Couverture du journal du 06/04/2024 Le nouveau magazine

ISP System et le défi du bas carbone

L’entreprise de Vic-en-Bigorre s’engage dans la recherche et le développement d’actionneurs intelligents qui seront incontournables dans les aéronefs bas carbone. Elle a signé avec SERMA Ingénierie un accord de consortium du projet Flycera : 80 emplois sont à la clé.

ISP System aul Sauvageot, Jean Salomon et Etienne Poirier : les acteurs du projet Flycera.

Paul Sauvageot, Jean Salomon et Etienne Poirier : les acteurs du projet Flycera. ©DR

Clément Beaune, le ministre délégué chargé des Transports , l’a clairement affirmé  en décembre dernier : « La décarbonation de l’aviation n’est plus une option mais une obligation ». Une transition qui fait office de défi industriel et tous les grands acteurs du transport aérien ont le même objectif : développer un avion bas carbone et se sevrer du kérozène. Imaginer que Vic-en-Bigorre, petite ville du Val d’Adour, illustre pour son activité rurale, joue un rôle majeur dans cette ambitieuse course contre la montre a déjà quelque chose de vertigineux. Et pourtant, au milieu des champs, derrière les murs d’ISP System se développent des produits de haute précision, reconnus dans le monde entier : 35 % sont destinés à l’export. C’est ici même que le projet Flycera sera mené, et, avec lui, la cruciale étape de l’électrification des commandes de vol des aéronefs.

DES PROGRAMMES D’ENVERGURE

Si l’innovation est de mise, pour la société spécialisée en ingénierie de précision déjà engagée dans des programmes de grande envergure comme celui du Laser Méga Joule, le Synchrotron SOLEIL ou le projet européen ELI, cette participation conforte un rayonnement global. Depuis 26 ans, ISP System apporte ses compétences dans tous les secteurs de la recherche et de l’industrie grâce à son activité qui se répartit en six lignes de produits : le micro-nano positionnement, l’opto-mécanique, la machine spéciale de précision robotique, la mécatronique pour le médical, les tests et mesures et enfin l’actionneur électrique embarqué. Ce dernier est appliqué en aéronautique, dans le spatial, la défense ou le ferroviaire et c’est lui qui est au centre de l’ambitieux projet Flycera.

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UN PROJET DE PRÈS DE 8 MILLIONS D’EUROS

Labellisé par le pôle de compétitivité Aerospace Valley, Flycera est porté par ISP System qui pourra compter sur ses partenaires Serma Ingénierie et l’Institut de Recherche en Informatique de Toulouse. En ligne avec les objectifs écologiques nationaux, il s’inscrit pleinement dans la stratégie d’électrification des aéronefs du plan d’investissement France 2030 qui assure 3,3 millions d’euros en subventions et en avances remboursables sur les 7,9 millions d’euros de son montant total. Jean Salomon, le préfet des Hautes-Pyrénées, n’a pas caché son enthousiasme : « Le bas carbone est un volet qui représente 1 milliard d’euros, les millions qu’on met ici sont un très bon investissement, surtout pour l’important enjeu qu’est l’aéronautique. Dans le petit bashing que subit la filière aujourd’hui, on a oublié d’où on venait, où on va et ce qu’on est capable de faire. On peut se rendre compte que l’industrie française, en matière de recherche et développement n’a pas à rougir ». Réunis lors de la signature de l’accord de consortium le 21 avril, les différents acteurs de Flycera partageaient le même engouement pour un projet qui s’avère primordial et passionnant, à l’instar d’Étienne Poirier, directeur général de Serma Ingénierie : « On est très fiers d’être ici pour ce projet ambitieux. Ce n’est pas le premier pour nous, nous sommes déjà entrés dans le bas carbone, notamment en tant que partenaire dans ZEROe d’Airbus. ».

DES ACTIONNEURS INTELLIGENTS

La recherche dans ce secteur n’est pas non plus inédite pour ISP System comme l’explique Paul Sauvageot, son PDG : « Il y a 4 ans, nous avons décidé de poursuivre le développement de notre activité avec une priorité pour les nouvelles demandes clients orientées vers la réduction des émissions carbone. C’est ainsi que nous avons d’abord lancé le projet de capteurs photoniques d’analyse de biométhane destinés à contrôler la composition du gaz avant son injection sur le réseau ». Un projet qui est d’ailleurs en cours d’industrialisation pour une production future. Flycera se profile comme une étape de plus dans ce défi inouï qu’est le développement des actionneurs électriques intelligents pour com- mandes de vol électriques pour les avions bas carbone : « Nous y travaillons ardemment depuis un an », souligne Paul Sauvageot. « C’est un actionneur totalement innovant, rotatif et intelligent destiné aux aéronefs à propulsions électriques ou hybrides. »

80 EMPLOIS CRÉÉS

Une fois la phase de recherche terminée et aboutie, l ’activité industrielle induite contribuera à créer 80 emplois sur le site de Vic-en-Bigorre : « Le temps que ça monte en production, ce sera à l’horizon de 2030 », précise le PDG d’ISP System. Un accroissement de l’activité qui nécessitera également 15 embauches à Serma Ingénierie à Cornebarrieu. Un dynamisme économique qui n’est pas sans réjouir Frédéric Ré, président de la Communauté de Communes Adour-Madiran : « Dans un climat très morose où on laisse penser que le milieu rural est en train de se mourir, qu’on n’a pas d’idées, qu’on n’est pas capables, qu’on ne peut pas, 80 emplois de pointe ce n’est pas rien. Ça fait vraiment du bien ». Dans la souveraineté et l’indépendance techno- logique, Vic-en-Bigorre compte peser car si tous les ensembles d’actionneurs intelligents sont jusqu’ici américains, les premiers conçus, produits et intégrés sur le sol français seront du Val d’Adour… où même ce qui n’existe pas encore pousse et avec brio.