Couverture du journal du 19/03/2025 Le nouveau magazine

Saint-Jean-de-Luz : des projets de développement économique

Dans cet entretien exclusif, Jean-François Irigoyen, maire de Saint-Jean-de-Luz, revient sur l’aménagement de l’îlot Foch, l’une des réalisations majeures de son mandat. Le premier magistrat de la cité des corsaires aborde également des enjeux décisifs tels que l'aménagement du port, les défis liés à la pollution marine et dévoile des projets de développement économique et touristique.

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Jean-François IRIGOYEN, maire de Saint-Jean-de-Luz © Cyril Garrabos - La Vie Economique

La Vie Économique : L’aménagement de l’îlot Foch, en plein centre-ville, a été l’une des réalisations majeures de votre mandat. Ce projet est-il terminé ?

Jean-François Irigoyen : Ce projet est en phase de finalisation avec l’installation du mobilier urbain, tels que les bancs, les corbeilles, les candélabres et les appuis-vélos. La superficie de la place est d’un peu plus de 10 000 m². L’idée était de rendre un espace arboré aux piétons et d’aménager un passage direct vers la gare. En février, les aménagements du parvis de la gare, menés par la ville et le syndicat des mobilités de la communauté d’agglomération du Pays basque, commenceront. Nous avons la chance d’être l’une des rares villes à disposer d’une gare en plein centre-ville.

LVE : Quel a été le budget consacré par la ville à l’aménagement de la place ?

J.-F. I. : Depuis le projet évalué entre 3,5 et 4 millions d’euros lors de la concertation citoyenne organisée en 2018, plus de 120 arbres ont été ajoutés et nous avons subi l’inflation. Aujourd’hui, c’est un projet de 7 millions d’euros, dont la moitié est financée par la vente du parking Jaulerry au groupe Hetzi.

LVE : En plus d’embellir le lieu de vie des Luziens, cette place est-elle un projet touristique ?

J.-F. I. : Oui et c’est pour cette raison que nous n’avons pas planté d’arbres sur toute la place afin de garder un espace pour des animations comme le marché de Noël, qui y a été organisé pour la première fois.

Pour encourager le tourisme d’affaires, nous étudions l’aménagement d’un centre de séminaire

LVE : Où en est le projet du groupe Hetzi qui a construit l’ensemble immobilier de l’îlot Foch ? Combien de commerces ont été ouverts ?

J.-F. I. : Une dizaine et ce sont tous des commerces de bouche. Tous les locaux sont occupés. Il y a également une partie résidentielle dans le projet avec dix appartements privés vendus par le groupe Carmen Immobilier et sept logements sociaux que nous avons demandés, qui vont bientôt être attribués par l’Office 64 de l’habitat. C’est assez rare d’avoir un tel pourcentage de logements sociaux dans une opération immobilière aussi réduite. Nous espérons y loger des personnes d’un certain âge pour les rapprocher du centre-ville.

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La place Foch et l’immeuble Bizipoz © Cyril Garrabos – La Vie Economique

LVE : Et le projet d’hôtel de 52 chambres du groupe Hetzi ?

J.-F. I. : Cet hôtel devrait, en principe, ouvrir au mois de mars, car nous avons prévu une inauguration commune fin mars.

LVE : L’actualité de la ville de Saint-Jean-de-Luz, c’est l’interdiction temporaire de la pêche professionnelle pour les bateaux du port, du 22 janvier au 20 février. Quel est votre point de vue sur l’avenir du port de Saint-Jean-de-Luz Ciboure ?

J.-F. I. : C’est un sujet qui m’anime particulièrement parce que mon métier m’a amené à beaucoup travailler avec le secteur de la pêche. J’ai connu le port de Saint-Jean-de-Luz avec une centaine de bateaux et il en reste une trentaine. Je suis né à Saint-Jean-de-Luz et le port était le poumon économique de la ville avec des ateliers mécaniques et des conserveries qui faisaient vivre beaucoup de monde. Et puis, au fil du temps, notamment en raison des réglementations européennes, les ports ont vu leur activité diminuer.

 Il faut tout faire pour développer la pêche artisanale

LVE : Depuis le 1er janvier 2023, l’exploitation du port de pêche et de plaisance de Saint-Jean-de-Luz/Ciboure est assurée par une société publique locale (SPL) qui investit 20 millions d’euros en huit ans. Quels sont les travaux en cours ?

J.-F. I. : La machine à glace va être changée, des travaux vont être lancés sur le chantier naval de Sokoa, les bâtiments sont vétustes, la volonté est de maintenir et développer ce port de pêche. Il reste à attirer des jeunes, et heureusement, il y en a.

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Port de Saint-Jean-de-Luz Ciboure © V. Biard – La Vie Economique

LVE : Quel avenir pour le port ? Le transformer en port de plaisance ? Garder coûte que coûte une pêche artisanale et locale ?

J.-F. I. : Je ne voudrais pas d’un port de plaisance dans le port de pêche. Il faut tout faire pour développer la pêche artisanale. Quand je vois que le nombre d’élèves du lycée maritime de Ciboure est en augmentation, même s’ils ne deviendront pas tous pêcheurs, bien sûr, la filière a de l’avenir.

LVE : Le port de Saint-Jean-de-Luz est le seul port de la Côte basque à accueillir des navires de croisière. Est-ce profitable ?

J.-F. I. : Nous ne sommes pas Venise, mais nous accueillons quatre à cinq bateaux de croisière dans la baie ou en dehors s’ils sont trop grands pour s’y amarrer. 70 % des passagers descendent à terre, la moitié d’entre eux part en excursion tandis que l’autre moitié reste en ville avec un panier moyen de 250 euros pour une escale d’une demi-journée. Cela amène donc une clientèle pour nos commerçants.

