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Ecowgaz, la volonté faite femme

En visite dans le département, Isabelle Lonvis-Rome, ministre de l’Égalité entre les Femmes et les Hommes, de la Diversité et de l’Égalité des Chances a visité Ecowgaz à Ibos. Seule station GNV du territoire, elle a vu le jour grâce à Sophie Villard, une cheffe d’entreprise qui s’est battue pour son projet.

Sophie Villard, Fondatrice et directrice d'Ecowgaz © Lilian Cazabet

Sophie Villard, Fondatrice et directrice d'Ecowgaz © Lilian Cazabet

Peu d ’entrepreneurs évoquent la création de leur société comme un doux moment où les étapes se succédaient dans un enchaînement limpide. En tous cas Sophie Villard ne fait pas partie de ceux-là. Depuis 2017, elle gère Ecowgaz, la seule station GNV des Hautes- Pyrénées, et si plus de 500 tonnes sont maintenant distribuées tous les ans, le succès ne révèle rien des embuches qui l’ont précédé. Choisie parmi les femmes d’action du département pour rencontrer Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée en charge de l’Égalité entre les Femmes et les Hommes, de la Diversité et de l’Égalité des Chances, en visite dans le 65, la cheffe d’entreprise n’a rien omis de ses épreuves : « La station a été très difficile à sortir, la banque avait signé tous les devis et quand elle a vu que les collectivités ne suivaient pas le projet, elle s’en est retirée ». Un coup dur qui aurait pu signer l’écueil de ce point de ravitaillement qui alimente en biogaz aussi bien les professionnels que les particuliers à Ibos.

DE LA VACHE AU CAMION

Certains auraient baissé les bras, encore une fois Sophie Villard n’est pas de ceux-là et pour financer en urgence le bâtiment, elle s’est tournée vers son réseau : « En 8 jours les copains nous ont prêté la somme. On a réussi à négocier une location-bail et avec des remboursements sur sept ans, pour des installations financées sur quinze et un projet qui démarrait, sans véhicules… ». Développer la filière dans le département, Sophie Villard y croyait, un peu contre vents et marées. Aujourd’hui, les grands groupes se sont tous tournés vers cette énergie verte, Total a par ailleurs acquis le leader français Fonroche, mais pour les petites structures le défi reste de convaincre et les unités de méthanisation se heurtent elles aussi à de nombreux préjugés. C’est celle de Fontrailles qui alimente Ecowgaz en BioGNV, produit par la méthanisation des déchets agricoles. De la vache au camion, c’est toute une filière courte et circulaire qui s’inscrit dans l’économie sociale et solidaire.

Une utilisatrice d'Ecowgaz vient faire le plein de sa voiture

Une utilisatrice d’Ecowgaz vient faire le plein de sa voiture © Lilian Cazabet

PICS, LE BUREAU D’ÉTUDES

Un dynamisme territorial qui a pesé lors des étapes de développement : « La station a permis de créer tout un écosystème, il n’y en a pas d’autres avant 150 km et c’est bien plus compliqué qu’une pompe à essence. On s’est rendu compte que nos fournisseurs étaient incapables de répondre à ces contraintes, étant basés n’importe où en France, il fallait qu’on se crée un système local ». D’autres entreprises, dont les transporteurs locaux Barcos et leur flotte, sont alors entrées en jeu et c’est ensemble qu’ils ont bâti le projet via une coopérative qui fédère les intervenants. Un modèle économique qu’Ecowgaz compte bien étoffer en multipliant les stations pour former un véritable réseau : son bureau d’études œuvre d’ailleurs en ce sens. Pyrénéenne d’Ingénierie Conseil & Stratégie, le bien-nommé PICS, accompagne de l’idée à la construction les différents projets de méthanisation agricole et de stations de distribution de biogaz.

UNE ALTERNATIVE ÉCONOMIQUE

Depuis, les véhicules thermiques avec injection gaz font vivre la station, bénéficiant en plus une autonomie intéressante puisqu’ils gardent un réservoir essence : « En gaz on fait 500 à 550 km, plus l’essence ça fait 800 à 900 km, on est similaires au plein. Pour nos territoires ruraux où les gens circulent beaucoup, c’est très pertinent », souligne Sophie Villard. Niveau pollution, avec un rejet quasi nul des particules nocives, les bénéfices sont indéniables et côté tarif, même en ayant grimpé à 1,59 €, le gaz demeure une excellente alternative pour les utilisateurs. Si les camions commencent à être nombreux à choisir cette option, en été ce sont les touristes et les cars italiens qui se ruent à Ibos : « Les Italiens sont en avance sur les véhicules au gaz, avec les pèlerinages on le voit », confie Michel Dubosc, vice-président de la Chambre d’agriculture des Hautes-Pyrénées mais également actionnaire à Ecowgaz.

DES MESURES POUR L’ENTREPRENEURIAT AU FÉMININ

Un univers et un parcours présentés à Isabelle Lonvis-Rome qui a également pu échanger avec trois autres cheffes d’entreprise lors d’une table ronde. Le plan du gouvernement pour l’égalité entre les femmes et les hommes comprend également l’égalité économique et professionnelle, une douzaine de mesures concernent l’entrepreneuriat au féminin. « C’est un sujet important et on a prévu par exemple un accompagnement personnalisé par la Banque de France pour la création ou la reprise de société ainsi que la mise en place d’une plateforme spécialisée avec un mentor-un entrepreneur ».

Une unité de méthanisation à l’étude

En parallèle, une étude sur le traitement des biodéchets sur le territoire a été menée pour le SDE 65 et elle met en avant un vrai potentiel pour faire une unité de méthanisation en collaboration avec les agriculteurs : construire une unité de méthanisation équivaudrait à une économie de 160 000 € pour la collectivité : « La production à atteindre serait de 95 GWh, soit 20 % de la consommation hors industrie, et permettrait de créer 25 emplois mais aussi de consolider 60 exploitations agricoles…pour cela, il faudra encore convaincre.