Les locaux sentent encore le neuf. Normal, le déménagement de Lhers dans ses nouveaux murs à Aucamville date d’il y a seulement quelques mois. « On a encore de la place », sourit Olivier Geysels, patron de la PME qu’il a reprise il y a dix ans. Le changement a nécessité un investissement de 600 000 euros mais il était nécessaire pour coller aux ambitions de Lhers, un sous-traitant qui croît aussi fort que les cadences imposées par ses clients.
Fabricant de pièces mécaniques de précision, Lhers est sous-traitant de rang 1 dans le spatial, où elle collabore étroitement avec Airbus Defence & Space. Elle est également très présente dans l’aéronautique, qui représente 50 % de son chiffre d’affaires arrêté à 6 millions d’euros l’an passé. « Nous travaillons également avec Safran et MBDA dans le secteur de la défense. On fabrique des pièces pour le Rafale mais aussi des propulseurs de missile longue portée », détaille Olivier Geysels. La défense représente 15 % du chiffre d’affaires et assure un carnet de commandes pour la décennie à venir.
De 4 salariés à près de 60
En dix ans, Olivier Geysels a amené la TPE de 4 personnes créée en 1964 à une PME dynamique de 56 salariés. « L’ambition, c’est d’être une centaine d’ici 2028. » Il a fallu tout reprendre, ou presque, chez Lhers. « On ne faisait que l’usinage conventionnel, le virage du numérique n’avait pas été pris à mon arrivée. Le gros changement fut le démarrage des activités série avec Safran. Ça a créé un effet boule de neige. » La croissance a aussi pris une courbe inconnue jusqu’ici avec un triplement en quatre ans. « On vise encore 40 % de mieux en 2025 », indique Olivier Geysels.
Suivre ses clients à la trace
Une croissance qui donne des ailes au sous-traitant qui vient de s’implanter aux États-Unis. « Nous avons ouvert en ce début d’année notre usine en Floride. » Une ouverture dictée par le besoin de suivre ses clients à la trace. « Ça fait sens pour eux qu’on produise sur place ce qu’ils vont vendre aux États-Unis. Ça évite le transport et les risques de nouveaux droits de douane que souhaite mettre en place Donald Trump », soulève Olivier Geysels. Pour l’instant, l’usine est encore vide, en attente de machines. « Il a fallu trouver un financement. Les banques américaines ne nous connaissent pas et en France, on ne veut pas nous prêter pour investir à l’étranger. » Il a donc fallu passer par la création d’une holding qui obtiendra un prêt garanti par la Banque publique d’investissement. « Au total, on a besoin d’un million d’euros sur trois ans pour une machine neuve et d’autres d’occasion. »

© Lilian Cazabet – La Vie Economique
Suivre la montée en cadence
Cette volonté de grandir est dans l’ADN d’Olivier Geysels. « Mon but, c’est de bâtir », répète le quinquagénaire arrivé à Toulouse chez Liebherr en 1999. « Le pire pour nos clients actuellement, ce serait de leur dire “ désolé, on ne veut pas grandir, on ne veut pas de machines supplémentaires ”. Beaucoup de petits sous-traitants ne veulent pas s’embêter avec des crédits, des investissements, des déménagements… Nous, on veut suivre la montée en cadence de nos clients. »
Pour cela, il faut aussi trouver l’argent dans une période où la trésorerie est presque à sec et alors qu’il reste encore un reliquat de PGE de 400 000 euros à solder d’ici l’an prochain. « L’an passé, on a investi plus d’un million d’euros dans nos machines. On est à la moitié de notre plan d’investissement. » Pour aider à soulager les finances, la Région Occitanie a consenti une subvention de 200 000 euros à Lhers, qui vient réduire les remboursements mensuels. « Le problème, c’est qu’en France, on manque d’appétence au risque, déplore le chef d’entreprise. Les banquiers ont du mal à nous prêter car il y a toujours le risque d’une crise de marché. » Cette difficulté financière empêche Lhers de pouvoir se développer encore plus vite. « On m’a proposé de rencontrer des représentants d’Amazon pour réaliser des pièces de satellites pour eux, mais je ne peux pas investir plus dans les machines. Et qui va me suivre ? »
Ouverture de capital
Le dirigeant de Lhers envisage d’ouvrir son capital pour faire grandir ses ambitions. Un second actionnaire va d’ailleurs faire son entrée à hauteur de 10 %. Une levée de fonds cet été devrait permettre de débloquer autour de 2 millions d’euros pour consolider l’entreprise en France et développer l’activité aux États-Unis. Outre-Atlantique, Olivier Geysels a un rêve. « J’aimerais qu’on se déploie vers Seattle et qu’on soit 200 ou 300 d’ici dix ans. » Le chef d’entreprise surveille les opportunités de rachat d’entreprise, en France comme à l’étranger. Une première opération de croissance externe est envisagée. « Elle pourrait déboucher sur une prise de participation dès cette année. »
Une levée de fonds va permettre d’amener près de 2 millions d’euros cet été