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Grande Fabrique de l’Image : le Périgord à l’affiche

C’est une bonne nouvelle rendue publique lors du festival de Cannes : le Périgord a décroché sa Palme d’Or à lui, la validation d’un projet qui n’a pas (encore) de prix. Le site de France Tabac, à Sarlat (voir LVE n° 2542), se transformera bientôt en espace de formation aux métiers techniques du cinéma.

périgord

Benoît Secrestat en visite sur le site avec Ciné Passion et la production de Rabia © Loïc Mazalrey

Rima Abdul Malak, ministre de la Culture, a dévoilé lors du 76e Festival du film de Cannes les lauréats de l’appel à projets « La Grande Fabrique de l’Image » (France 2030) lancé par le Centre National de la Cinématographie et de l’image animée (CNC) il y a un an. Le Périgord figure bien au générique des 68 dossiers retenus sur 175 présentés et ça, c’est vraiment un bon scénario pour l’image du département et son développement économique.

UNE AMBITION FRANÇAISE

Les enjeux sont réels au niveau national puisque la France veut se placer en tête des infrastructures d’accueil de tournage en Europe continentale. « Il ne s’agit pas seulement d’un enjeu économique et industriel mais de défendre le modèle d’indépendance, de diversité, de liberté de création et de souveraineté culturelle de la France », assure le ministère, qui a doté cette ambition de 350 millions d’euros.

Un réseau va se tisser de Lorient à Lyon en passant par Montpellier et Toulouse… Bien peu d’élus en ruralité : Sarlat est d’ailleurs absente sur la carte des localisations produite par le ministère.

S’ajoute la volonté d’ouvrir les formations dans les métiers du cinéma et de l ’audiovisuel, de réduire l’empreinte carbone de la filière et de développer les activités écoresponsables. Le projet porté par la Dordogne avait donc les bons arguments : un site aux dimensions XXL, aux portes de Sarlat ; l’image d’un territoire déjà voué aux tournages avec une logistique d’accueil et des intervenants déjà repérés ; et un important volet formation et développement durable associé au projet de studios.

Le dossier s’est distingué parmi 175 candidats (entreprises actives sur les marchés du cinéma, de l’audiovisuel et du jeu vidéo) lors de deux comités de sélection présidés par le cinéaste Cédric Jimenez et la créatrice de jeu vidéo Muriel Tramis, composés d’experts indépendants aux profils complémentaires (faisabilité et éligibilité préalablement évaluées par le CNC et la Caisse des Dépôts et Consignations).

Une friche immense à haut potentiel, sans artificialisation des sols © Loïc Mazalrey

Si tous les projets vont à leur terme, la France doublera d’ici 2030 la surface de plateaux de tournage pour atteindre 153 000 m2 et quadruplera la surface de backlots (décors extérieurs permanents) pour atteindre 187 000 m2.

DES RÉALITÉS LOCALES

Parmi les 68 projets retenus, 11 concernent des studios de tournage et 34 des lieux de formation (et aussi 12 studios d’animation, 6 studios de jeu vidéo et 5 studios d’effets spéciaux et post-production) : Sarlat n’est labellisé que pour le second volet alors que ses ambitions couvraient les deux, en complémentarité, pour réhabiliter le site industriel France Tabac. « Orienté sur les enjeux de formation professionnelle des filières techniques du cinéma et de l’audiovisuel (tels que métiers de la décoration, de la machinerie, de l’électricité, du maquillage, des métiers d’art, etc.), le projet France Tabac portait l’ambition de créer un plateau technique et pédagogique, couplé à un studio de tournage et à un site de stockage et de recyclage des décors, des accessoires et des costumes », rappelle Benoît Secrestat, vice-président de la Comcom Sarlat Périgord-noir et vice-président du Département chargé de l’attractivité, qui a piloté le dossier avec l’association Ciné Passion, soutenue par le Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, le Conseil départemental de la Dordogne, la Communauté de communes Sarlat-Périgord noir et en coordination avec la Semiper.

Sur le tournage de Rabia, à Sarlat, fin 2022 © Loïc Mazalrey

Le travail de Ciné Passion a été particulièrement salué, son intuition géniale et l’engagement nécessaire pour la concrétiser. « Pour nos collectivités historiquement très engagées et mobilisées dans la filière du cinéma et de l’audiovisuel, cette nouvelle est à la fois une fierté et un gage de reconnaissance indéniable de la singularité de notre projet, qui nous permettra de devenir le premier Campus des Métiers et des Qualifications des métiers du cinéma. »

SARLAT SUR LA CARTE DE FRANCE

Bien sûr, favoriser la formation et donc l’emploi dans un département où les tournages se multiplient (actuellement la série Fortune de France) est une sérieuse avancée, mais c’est encore vers la région parisienne et le Sud (Marseille, Nice) que se tournent les regards et les fonds (mais aussi Tourcoing, Reims et deux sites en Occitanie) pour les 11 studios de tournage labellisés. Un passeport pour le projet formation, ce n’est pas rien car les heureux élus sont rares, et bien peu en milieu rural.

ANCIENNE USINE, FUTURS STUDIOS

Une chose est sûre : une partie de la friche industrielle, où vient d’aménager le siège de la Communauté de communes, accueillera bientôt un plateau technique et pédagogique, qui fonctionnera avec a minima un studio de tour- nage, et un site de stockage et de recyclage des décors, accessoires et costumes pour une valorisation originale de la logistique de tour- nage, dans une démarche écoresponsable. Les intéressés restent dans l ’attente du montant du soutien financier « nécessaire à sa parfaite réalisation » pour finir de construire le projet avec l’ensemble des partenaires : cette étape essentielle les remobilise pour pour- suivre. Ils n’ont semble-t-il pas fini de travailler et tenteront certainement leur chance au grattage, après ce demi-tirage.

Cinq projets labellisés en Nouvelle-Aquitaine.

Dans la région, quatre autres dossiers seulement sont retenus : un studio d’animation à Angoulême et Bordeaux (Solidanim), un studio Jeu vidéo à Bordeaux (Shiro Games), et deux autres formations, une aux tournages à La Rochelle (conservatoire européen d’écriture audiovisuelle) et l’autre au numérique, à Angoulême (Cnam-Enjmin).