Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Lot-et-Garonne – Sobriété foncière : pour redynamiser les centres-bourgs

C’est dans le cadre de son assemblée générale annuelle que le CAUE 47 (conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement) a organisé une table ronde sur le thème : du projet de bourg à la sobriété foncière.

Jean-Jacques Mirande, président du CAUE 47 foncière

Jean-Jacques Mirande, président du CAUE 47 © Julien Mivielle

Après avoir présenté un bilan positif de son activité (avec une hausse de 8,4 % du nombre d’adhérents en 2022 et 108 interventions réalisées auprès des communes du Lot-et-Garonne l’an dernier), le CAUE 47 a souhaité élargir le débat sur la sobriété foncière autour du projet gouvernemental du ZAN (Zéro Artificialisation Nette) qui demande aux territoires, communes, départements, régions de réduire de 50 % le rythme d’artificialisation et de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030 par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020.

Tandis que le projet du ZAN est aujourd’hui gelé en raison de la levée de boucliers de nombreux élus (l’association des maires de France a notamment déposé deux recours devant le Conseil d’État), la table ronde organisée à Bazens, en plein cœur du Lot-et-Garonne, réunissait architectes et élus pour explorer les pistes disponibles pour « limiter » l’étalement de l’habitat et redynamiser ainsi les centres-bourgs.

RÉNOVER LES BÂTIMENTS EXISTANTS

Au terme d ’échanges très constructifs, les participants se sont retrouvés sur l’intérêt de privilégier en priorité la rénovation de bâtiments déjà existants tout en prenant le temps d’une réflexion globale sur l’aménagement des villes et villages. Invité de la table ronde, le maire d’Auriac-sur-Dropt Alexandre Da Dalt a pu partager son expérience autour du projet de déménagement de l’agence postale de sa commune. Accompagné par un jeune cabinet d’architectes ayant fait le choix délibéré de s’installer en zone rurale (le cabinet Seconde Ligne est situé à Castillonès) et bénéficiant du dispositif ORT (opération de revitalisation du territoire) « petites villes demain », le jeune élu a pu réunir tous les acteurs concernés par ce projet, notamment les habitants dont beaucoup de propriétaires de maisons secondaires originaires d’Île-de-France qui tenaient à assister aux réunions, afin de prendre en compte de nouveaux critères culturels, sociologiques, patrimoniaux…

CONSOLIDER LES RELATIONS SOCIALES

Il a été ainsi convenu que le nouveau bâtiment fera aussi office de halle multi-services ouverte abritant l’ensemble des activités de la commune : « Plus qu’un simple service, le projet doit, dès sa première phase, consolider les relations sociales et les initiatives associatives préexistantes typiques d’Auriac-sur-Dropt. C’est par une économie de moyen et dans une concertation avec les habitants qu’il est possible d’offrir un espace généreux, ouvert sur la plaine et permettant la création d’espaces publics à la hauteur des enjeux des petites villes de demain », souligne Ava Rhoganian, architecte pour l’agence Seconde Ligne.

L’EXEMPLE DE GAVAUDUN

Tandis que Nathalie Herrard, architecte/urbaniste et directrice du CAUE 47, rappelait que les élus veulent parfois construire trop vite, Laurence Aurejac (paysagiste-concepteur et enseignante à école d’architecture de Bordeaux) prenait pour exemple le site touristique de Gavaudun, connu pour la présence d’un château sur la partie haute du village. Le groupe de travail mené par le CAUE 47 a pu passer d’un projet de construction d’un atelier municipal à un aménagement urbanistique global à partir d’un bâtiment existant. Après avoir identifié dans une étude territoriale, les richesses et faiblesses de chaque lieu, il est apparu très rapidement que le village bas et sa place méritaient d’être l’entrée de la découverte pour les touristes du village et de sa citadelle. Cette dernière accueille 10 000 visiteurs à l’année pour un village de 200 habitants, mais aussi l’entrée vers d’autres lieux comme la léproserie ou les moulins du moyen-âge qui bordent la rivière.

Le groupe de travail mené par le CAUE 47 est passé d’un projet de construction d’un atelier municipal à un aménagement global à partir d’un bâtiment existant

DE NOUVEAUX SERVICES POUR LES HABITANTS

« Mal définie et peu sécurisée, la place ne joue plus son rôle de porte d’entrée dans le bourg ou de lieu de vie publique avec notamment le déplacement de la mairie au début du XXe en pied du château », résume Laurence Aurejac. Travaillant en étroite collaboration avec la mairie de Gavaudun, les équipes du CAUE 47 ont alors fait l’inventaire des bâtisses propriétés de la commune et de celles qui pouvaient être acquises afin d’éviter toutes constructions neuves qui pourraient nuire à l’équilibre de l’ensemble. L’acquisition d’une bâtisse fermant la place a été finalement retenue : « La visite incitera les touristes à laisser leur voiture en bas du village et de visiter celui-ci avant d’arriver au château », ajoute Laurence Arejac. Pour les habitants, la proposition permet ainsi une réappropriation de la place avec l’arrivée de nouveaux services et une sécurisation du lieu, avec une déminéralisation d’une voie, permettant ainsi de valoriser les découvertes piétonnes. Tout le socle immédiat du château sera débarrassé d’un parking, qui détonne avec cette forteresse médiévale, pour redonner sa place à un paysage et jardin médiéval.

LES BASTIDES, LIEUX DE LIEN SOCIAL

Après ces exemples d’un travail collectif mené dans le cadre d’une plus grande sobriété foncière, David Morisset, architecte des Bâtiments de France arrivé en Lot- et-Garonne il y a 1 an, a quant à lui mis en avant le patrimoine médiéval des nombreuses bastides de la région et leur lien social auprès des habitants : « On peut encore vivre dans des maisons datant du Moyen- Âge ! C’est une belle opportunité de reconquérir ce bâti ».