Le nom « Caso » leur était dédié. Caroline et Sophie. Dans l’ordre de naissance. Leur père, Robert Monné, cofondateur du promoteur Monné-Decroix, n’avait pourtant pas prévu que ses deux filles reprendraient cette foncière immobilière créée en 2002 un peu par hasard. « Elle lui a servi à acheter le domaine des Demoiselles à Frouzins, mais il n’y avait aucune autre activité, aucun salarié », relate Sophie, la cadette, 38 ans aujourd’hui. C’est elle qui suivra son père en premier chez Monné-Decroix dès 2006, avant que celui-ci ne vende la société au Crédit Agricole l’année suivante.
Quant à l’aînée (42 ans), inscrite au barreau de Toulouse, elle suit la transaction de près. « J’hésitais entre ma carrière d’avocate et l’immobilier, retrace Caroline Monné. Sur conseil d’un confrère, j’ai choisi l’immobilier car c’est du concret. » Voilà comment les sœurs Monné ont trouvé leur voie en reprenant Caso. « On n’avait pas prévu de travailler ensemble », indique Caroline, entrée en 2010, deux ans après sa sœur qui gère aujourd’hui la branche parisienne. « Ce n’était pas intentionnel, mais ce n’est pas un choix subi », souligne Sophie, complice.
Toulouse, Paris et bientôt Bordeaux ?
Le visage de la foncière a en tout cas fortement changé. Le Domaine des Demoiselles n’est plus seul dans le portefeuille Monné qui contient près de 900 autres lots – deux tiers de logements, un tiers de bureaux – répartis entre la Ville rose, la capitale et Barcelone. « On regarde aujourd’hui pour se développer à Bordeaux », détaille Sophie Monné. Sa sœur nuance. « Les prix sont très élevés, il y a eu un effet bulle pas toujours compréhensible. » La patience est la mère de toutes les vertus. Les deux sœurs ont attendu deux ans avant de réaliser leur premier achat parisien. Pas question donc de se précipiter à Bordeaux. « Il faut du temps pour prospecter, comprendre le marché, s’assurer qu’on achète un bien qui ne tourne pas depuis trois ans sans trouver d’acheteur », liste Sophie Monné.
L’ADN de la rénovation
La construction d’un bon réseau prend du temps. À Toulouse, ces anciennes élèves de Pierre-de-Fermat n’ont pas eu ce souci. « On est très attachées à la ville. On aime rénover des immeubles, leur donner une seconde vie », plaident-elles. À l’heure où la solidité du bâti toulousain pose question suite à l’effondrement d’un immeuble à quelques encablures du Capitole, la rénovation est un enjeu crucial. « On a acheté des biens très délabrés mais avec un grand potentiel », affirme Sophie à l’évocation d’un immeuble rue Saint-Antoine-du-T. « On aime intervenir sur ces bâtiments vieux de plusieurs siècles, réinterpréter les contraintes de l’époque. On s’inscrit dans un temps long. » Une vision qui se traduit aussi par une volonté d’être le moins impactant possible au plan environnemental. « En tant que donneur d’ordre, on veut impulser ce changement, multiplier le réemploi sur les chantiers, recycler les déchets. C’est un coût qu’on assume. »
Caso Patrimoine a investi l’an passé près de 10 millions d’euros en travaux, et table sur le même montant en 2024. Des investissements conséquents à l’heure où l’immobilier est en difficulté, et où les coûts des travaux ont flambé avec le Covid et la guerre en Ukraine. Mais pas question de s’arrêter là. « On a remporté l’appel d’offres pour rénover l’Hôtel Lestang, l’ancien rectorat de Toulouse », annonce Caroline Monné. Le projet est complexe car le bâtiment est imbriqué avec la Cour administrative d’appel. Des bureaux et un restaurant gastronomique verront le jour à l’horizon début 2026.
« On regarde pour se développer à Bordeaux »
La FNAC dans l’ancien UGC
Plus près de nous, ce sont les travaux de l’ancien UGC place Wilson qui battent leur plein. Débutés mi-juillet, ils vont durer deux ans pour livrer l’immeuble Les Variétés, très attendu des Toulousains. Un chantier titanesque dans le cœur du centre-ville qui a pris beaucoup de retard. « On a acheté l’UGC mais aussi tous les appartements derrière qu’il a fallu détruire car il y avait des arrêtés de péril. » Une démolition à forte contrainte car la ligne A du métro passe juste en dessous. Le chantier a également été ralenti par l’annulation du plan local d’urbanisme (PLU) en 2021 et par des fouilles archéologiques qui ont mis au jour des fondations d’anciennes habitations du Moyen-Âge. « On s’y attendait car il s’agissait des anciens faubourgs de Toulouse. Mais les délais administratifs sont trop longs, déplore la sœur aînée. On a perdu un an au total entre les autorisations et les fouilles. » Celles-ci sont d’ailleurs à la charge de Caso qui a signé un chèque de 370 000 euros HT.
Le plus dur semble derrière le duo qui attend avec impatience de pouvoir commercialiser les bureaux et de signer les baux commerciaux. La FNAC devrait déménager dans ces locaux rénovés et un restaurant avec une terrasse panoramique doit s’installer au dernier étage.