En 2022, les femmes ont-elles encore besoin d’être aidées spécifiquement dans leurs projets de création d’entreprise ? Pour Christine Panteix, directrice des Premières Nouvelle-Aquitaine, il n’y a aucun doute : un accompagnement est toujours nécessaire, et c’est ce que propose la structure. L’organisme, situé à Darwin sur la rive droite de Bordeaux, soutient les femmes et les équipes mixtes dans la création et le développement de leur entreprise innovante. « Ça va faire plus de 10 ans qu’on existe, et on voit qu’il y a encore de gros enjeux sur la représentation des femmes dans l’entrepreneuriat », constate la directrice. Aujourd’hui, on est à 40 % de femmes parmi les créateurs de micro-entreprises : une amélioration, mais qui reste insuffisante pour les Premières Nouvelle-Aquitaine. « Des femmes dans la tech, avec des projets innovants, qui ont un vrai potentiel de création d’emplois, il y en a encore trop peu. Il y a encore un fort besoin d’accompagnement spécifique, parce que les femmes doivent gagner en confiance, voir plus grand, avoir plus d’ambition… », argumente-t-elle. Pour elle, il faudra travailler pendant « encore dix bonnes années » pour soutenir l’entrepreneuriat féminin.
ACCOMPAGNER LA CRÉATION D’ENTREPRISE
C’est dans ce but que l’association Les Premières Nouvelle-Aquitaine a été créée : accompagner à la création d’entreprise. Afin de pouvoir aider ces femmes de la façon la plus adaptée possible, plusieurs programmes sont mis en place. « Le start » : deux jours de formations, où l’association va aider les participantes à identifier leurs profils entrepreneuriaux, ce qui les fait vibrer dans le fait de créer leurs entreprises. « On va leur montrer ce qu’est un modèle économique et les amener à travailler sur celui de leur idée. Ce projet peut-il avoir une faisabilité économique ou non ? Et puis surtout, leur apporter une connaissance du système entrepreneurial », explique Christine Panteix. Après, place au « go/no go » : soit les femmes se sentent à l’aise dans l’entrepreneuriat et souhaitent aller au bout de leur idée, ou au contraire, elles réalisent que ce n’est pas fait pour elles. Pour l’opération « Les Inventives » avec une idée très innovante, l’organisme mène un partenariat avec Transtech. Même principe que « le start », avec un apport juridique, industriel et du prototypage par leur partenaire.
Et pour les femmes n’ayant aucun doute sur leur envie d’entreprendre : « Le go » est mis en place. Il s’agit d’un programme allant de 6 à 9 mois, travaillant sur la structuration du projet, le modèle économique, la stratégie commerciale, la communication.
DES PARCOURS À PÉRIGUEUX ET LIMOGES
Avec les Premières Nouvelle-Aquitaine, ce sont 20 à 25 projets qui sont soutenus chaque année. « On est sur des petits volumes d’accompagnement, parce qu’on a envie de les chouchouter un petit peu, et puis ça demande quand même de l’attention et de la présence, d’assister des femmes qui, on espère, auront dans quelques années, plein de salariés », développe la directrice de l’association. La structure propose des parcours dans d’autres villes que Bordeaux : Périgueux, Angoulême et Limoges, grâce à des partenariats avec les collectivités. « L’idée, ce serait à terme, d’être dans des départements de Nouvelle-Aquitaine où il n’y a pas d’offres spécifiques pour les femmes. Là, on envisage d’aller plutôt vers la Charente-Maritime, et le Lot-et-Garonne. On aimerait bien s’y implanter en 2022, 2023 », annonce Christine Panteix qui insiste sur la nécessité de réaliser un bon maillage territorial.
DES ÉQUIPES MIXTES PLUS PERFORMANTES
Mais qu’en est-il de l’avenir entrepreneurial féminin ? « Je pense que les femmes vont prendre de plus en plus leur place. Il n’y aura peut-être jamais une mixité parfaite, et limite ce n’est pas grave. Mais, moi, ce que j’aimerais, c’est que toute femme qui a envie d’entreprendre ne se mette pas de barrière et aille au moins au bout du projet, quelle que soit la forme que prendra l’entreprise », martèle la directrice. Elle ajoute, que lorsqu’elle accompagne des équipes mixtes, « c’est quand même l’idéal, c’est là que les boîtes sont les plus performantes ». Elle reste tout de même optimiste pour l’avenir : « Je suis persuadée qu’à relativement court terme, les statistiques de mixité seront bonnes ». Christine Panteix envisage, à terme, un nouveau cheval de bataille : la diversité. « On voit encore trop peu de femmes entrepreneures issues des quartiers, d’origine culturelle différente », développe-t-elle.
