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Domaine de Bouzigues : le rêve au galop

Après 10 ans d’armée, la cavalière Ludivine Castaing a créé le Domaine de Bouzigues à Tarasteix où elle fait naître et élève des chevaux destinés à la compétition et aux loisirs. Une reconversion de passion.

Ludivine Castaing et Diego de Bouzigues, star des compétitions et carte de visite du domaine de Tarasteix. Domaine de Bouzigues

Ludivine Castaing et Diego de Bouzigues, star des compétitions et carte de visite du domaine de Tarasteix. © LilianCazabet-VieEconomique

Trouver chaussure à son pied peut être le défi de toute une vie et pendant dix ans, Ludivine Castaing a d’abord porté des rangers. À voir la taille de son sourire, ce sont les bottes qui lui vont le mieux et, en guise de sept lieues, c’est à travers six hectares qu’elles la mènent d’un enclos à l’autre. Dans chacun d’eux, un petit monde savoure une vie bien à lui : entre Diego, la star des compétitions qui se prélasse et les poulains qui jouent sans jamais perdre du regard la mère porteuse, le Domaine de Bouzigues est un paradis où le cheval est roi. L’ancienne militaire en a façonné la moindre facette, portée par la détermination et la passion qui, depuis le premier baptême en poney club, ne l’a jamais quittée.

5 ans pour un cheval de sport

Dans le paisible village de Tarasteix où la chaîne des Pyrénées se profile en toile de fond, Ludivine Castaing s’épanouit dans sa nouvelle vie. Si quitter les rangs pour devenir éleveuse n’a pas été un parcours du combattant, ça n’en fut pas moins une aventure parsemée d’obstacles. Il faut dire que le projet était d’envergure : bâtir un domaine où, de la conception du poulain à la valorisation du cheval de sport, tout se déroule sur place. Les journées commencent tôt mais chaque étape demande du temps, celui pour les Stud-book (de la race Selle Français) de grandir : « C’est une activité assez longue à mettre en place, les premiers chevaux commencent à avoir 5 ans, c’est l’âge où ils deviennent des chevaux de compétition et progressivement, je veux augmenter leur nombre ».

domaine Bouzigues

Ludivine Castaing avec Diego de Bouzigues lors du Concours Complet International
3 étoiles en Normandie en août 2023 © Lilian Cazabet – La Vie Economique

Les compétitions internationales comme vitrine

Avec désormais treize poulinières, 2024 sera l’année charnière pour le domaine où sept naissances sont attendues entre mars et juin. Des bébés qui vont venir gonfler le joyeux cheptel de vingt-cinq chevaux de tout âge qui portent tous l’affixe de Bouzigues. Il est définitivement entré dans la course, un milieu où se faire un nom est loin d’être aisé : « Des élevages, il y en a partout en France, pour en vivre un cheval ne suffit pas. On ne vit pas non plus de la compétition, au contraire elle coûte cher mais c’est la vitrine. On est obligé d’en passer par là ». Et pour briller dans cette vitrine, c’est l’élégant Diego qui relève la mission. Partenaire exclusif de Ludivine, à 11 ans il est internationalement connu et tous deux forment un duo qui enchaîne les compétitions. Attendu à Madrid en février prochain, il est la plus belle carte de visite du domaine et le meilleur exemple des savoir-faire de sa cavalière qui vient de terminer une partie de sa reconversion en octobre dernier.

Une solide reconversion

Sergent-chef à Draguignan, Ludivine Castaing évoluait en centre équestre militaire dans l’école d’infanterie et d’artillerie : « J’étais sportive et je me suis engagée au sein des sports équestres militaires pour faire une carrière de compétiteur… finalement je suis devenue militaire ». Après dix années passées dans l’institution, l’envie d’entreprendre et de se lancer à son compte la taraude. En 2020, elle ne renouvelle pas son contrat et revient dans les Hautes-Pyrénées où elle rachète la maison familiale de Tarasteix : « Je n’étais pas issue du monde agricole, je n’avais pas de diplômes, j’ai dû les passer en VAE, notamment pour accéder aux dispositifs d’aides ».

De nouveaux bâtiments couverts et modernes

Si l’investissement physique est indéniable, le côté financier a été un vrai défi avec une première difficulté : convaincre les banques. « Elles sont devenues très frileuses envers le monde équestre où les faillites sont nombreuses, il y a beaucoup de casse sur les entreprises hippiques, notamment les centres équestres. Même si je fais de l’élevage, ce qui n’a rien à voir, dans leurs esprits c’était pareil. » Des difficultés désormais passées et un manège va enfin trôner au cœur des enclos. En mars, 3 000 m2 couverts vont voir le jour, entièrement équipés de panneaux photovoltaïques et validés par un label haute valeur environnementale pour limiter l’impact. Un investissement majeur de 500 000 euros qui a bénéficié d’une dotation de la Région 32 400 euros pour la DJA et une aide bâtiment à 39 000 euros : « C’est conséquent et ça aide énormément ».

Avec désormais treize poulinières, 2024 sera l’année charnière pour le domaine où sept naissances sont attendues entre mars et juin.

domaine Bouzigues

Ludivine Castaing, leveuse quine Tarasteix. Elle pose avec son cheval Diego © Lilian Cazabet – La Vie Economique

Un espace dédié à la reproduction

Un espace sera dédié à la reproduction car les poulains sont issus d’une lignée de juments sportives qui ne peuvent stopper leur carrière pendant la gestation : « On prélève des embryons qu’on implante dans les poulinières qui sont de véritables mères porteuses », explique l’éleveuse. Si jusqu’ici le vétérinaire se chargeait de l’acte, à partir du 15 mars, c’est Ludivine qui prendra le relais puisqu’elle aura terminé la formation d’inséminateur équin qu’elle suit actuellement. Un diplôme qui lui permettra d’ouvrir cette activité aux particuliers qui souhaitent faire reproduire leurs juments : « On vise les professionnels et les amateurs, on est plus orientés vers la compétition mais je vends régulièrement des chevaux de loisirs ».

Chevaux de loisirs

Loisirs qui concernent également les chevaux de course en fin de carrière puisque c’est dans ce splendide domaine qu’ils suivent eux aussi une reconversion pour être réorientés. Un dressage assuré par Ludivine Castaing qui a autant de bottes que de casquettes. Elle qui imaginait une « écurie novatrice fondée sur le bien-être animal » s’est définitivement donné les moyens d’aller au bout de son rêve : « C’est un métier passion, ça n’a pas été simple mais si j’avais décidé de rester sur un rythme de fonctionnaire, je serais restée moniteur militaire ».