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Aéroport Tarbes-Lourdes : Dans l’œil du cyclone

Avec le contrôle des comptes et de la gestion du syndicat mixte Pyrénia, propriétaire de l’aéroport TLP, la Chambre régionale des Comptes Occitanie met en avant les risques financiers et juridiques pris par la plate-forme aéroportuaire.

Aéroport Tarbes-Lourdes

L''aéroport Tarbes-Lourdes-Pyrénées ©D.R

Du rapport d’observations définitives de la Chambre régionale des comptes Occitanie, Philippe Baubay, président de l’aéroport Tarbes-Lourdes-Pyrénées, avait choisi de n’en retenir que le positif. S’il s’était félicité de la légitimité de la plateforme aéroportuaire TLP qui, selon lui, « apporte une réelle plus-value dans le développement du territoire », le contrôle des comptes et de la gestion du syndicat mixte Pyrénia, propriétaire, met en avant de sérieux risques financiers et juridiques. D’après l’enquête nationale des juridictions financières relatives au maillage aéroportuaire français, le niveau est tel qu’il pourrait aggraver le surendettement.

92 M€ de retombées économiques

Pour comprendre la conclusion de l’enquête, il faut se pencher sur la stratégie de Pyrénia qui souhaite augmenter les retombées économiques liées à l’aéroport et utilise dans ce but l’ensemble de ses potentialités. Et, bien sûr, elles sont en lien direct avec les particularités du territoire, d’abord le tourisme avec un terminal passager au service du tourisme quatre saisons et le développement du trafic passager au bénéfice de Lourdes et du Sanctuaire. L’activité d’aérogare d’affaire, le développement de l’industrie aéronautique, le soutien du trafic aérien sanitaire, d’essai et militaire ainsi que la mobilisation de son patrimoine foncier au service du secteur tertiaire au service du territoire viennent s’y ajouter. Une stratégie ambitieuse dont les retombées économiques s’élèvent à 92 millions d’euros pour le PIB de la région et développe « entre 1 540 et 1 640 emplois dont la majeure partie en Occitanie. Emploi qui est au cœur des préoccupations des partenaires de Pyrénia », souligne le syndicat mixte.

Une structure jugée déficitaire

Mais c’est justement la viabilité de cette stratégie ambitieuse que le rapport remet en question : « Elle induit une politique de renouvellement des installations aéroportuaires ainsi qu’une importante capitalisation de la Société Publique Locale Aéroportuaire Régionale qui exploite la plateforme TLP. Cela a pour effet d’aggraver le surendettement », conclut la Cour des comptes. Et ce risque financier repose d’après le rapport sur une fragilité : un trafic de 400 000 à 500 000 passagers, jugé trop faible et qui induit une « situation structurellement déficitaire ». Ce taux de fréquentation, Philippe Baubay l’espère boosté en 2023 : » Le programme de l’année nous permet d’envisager un trafic proche des 600 000 passagers ». Dans l’état, le rapport de l’enquête souligne une dépendance aux aides publiques, subventions qui pourraient de plus être remises en causes.

Le trafic de 400 000 à 500 000 passagers est jugé trop faible

Les aides publiques remises en question

Indispensables, elles le demeurent mais les aides publiques sont encadrées par le traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne. Là encore les lignes directrices soulèvent un éternel point noir : la ligne commune des vols vers Paris entre l’aéroport des Hautes-Pyrénées et celui de Pau, à peine situé à 32 minutes en voiture. Une proximité qui fait de la destination un besoin de transport doublement couvert dans la même zone d’attraction : « Elle expose la plateforme tarbaise au risque de se voir refuser dans les années à venir toutes possibilité d’aide publique, en fonctionnement comme en investissement », met en garde la Cour des comptes. Le rapprochement entre les deux aéroports ayant été écarté faute de consensus, le rapport estime que « les critères requis par les règles communautaires sont désormais difficiles à remplir » pour le site des Hautes-Pyrénées.

Pour la desserte du Sanctuaire de Lourdes, l’aéroport de Tarbes a été spécifiquement conçu pour l’accueil des pèlerins

Concurrence directe avec Pau

Si la destination vers Paris est la même, Pyrénia rejette l’idée d’une équivalence entre les deux aéroports, en mettant d’abord en avant l’importante fréquentation des pèlerins de Lourdes et les équipements composés de circuits spécifiques d’embarquement des personnes à mobilité réduite, des passerelles d’accostage des avions ou encore le matériel de piste dédiés : « Pour la desserte du Sanctuaire, celui de Tarbes a été spécifiquement conçu pour l’accueil des pèlerins, ce qui explique en grande partie son importance et sa capacité à traiter simultanément plusieurs mouvements d’avions avec leurs passagers à mobilité réduite et sa forte saisonnalité ». Une liaison avec Orly que la Cour des comptes épingle encore à travers les compagnies aériennes à bas coût et les dépenses marketing facturée aux passagers « supérieures aux redevances acquittées par les compagnies ».