La Vie Economique : Votre congrès et salon national se sont tenus mi-octobre : qu’en est-il ressorti ?
Stéphan Picaglia : « Nous avons reçu la visite de deux ministres : Thomas Cazenave, ministre délégué en charge des Comptes publics, et Olivia Grégoire, ministre déléguée en charge des TPE/PME. Thomas Cazenave est avant tout venu se présenter à nous et a évoqué les aides octroyées aux buralistes touchés pendant les émeutes de juin et juillet. Il n’y en a eu aucun en Dordogne, mais beaucoup ont été impactés en Gironde. Un fonds a été débloqué et les établissements obligés de fermer pendant au moins trois jours vont pouvoir toucher 10 000 euros. Olivia Grégoire quant à elle a parlé des aides au développement des TPE/PME dans les villages ruraux et du fonds de transformation des buralistes. C’est une aide importante puisque l’État va injecter 100 millions d’euros en cinq ans pour aider les buralistes à se transformer et rénover les établissements. D’ici 2027, à la fin du protocole, la moitié des entreprises devraient être trans- formées. Cette aide financera 30 % des montants des travaux hors taxe dans une limite de 33 000 euros. C’est énorme. À ma connaissance, aucune autre profession n’est autant aidée que nous : c’est qu’on a su montrer notre sérieux et une reconnaissance de notre importance dans les territoires. »
Face à la baisse de la vente de tabac, il a été vital de se diversifier
LVE : On parle souvent des buralistes comme d’un métier voué à disparaître : qu’en pensez-vous ?
S. P. : (Sourires) « Quand Olivia Grégoire est venue au congrès, elle nous a raconté que lorsqu’elle va voir d’autres professions en difficulté actuellement, pour montrer que c’est possible de se relever, elle parle de nous. On fait office d’exemple. Nous avons su avancer avec agilité pour trouver des solutions. Pendant des années, on a eu une baisse constante des établissements. Avant, nous commencions nos congrès en parlant du nombre de pertes, c’est un phénomène qui n’existe plus. Les établissements qui restent ont une raison d’être sur le territoire et de se maintenir. Nous sommes les plus proches des plus éloignés. Face à la baisse de la vente de tabac (en diminution constante de 6 % par an) il a été vital de se diversifier. Nous avons de nouveaux produits comme les cigarettes électroniques, un marché en constante croissance, le CBD, produit à forte marge, et des activités comme les colis (j’en ai une soixantaine par jour), le paiement de proximité, les comptes en banque Nickel et on peut aussi être relais Poste, je le suis depuis avril, et on a un appui de notre acteur historique, la FDJ, qui est en forte croissance… »
LVE : Une nouvelle formation a ouvert aux écoles de la CCI en Dordogne avec une spécialisation buraliste, qu’en attendez-vous ?
S. P. : « Cette formation part d’un constat : nous avons de grosses difficultés à recruter. Avec la formation de vendeur conseil omnicanal option buraliste, en un an après le bac et en apprentissage, nous espérons former nos futurs collaborateurs. La formation est très axée sur le professionnel et les élèves ont un module sur la réglementation et le snacking. Le but n’est pas forcément d’en faire de futurs buralistes, mais des collaborateurs pour nos entreprises. Pour l’instant, il y a 7 inscrits, et il est toujours possible de s’inscrire. »
LVE : Quel est l’état des lieux en Dordogne ?
S. P. : « Le département comptait 268 bureaux de tabac en 2022, 268 début 2023, et aujourd’hui on est à 263. La baisse se stabilise. Perdre des entreprises c’est toujours dommageable, mais on se bat pour maintenir nos carottes et avoir un maillage territorial fort, et l’ensemble du réseau se porte bien. Quand je suis arrivé il y a cinq ans, on était 280, la baisse n’est pas énorme. Et il y a beaucoup de transferts (des changements de propriétaires) : 16 % du réseau a été renouvelé en 2023. La profession attire les jeunes et les moins jeunes, les profils sont larges. On a eu des reconversions après le Covid, et des jeunes. À Périgueux, Clément Montagut a repris le tabac près du pont des Barris et l’a vraiment dynamisé, il a même recruté. De nouvelles pratiques exercées par la profession sont insufflées par les jeunes à l’image d’une communication sur les réseaux sociaux. »
La CCI accompagne les buralistes
La CCI Dordogne accompagne les buralistes avec un fonds de transformation dédié pour réétudier le modèle économique de ces points de vente, en partenariat avec leur Confédération : identifier et prioriser les axes de développement du commerce, le rendre plus performant, améliorer son esthétique, optimiser le parcours clients, offrir de nouveaux services, rénover l’outil de travail… Avec un audit pour première étape de la transformation et de l’accès au financement (diagnostic complet du niveau d’attractivité, de la zone de chalandise, potentiels de développement…). Après synthèse des orientations et des priorités, les aides peuvent atteindre 33 000 euros (taux de prise en charge sur les dépenses de 30 % HT et même 50 % si le CA tabac est inférieur à 500 000 euros). Le coût de l’audit est remboursé à 100 % si le buraliste concrétise son projet de transformation (50 % sinon).