Un terrain de huit hectares de la zone de Jalday devrait accueillir un projet mêlant économie et habitat

LVE : Comme bon nombre de communes du littoral, Saint-Jean-de-Luz subit des pollutions marines. Ont-elles un impact sur le tourisme ?

J.-F. I. : La grande plage de Saint-Jean-de-Luz est une baie quasiment fermée et, lors de fortes pluies, il nous arrive d’interdire la baignade. Imaginez un gros coup d’orage le 14 juillet et une très belle journée le lendemain où nous devons interdire la baignade pour cause de pollution. Les gens ne comprennent pas pourquoi l’océan est inaccessible alors qu’il fait 30 °C. C’est impactant politiquement et économiquement. Avec la communauté d’agglomération, nous avons lancé la construction d’une nouvelle station d’épuration d’un coût de 35 millions d’euros. Elle devrait être opérationnelle en 2027. Partout où c’est possible, nous séparons les réseaux d’eaux en ville, nous remettons en état les réseaux unitaires vieillissants, nous installons des réseaux de récupération d’eaux de pluie. Nous connaissons aussi une pollution générée par les cours d’eau, mais cela s’améliore puisqu’une nouvelle station d’épuration a été livrée à Saint-Pée-sur-Nivelle (NDLR : ville située en amont de Saint-Jean-de-Luz).

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Le bar Bizipoz en été © D. R.

LVE : Comment se porte le commerce à Saint-Jean-de-Luz ?

J.-F. I. : Pas trop mal d’après ce que me disent les commerçants et même assez bien. Nous essayons de les aider et permettez-moi de revenir sur le projet de l’îlot Foch qui comprend un parking de 450 places. Nous ne l’avons pas construit pour le plaisir de creuser un trou. Nous savons très bien que s’il n’y a pas de stationnement, le commerce meurt. Les premiers chiffres que nous avons démontrent d’ailleurs que le parking est fréquenté non seulement par des Luziens, mais aussi par des Cibouriens et des Urrugnars.

LVE : Saint-Jean-de-Luz est, avec Biarritz, l’une des deux villes de la Côte basque comptant le plus d’hôtels. Qu’en est-il du tourisme d’affaires ?

J.-F. I. : La fréquentation des hôtels haut de gamme de la ville se développe et lors des dernières vacances de Noël, le Grand Hôtel était complet pour la première fois, paraît-il. Pour encourager le tourisme d’affaires, sans entrer en concurrence avec Biarritz, nous comptons aménager un auditorium avec vue sur mer, appartenant à la ville, en centre de séminaire ainsi que des salles annexes situées dans l’immeuble de la Pergola. C’est à l’étude, mais nous souhaitons créer une dynamique autour de ce tourisme d’affaires pour stimuler les mois creux dans l’hôtellerie.

LVE : Quels sont les principaux projets, s’il y en a, d’implantations d’entreprises ?

J.-F. I. : Le problème, c’est le foncier disponible. Il reste néanmoins un ancien bâtiment de Boardriders sur la zone d’activités de Jalday qui devrait être récupéré par la communauté d’agglomération. Le groupe Hetzi, le groupe Olano et la communauté d’agglomération devraient y installer des bureaux. Il y a de la superficie et on peut y gagner en hauteur.

LVE : D’autres projets à annoncer ?

J.-F. I. : Oui, nous travaillons avec la communauté d’agglomération, qui a la compétence de développement économique, à un projet sur les Hauts de Jalday, sur la partie sud de la zone. Sur des terrains de quatre hectares appartenant à la famille Ithurralde et sur quatre hectares appartenant à la commune, nous souhaitons développer un projet mêlant économie et habitat. Ce sera assez innovant.

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Le projet de la place Foch © D. R.

Jean-François Irigoyen en 5 dates

1962 Naissance à Saint-Jean-de-Luz

1995 Conseiller municipal

2014 Premier adjoint en charge des travaux et du littoral

2017 Élu maire à la suite du décès de Peyuco Duhart

2020 Réélu au premier tour, nommé vice-président de la communauté d’agglomération du Pays basque et président du Syndicat des mobilités

Hetzi en pleine expansion

Fondé par Daniel Hiribarren à Hendaye en 1991, le groupe Hetzi, initialement lancé avec l’agence Carmen Immobilier, compte aujourd’hui 250 salariés et a réalisé un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros en 2024. Avec une trentaine d’agences immobilières, le groupe s’est diversifié en lançant la plateforme poplidays.com, dédiée à la location de meublés de tourisme, la cave à vins Vinotek à Hendaye, et le bar-restaurant Belhabar à Ciboure. En complément du lieu festif Bizipoz, ouvert en juin dernier, Daniel Hiribarren inaugurera l’hôtel 4* Bizipoz le 1er avril 2025 dans l’immeuble construit par son groupe.

Le port au ralenti

Du 22 janvier au 20 février, les navires de plus de huit mètres sont interdits de pêche dans le golfe de Gascogne, de l’Espagne à la Bretagne, afin de protéger les cétacés capturés accidentellement. 151 navires sont inscrits au quartier maritime de Bayonne, dont 103 ont leur port d’exploitation situé sur la côte basco-landaise et 43 à Saint-Jean-de-Luz / Ciboure. L’interdiction temporaire concerne une vingtaine de navires, fileyeurs et chalutiers pélagiques, dont le manque à gagner est estimé à 35 % de leur chiffre d’affaires annuel.