Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Hautes-Pyrénées – Les leaders mondiaux de la céramique technique

Avec un savoir-faire qui fête ses 100 ans, la SCT a réuni toutes les entreprises qui composent avec elle le fabuleux pôle d’innovation lié à cette matière. Au cœur de projets internationaux voire spatiaux, la team Ceram’Innov de Bazet est celle de l’excellence.

ceramique

© Hermance HITTE

Dans l’art comme la création, la French Touch est synonyme d’excellence mais dans le secteur de niche qu’est la céramique technique, c’est la Bazet Touch qui fait briller les yeux du monde entier. Pour les novices, ce petit village en périphérie de Tarbes compte moins de 2 000 habitants… Et ce qui se fait de mieux en matière d’innovations liées à ce matériau aux propriétés étonnantes.

Un pôle d’excellence qui rassemble des entreprises de pointe, parfois inconnues du grand public, et d’autres dont le savoir-faire a permis à la planète entière de s’émerveiller comme Mersen Boostec qui a participé à la réalisation des instruments du télescope James Webb. Si Joe Biden s’était réjoui « d’une Amérique capable de grande chose », les images recueillies n’auraient pas été possible sans la patte made in Bazet. Une source de fierté et d’émerveillement qui ne date pas d’aujourd’hui, cette année est celle des 100 ans de ce savoir-faire qui a vu le jour avec un produit bien terre à terre : les isolateurs liés à l’électrification des chemins de fer.

Joël Faber, PDG de Cerafast céramique

Joël Faber, PDG de Cerafast © Hermance HITTE

UNE ÉPOPÉE QUI DÉMARRE AVEC LE TRAIN

En 1920, pleines de montagnes, les Hautes-Pyrénées n’avaient pas d’accès direct au charbon mais déjà des idées et surtout un énorme potentiel hydroélectrique. Pour assurer les fabrications du matériel nécessaire au réseau du grand Sud-Ouest, la Compagnie des chemins de fer du Midi a favorisé un ensemble d’industries électrotechniques. La Compagnie générale d’électro- céramique a ainsi vu le jour à Bazet tandis qu’à Séméac, Alstom se vouait aux premières motrices électriques. En 1955, un laboratoire qui teste les isolateurs dans des conditions extrêmes étoffe Bazet et en 1962, le développement des centrales nucléaires ouvre un nouveau secteur à la céramique. La CGE devient alors la Ceraver mais c’est pourtant dans le médical que le site s’illustre avec la première prothèse de hanche en alumine. Du nucléaire au médical, le chemin se confirme avec le développement des tubes électrotechniques pour les rayons X en 1975.

L’ÉMERGENCE DE NOUVEAUX MARCHÉS

La révolution iranienne bouleverse cette envolée, les contrats passés avec la France sont stoppés et la Ceraver, forte de 2 400 employés, se voit dans l’obligation de s’en séparer de 1 000. Renault fait un passage éclair avec une acquisition et un projet de moteur en céramique avorté, Rhône Poulenc la rachète en 1985 et crée Céramique et Composites, orienté vers les carbures et nitrures soit les céramiques noires et grises. Ceraver poursuit son activité axée sur les céramiques blanches sous l’entité SCT. Faisant désormais partie du groupe Detroyes Industrie, SCT met son expertise et son savoir-faire au service des marchés de l’aérospatial, du médical, de l’énergie et de la Défense avec lesquels elle officie comme sous-traitant.

Notre chiffre d’affaires a augmenté de 60 % en 3 ans

Jean_Paul Detroyes, président de la SCT céramique

Jean_Paul Detroyes, président de la SCT ©DR

SCT S’IMPOSE SUR LES IMPLANTS MÉDICAUX

Implants auditifs, pacemakers, défibrillateurs de l’instrumentalisation médicale et dentaire, neuro- stimulation, neuromodulation… On ne compte plus les avancées sur lesquelles elle se démarque notamment grâce à sa maîtrise du brasage, l’association céramique et métal. Jean-Paul Detroyes, le président de SCT le souligne : « On est dans la haute technologie. L’innovation et la diversification sont vraiment dans notre ADN, c’est ce qui nous a permis de résister aux perturbations des différents marchés. Une petite anecdote qui l’illustre, lorsque les Américains, qui sont nos plus gros clients dans les implants cardiaques, sont venus à Bazet visiter nos locaux, ils ont dit « elle est bien votre petite start-up mais pour un marché intéressant, il faudrait une usine ». C’est comme ça qu’on a construit une usine ». Une réactivité qui a porté ses fruits : c’est sur ce marché médical que repose la plus forte croissance du groupe. « Notre chiffre d’affaires est de 30 M€, il a augmenté de 60 % en trois ans dont 83 % à l’export. On a devant nous une trajectoire de développement assez prometteuse, notamment sur la neuro-stimulation, avec de très gros investissements en face. »

L’INNOVATION COMME ADN

Avec 239 collaborateurs, SCT perpétue un savoir-faire centenaire mais autour d’elle gravitent des entreprises tout aussi incroyables qui contribuent à faire de Bazet « le creuset de la céramique, un socle des innovations et du développement porté par des actionnaires et des professionnels qui, en plusieurs décennies ont amené très haut ce flambeau dans notre territoire » comme l’a souligné Marc Mesplarau, président de l’UIMM 65, lors de la réception dédiée à ce siècle d’industrie. « D’ordinaire, quand on évoque un centenaire, on est plus proche de la fin, mais pas ici », s’est réjoui le préfet des Hautes-Pyrénées, Jean Salomon. « Visiblement, ce n’est qu’un début, avec de belles promesses. » Ceram’Innov entend bien toutes les tenir.

CERAM’INNOV, UNE TEAM QUI SE COMPLÈTE

La céramique technique est un matériau non métallique et non organique obtenu par traitement thermique, à savoir l’action de fortes températures. Ses potentiels sont multiples et le Pôle d’innovations mondiales regroupe des entreprises dans différents domaines : le traitement de carbure de silicium, les alumines et zircones, les céramiques poreuses, la fabrications additive 3D et le pressage isostatique.

En plus de SCT se trouve sur le site Novadditive qui crée des pièces en 3D pour des marchés aussi variés que la recherche, les industries technologiques, le design ou même les arts de la table. Cerafast, crée en 2012, a rejoint le groupe Microcertec en 2017, le spécialiste du brasage isostatique précis de tubes et de barreaux ainsi que de l’usinage multiaxes de la céramique en cru. Ses domaines d’activités concernent le médical, le ferroviaire, l’aéronautique ou encore l’instrumentation. Filiale du groupe Pall Corporation, Pall Exeka est spécialisée dans la filtration, la purification et la concentration des liquides et des gaz pour une application industrielle et là encore, ce sont les filtres en céramique qui le permettent. Lors de la dépollution du site nucléaire japonais de Fukushima, son intervention a assuré sa place de leader et sa palette s’élargit désormais de l’agro-alimentaire à la haute technologie.