juillet 2021 en partenariat avec les 14 CCI de chaque territoire, présente le solde d’opinions de 3 800 chefs d’entreprise, représentant 40 000 salariés, soit « un échantillon représentatif du tissu économique du territoire » dans les secteurs de l’industrie, des BTP, des services et du commerce. 

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