PREMIÈRES NOUVELLE AQUITAINE : LES PROJETS 2022
- Construction de programmes citoyens à destination des centres d’accueils et centres de loisirs
- Plateforme de sensibilisation à la transition écologique à destination du secteur de l’audiovisuel et de la cinématographie
- Service de coordination et de soutien aux personnes âgées et de leurs aidants
- Plateforme de recherches et réservations d’activités extrascolaires
- Coaching en alimentation et santé accompagné de formations cuisines
- Association pour faciliter la mise en relation entre migrants et habitants
- Outil de personnalisation de patrons de couture
UN PROGRAMME INÉDIT : « ACCÉLÉRATEUR ÉMERGENCE ENTREPRENEURIAT POUR TOUS »
Dans cet objectif-là, un nouveau programme gratuit et inédit vient d’être lancé : « Accélérateur émergence entrepreneuriat pour tous ». Mis en place avec la fédération nationale Les Premières, ce dernier se compose d’une promotion de 5 femmes issues de 5 quartiers politiques de la ville : Saint-Michel, Lormont, Cenon, etc. La formation a lieu avec trois autres incubateurs du réseau : Les Premières Guyane, Île-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes. « Elles ont certains ateliers en visio où elles sont 20 avec tous les autres entrepreneurs. Le vendredi matin, elles reprennent les sujets en allant un peu plus loin avec le petit groupe de cinq », explique la directrice. Le but est d’aboutir à différentes promotions jusqu’à l’année prochaine. L’association annonce également un autre objectif : obtenir la certification Qualiopi (la nouvelle marque de certification qualité des prestataires d’action de formation). « Les filles pourront utiliser leur compte de formation pour financer la formation. C’est un de nos enjeux à court terme, mobiliser ces financements-là », développe-t-elle.
Si on est là, c’est vraiment pour qu’il y ait plus de mixité
À l’occasion de la journée des droits de la femme, Christine Panteix participera, le 8 mars de 18 h à 20 h, à une table de ronde à l’université de Bordeaux sur « les nouvelles générations d’entrepreneurs ». « On a beaucoup plus de filles avec des projets dans la tech. Beaucoup d’entrepreneurs engagés, pour l’écologie, l’innovation sociale, etc. Une vraie recherche de sens », développe la directrice à ce sujet-là. Les Premières Nouvelle-Aquitaine remarquent que leurs dernières candidates sortent souvent d’entreprises « où elles ne se retrouvaient plus », avec une volonté d’avoir des équipes plus inclusives. « Si on est là, c’est vraiment pour qu’il y ait plus de mixité. Ce n’est pas pour mettre en compétition l’entrepreneuriat féminin et masculin », conclut Christine Panteix, femme engagée et débordant d’enthousiasme pour la cause des femmes porteuses de projets.
« PIONNIÈRES » PUIS « PREMIÈRES »
À l’origine des Premières, il y a eu les « Pionnières ». C’était à Paris en 2004. Entrepreneuse engagée pour le développement de l’entrepreneuriat sous toutes ses formes, Frédérique Clavel avait l’idée de créer un incubateur spécialement dédié aux femmes : ce fut « Paris Pionnières » et très vite Les Premières, véritable réseau d’incubateurs accompagnant les femmes entrepreneurs dans les services innovants, en lien avec l’ensemble des acteurs de l’écosytème.
Portée aussi par Marie-Christine Bordeaux, l’association a investi les anciennes friches de Darwin (Bordeaux rive droite) en 2012 pour y installer la déclinaison régionale de l’association Paris Pionnières devenue donc les « Premières Nouvelle-Aquitaine ». Le Réseau Les Premières est constitué d’incubateurs régionaux en France métropolitaine, ultra-marine et au Luxembourg. Les Premières Nouvelle-Aquitaine sont également cogestionnaires de la pépinière de la ville de Bordeaux, Le Campement.