Il n’a que 33 ans, et pourtant John-Paul Reizabal semble avoir déjà vécu mille vies, en particulier professionnelles. Une trajectoire qui si elle avait été linéaire ne l’aurait vraisemblablement pas conduit à s’exprimer devant la centaine d’entrepreneurs attendue ce jeudi 9 novembre au château de Franqueville, à Bizanos près de Pau, pour assister à sa première conférence. Son thème ? « La vulnérabilité : un atout pour votre succès. » Une affirmation que ce PDG à la tête de Groupe EMI, une entreprise de rénovation installée à Lescar, défend avec vigueur : John-Paul Reizabal souhaite que les dirigeants se laissent aller à davantage « d’authenticité », acceptent leurs faiblesses et s’expriment sur leurs difficultés inhérentes à leur position, comme il s’y autorise lui-même désormais. Pour autant, il sait combien cette mise à nue demande un travail sur soi. Fort de son vécu, après avoir « passé plus d’une décennie à comprendre les enjeux d’une entreprise », il est devenu coach, formateur et dernièrement conférencier avec l’ambition d’accompagner les chefs d’entreprise vers l’épanouissement.
Artisan formé sur le tas
J’étais très mauvais à l’école et j’ai été bercé par cette croyance qui dit que lorsqu’on est mauvais élève, on ne réussit pas dans la vie », commence d’emblée le jeune homme lorsqu’il s’agit d’évoquer son parcours. Après une formation professionnalisante, John-Paul Reizabal travaille dans le secteur de la plasturgie. À 18 ans, il achète deux appartements sur Orthez avec l’ambition de les rénover. Il n’y connaît rien, lit des livres, regarde des vidéos et apprend sur le tas : deux ans de travaux sont nécessaires. Il se lance ensuite dans la rénovation de deux étages d’un immeuble palois dans lequel une partie de sa famille et lui ont investi. « J’ai démissionné pour m’y consacrer à plein temps », se rappelle-t-il, conscient de son inconscience d’alors. Visiblement doué de ses dix doigts, il monte avec son père : Groupe EMI naît en 2012.
Une croissance dans la douleur
« À partir du moment où nous avons embauché notre premier salarié, en 2014, les choses sont devenues difficiles », précise John-Paul Reizabal. « Mon père a voulu faire grossir l’entreprise, alors que de mon côté je ne connaissais rien à rien, ni à la compta, ni au management… » Le jeune homme suit alors les cours de l’École des Managers à Bayonne et dit « ouvrir les yeux » : « Cela a changé ma relation avec le prof. J’ai vu la nécessité de transmettre un savoir-faire. » En 2017, Groupe EMI emménage dans ses nouveaux locaux, à Lescar, et John-Paul Reizabal devient la même année seul maître à bord alors que l’entente avec son père est devenue impossible. En un an, l’entreprise passe de 400 000 euros de chiffre d’affaires à 1 million. Une progression vitesse grand V qui n’aura pas eu lieu sans douleur, notamment parce que le management de ses équipes est complexe pour le chef d’entreprise.
Dans les pas de Iker Aguirre
« Les relations humaines dans le monde de l’entreprise, c’est très compliqué », résume John-Paul Reizabal. « C’était quelque chose que je ne connaissais pas et qui plus est, j’étais très dur avec mes salariés. Je me suis dit que j’allais fatiguer tout le monde, moi le premier. Il fallait que je change, que je travaille sur moi, mais je n’avais pas les outils. » S’ensuit une « auto-formation », à coup d’écoutes, de lectures et de visionnages, traitant essentiellement de retours d’expériences de personnalités. Il se penche sur le management positif, la connexion émotionnelle, l’impact des relations humaines sur la vie professionnelle et personnelle, puis commence à former et coacher des entrepreneurs. L’an dernier, il assiste à une conférence d’Iker Aguirre : il est séduit, puis formé par ce dernier. Le 9 novembre prochain, le jeune dirigeant mettra la théorie en application. Il a dans l’idée de proposer « un show », entre « un one-man show et une conférence » qui s’appuiera sur sa propre expérience : « Jusqu’ici, ma vie a été belle mais elle m’a mis de sacrées claques. Je vois ça comme une chance : dans ses blessures, on puise de la force ».
Un parcours à l’instinct
Si aujourd’hui John-Paul Reizabal est toujours très investi dans son entreprise, espérant par ailleurs voir son chiffre d’affaires doubler en 2024 pour atteindre les 2 millions d’euros, il s’apprête malgré tout à embaucher pour notamment pouvoir déléguer. Le chef d’entreprise pourra ainsi se dégager davantage de temps afin d’accompagner les entrepreneurs et développer son activité de conférencier. Avec néanmoins une certaine latitude dans l’accomplissement de ses projets : « Je fonctionne à l’instinct. Je ne sais pas où je serai dans six mois mais comme je l’ai toujours fait, j’écouterai la vie »
