Mi-décembre, sur le vaste espace appartenant à Brittany Ferries, on posait l’enrobé sur lequel vont bientôt circuler des camions venus transborder leur chargement. « 80 % du chantier a été réalisé et les travaux devraient être terminés en mars », assurait l’un des chefs de chantier. Des bâtiments d’accueil ont été édifiés, et des quais récemment construits entourent la nouvelle voie ferrée qui accueillera bientôt les trains plateaux de la société française Brittany Ferries. Il ne reste qu’à raccorder cette voie au faisceau de réception du centre européen de fret (CEF) de Mouguerre implanté sur 100 hectares.
Transbordement horizontal
L’originalité du terminal aménagé par Brittany Ferries sera sa technologie de transbordement dite horizontale, capable de transborder des semi-remorques non préhensibles, que les terminaux traditionnels ne peuvent pas traiter. Pour proposer une alternative au transport de marchandises par la route entre le Sud et le Nord de l’Europe, la compagnie maritime Brittany Ferries a investi 40 millions d’euros dans cette autoroute ferroviaire de 970 km. Pas moins de 47 wagons capables d’embarquer des semi-remorques ont été commandés au groupe Lohr, basé à Hangenbieten (Bas-Rhin), pour un montant de 14 millions d’euros.
970 km en 16 heures
Chaque rame se composera de 21 wagons transportant un total de 42 semi-remorques et sera tractée par une locomotive d’abord thermique puis électrique, car certaines sections de la ligne ne sont aujourd’hui pas électrifiées. Au départ de Cherbourg à 19 heures, ces trains de 600 mètres de long arriveront le lendemain vers 11 heures au CEF de Mouguerre. À nouveau chargés, ils repartiront vers le pôle multimodal du port de Cherbourg-en-Cotentin. Récemment inaugurée, cette infrastructure a nécessité un budget de 13 millions d’euros, en grande partie financé par le syndicat mixte Ports de Normandie (8,7 millions d’euros).
Quatre opérateurs de fret à Mouguerre
L’autoroute ferroviaire de Brittany Ferries permettra de diminuer annuellement le transit de poids lourds sur les routes françaises d’environ 25 000 unités. La mise en service de la ligne est prévue pour le 31 mars 2025. « Sur l’espace public, nous prolongeons les faisceaux de réception en modernisant complètement cette partie pour permettre l’accueil en réception de trains de 750 mètres de long », explique Alain Iriart, maire de Saint-Pierre-d’Irube et président du CEF de Mouguerre. « Les travaux sont réalisés pour Novatrans, Ambrogio, Nortrans, les trois opérateurs de fret déjà installés, et pour le raccordement au faisceau de Brittany Ferries », précise-t-il.
Des semi-remorques sur des wagons Lohr © Lohr
Deuxième phase de travaux en 2025
Le budget de la Communauté d’agglomération du Pays basque pour ces travaux est estimé à 8,7 millions d’euros, tandis que Brittany Ferries a investi 7 millions d’euros pour son terminal de Mouguerre. Une deuxième phase de travaux prévoit le prolongement des trois voies de service des opérateurs privés et de la voie publique pour accueillir des trains de 750 mètres de long. Ces travaux permettront au pôle multimodal d’être pleinement opérationnel (tant pour le transbordement horizontal de Brittany Ferries que pour les chargements de containers), car l’aménagement en cours n’offrira qu’une manœuvrabilité limitée aux trains.
Extension sur 9 hectares
Une extension du site est donc prévue sur environ 9 hectares dès lors que « toutes les autorisations environnementales et administratives seront accordées », annonce Alain Iriart. Les dossiers devraient être déposés en janvier pour un lancement des travaux espéré à l’automne 2025. Cependant, cette parcelle de 9 hectares est située sur un espace de 12 hectares, zone naturelle des Barthes de l’Adour, défendue par des associations de protection de l’environnement. Celles-ci ont déjà contraint la Communauté d’agglomération du Pays basque à renoncer à y installer une entreprise sur un terrain de 3,3 hectares désormais sanctuarisé.
© Brittany Ferries
Décarbonation du transport
Selon le président du CEF de Mouguerre, une fois terminé, l’aménagement du site en deux phases permettra de passer de 75 000 camions actuellement transbordés chaque année à 150 000 camions. Les opérateurs Novatrans, Ambrogio, et Nortrans, qui opèrent actuellement 3 à 4 trains par jour, pourront développer leur activité et seront rejoints par Brittany Ferries pour un total de 8 à 10 trains quotidiens. D’après Jean-Marc Roué, président de Brittany Ferries, la ligne Mouguerre-Cherbourg permettra d’éviter l’émission d’environ une tonne de CO2 par rapport au même trajet effectué par la route pour une seule semi-remorque. S’inscrivant dans la volonté de l’État de décarboner les transports, le projet du CEF de Mouguerre est vertueux.
L’aménagement du site permettra de passer de 75 000 camions actuellement transbordés chaque année à 150 000 camions
