Fièrement installé au-dessus d’une des vitrines de la boucherie Talenton du Chat d’Oc au Passage-d’Agen, le blason d’or 2022 a été décerné par le jury du Tour de France des Viandes Limousines qui, depuis 1988, met en valeur le métier et le savoir-faire des professionnels de la boucherie. Après avoir parcouru plus de 4 000 km sur les routes de France, c’est finalement en Lot-et-Garonne que le blason d’or 2022 a été attribué pour la région Nouvelle-Aquitaine : « C’est d’abord le fruit d’une longue attente depuis que nous avons eu le label rouge pour le veau élevé sous la mère en 1995 ! »
TRIPLES LABELS
« C’est aussi une récompense pour toute la filière régionale, notamment pour notre partenaire, la société ALVP des viandes du Périgord à Thiviers, de l’élevage, à l’abattage et à la boucherie. J’ai aussi une pensée pour mon père, aujourd’hui disparu, qui m’a transmis la boucherie familiale, sa passion et son amour du travail des viandes de qualité symbolisé par tous nos labels », se félicite Christophe Talenton.
Nous avons ainsi constaté un vrai retour en force des clients vers l’artisanat au sens large depuis le Covid
Travaillant avec de petits élevages de veau en Dordogne élevés exclusivement au lait de la mère ou d’une tante, en complément de la mère quand celle-ci n’a plus de lait, la boucherie Talenton bénéficie en effet de deux autres labels : celui de la limousine, obtenu il y a plusieurs années, et celui de l’agneau du Périgord. Ayant misé sur des viandes de qualité issues des circuits courts dès le milieu des années 90, à la fin de l’épisode de la vache folle, la boucherie familiale a anticipé l’évolution des tendances de consommation actuelles. « Les labels certifient la qualité de la viande et les gens y sont de plus en plus sensibles, même si cela coûte un peu plus cher. Nous avons ainsi constaté un vrai retour en force des clients vers l’artisanat au sens large depuis le Covid. En ce qui nous concerne, le blason d’or a également eu un impact avec l’arrivée de nouveaux clients », ajoute Christophe Talenton.
LE RETOUR DES JEUNES APPRENTIS
Alors que le Lot-et-Garonne ne semble pas vraiment touché par le véganisme, « les Gascons sont des épicuriens dans l’âme qui aiment la bonne chair sans en manger à outrance », nous glisse Christophe Talenton, les chiffres en hausse de l’apprentissage indiquent une vraie mutation du métier d’artisan-boucher. Très sensible à la transmission des savoir-faire, initiée par son père, le président du syndicat départemental de la boucherie et membre élu à la Chambre des Métiers de Nouvelle-Aquitaine constate le retour des jeunes apprentis dans toute la filière : « Avant, je recevais en moyenne 1 ou 2 candidatures en apprentissage par an mais là j’en ai déjà 3 ! On remarque que les jeunes ne veulent plus s’embarquer dans des voies de garage et préfèrent revenir à des métiers manuels qui permettent d’acquérir un savoir-faire, d’avoir un métier et de cotiser pour la retraite… Mais il faut que les professionnels jouent le jeu et qu’il y ait plus de maîtres d’apprentissage. On se plaint de ne pas trouver de repreneurs, mais on ne forme pas assez alors que la demande est là. La transmission, c’est l’essence même du métier », ajoute le professionnel des viandes qui travaille sur place avec deux apprentis.
Venu dans l’entreprise familiale, créée par ses parents en 1965 au marché couvert d’Agen, après avoir fréquenté les sports-études de football de Miramont (47) et Mérignac (33), Christophe Talenton a développé la boucherie après son déménagement vers la rive gauche de la Garonne en 2000. Après avoir ouvert une deuxième boucherie à Nérac en 2005, aujourd’hui revendue à un de ses anciens apprentis ayant travaillé à ses côtés durant 16 ans, ce passionné de football, et fan des Girondins de Bordeaux, a agrandi les locaux du Passage-d’Agen. Avec un chiffre d’affaires stable et une équipe de 6 salariés, la boucherie familiale voit l’avenir en rose mais n’oublie pas son passé : « À l’époque du marché couvert à Agen, les commerçants se retrouvaient tous les matins à la boucherie pour casser-la croûte. Mon père faisait cuire des côtelettes et des steaks à 8 h du matin et on passait des moments inoubliables. J’ai perpétué cette tradition, sans les bouteilles de vin et de rosé qui se buvaient à l’époque, et l’on se retrouve, avec mon équipe, tous les matins pendant 30 minutes pour manger un bout de jambon ou de pâté et commenter l’actualité ou les résultats du SUA. Cela permet de renforcer la cohésion », ajoute Christophe Talenton. Flanqué de son blason d’or, l’artisan-boucher voit l’avenir de la profession avec optimisme sans oublier ses racines.