C’est le seul laboratoire indépendant en France à réaliser des analyses marketing et sensorielles pour l’agroalimentaire et la cosmétique, les autres étant désormais aux mains de groupes. Cette garantie de neutralité et de confidentialité attire la confiance de grands noms. Les 400 clients historiques tiennent à la discrétion. « Notre expertise est reconnue à l’international », déclare Sabine Kieser, directrice d’Imasens. Ex-directrice de l’évaluation sensorielle chez L’Oréal, Sabine Kieser a précisément piloté la création de ce qui s’appelait alors l’Institut du Goût, en 2006, puis orienté l’activité vers son socle d’expérience dès 2008.
Panels de consommateurs
La marque Imasens (pour Initiation à l’éveil marketing et sensoriel) est née en 2012 pour coller aux nouveaux horizons de tests : maison, santé, jouets, sport, pet-care. C’est surtout dans le secteur cosmétique que prospère la structure, les produits d’hygiène corporelle, soins, maquillages et parfums. « L’innocuité et la qualité du produit sont bien sûr déjà validées, nous intervenons sur des études à portée marketing et d’image pour des clients. Pour les cosmétiques, nous travaillons pour de grandes marques, toujours à l’aveugle, sur des dossiers de lancement en France et à l’international. Nos tests valident les mots proposés pour désigner le produit dans les futures campagnes, avec un lancement reporté dans le cas inverse », explique la dirigeante. Les clients viennent assister à certaines séances lorsqu’elles portent sur des innovations, pour discuter avec les participants. « Les groupes internationaux n’ont aucun problème avec notre implantation, ils ne voient que l’expertise et la conformité de prestation. Les audits sur la cybersécurité nous situent au maximum, nous avons une politique RSE, nous répondons aux exigences de qualité au plus haut niveau. »
- © Imasens
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Site agrandi
La SAS Imasens a été créée en avril 2023 pour les besoins du projet immobilier de l’Institut, acquéreur du bâtiment libéré par le Grand Périgueux (collectivité à l’origine de sa création) en prévision d’une extension largement justifiée par l’ouverture vers le marché des professionnels coiffure-beauté. « Nous allons agrandir le site en séparant mieux bureaux et espaces de test, réorganisés sur 50 m2. Des entreprises de ce secteur vendent aux artisans, pas au grand public. Nos évaluations se feront donc avec leurs pairs, qui émettront des avis pour améliorer l’application de produits. » Des esthéticiennes et coiffeurs vont tester des crèmes de soin, sérums capillaires, shampooings, couleurs, gels, laques, lignes pour barbe, mais aussi des ustensiles et du matériel. Certains usages sont déjà évalués, en attendant d’autres propositions comme des techniques de massage en instituts de beauté. « Sur ce marché très spécifique, nous venons en renfort de groupes qui disposent de leurs propres modules et nous intéressons des laboratoires sans structure intégrée. »

© Jonathan Barbot
Répondre à d’autres demandes
Une cabine d’esthétique et un salon de coiffure sont aménagés en attendant le chantier de l’an prochain, et Imasens fait appel à des coiffeurs free-lance à Paris, dans des coworkings spécifiques (20 bacs de tests) pour assurer la commercialisation déjà lancée. L’objectif : créer cette configuration dans les locaux d’Imasens, en recrutant des professionnels et des modèles pour ces essais. « Les inscriptions se font sur le site internet habituel, il nous faut un large éventail de types de peau et de cheveux, pour tester des fonds de teint, des colorations… » Des chargés d’étude polyvalents recueilleront les données d’ordre sensoriel avec des méthodes scientifiques. « Je crois beaucoup à ce nouvel axe. Et j’y crois ici : on a toujours travaillé ainsi, pour valoriser l’écosystème organisé autour de nous, en plus des emplois créés. L’entreprise achète localement les produits nécessaires aux tests, soit 3 400 références : nous avons 80 testeurs par séance, soit autant de mascaras, foie gras ou jus de fruit ; et les bons d’achat que nous distribuons sont dépensés ici. » (Lire ci-contre)
- © Imasens
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Solide réputation
Dans un secteur agroalimentaire soumis à la priorité du prix, les efforts portent désormais sur le marché en croissance des marques distributeurs pour s’assurer d’un niveau de qualité comparable aux références d’origine. Avec une innovation au ralenti chez les leaders nationaux, il est plutôt question de reformulation de recettes en valorisant les matières premières, les origines d’ingrédients. Des conditions de marché plus favorables débloqueront les projets. « Nous allons pousser l’évaluation avec un échantillon d’experts sensoriels, une quarantaine de consommateurs repérés dans notre panel pour leurs sens précis et leur vocabulaire pour détailler les arômes. C’est un plus très prisé », souligne Sabine Kieser. 34 salariés, dont quatre apprentis, travaillent sur le site. « Nous allons encore recruter… Nos conditions sont attractives : salaire, intéressement, participation, CET, plan épargne et retraite, chèque vacances… », rappelle la dirigeante. L’évolution de l’effectif suit celle du chiffre d’affaires, passé de 1,7 million d’euros net en 2016 à 3,4 millions d’euros en 2023, avec une évolution de 11 à 26 salariés en équivalent temps plein.
Imasens maintient une activité scientifique et dépose des publications sur ses méthodes
L’international et l’IA
La crise Covid a favorisé le développement international. « Nous sommes présents sur les salons importants, à Dubaï, à Dublin pour la recherche et l’analyse marketing », indique la directrice d’Imasens. L’Institut a conduit en février deux audits en Chine, à Shanghai et à Pékin, via des sous-traitants. Car ce type d’études se pratique à l’international, avec des partenaires installés aux États-Unis, en Chine, au Brésil, au Japon, en Afrique du Sud, au Moyen-Orient, en Finlande, en Grande-Bretagne, en Espagne. 40 dossiers ont ainsi été rédigés pour vérifier des allégations marketing sur le marché visé. « Nous travaillons pour des clients français qui lancent un produit à l’étranger et nous faisons des études en France pour des clients étrangers, comme le leader du marché américain en cosmétiques. » L’IA sera bientôt au rendez-vous pour alléger l’organisation et favoriser la valeur ajoutée, imaginer d’autres modes de tests selon les tendances, pour détecter, anticiper et développer de nouveaux marchés. « On va intégrer l’IA pour les mots utilisés lors des analyses, c’est une force à ajouter aux besoins des équipes. »
Pour les cosmétiques, nous travaillons pour de grandes marques sur des dossiers de lancement en France et à l’international
- Dans le laboratoire de test d’Imasens © Imasens
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Clean label
Les nouveautés montent dans l’échelle de formules plus propres et plus vertes, pour répondre aux attentes des consommateurs, qu’il s’agisse de contenu ou de packaging écoresponsable. « Nous testons des conditionnements plus solides pour de nouveaux usages ou pratiques, toujours anonymisés, puis en vérifiant l’impact de la marque sur le packaging », affirme Sabine Kieser. Et celui de l’origine France.
Cosmetic Valley en Périgord
Nathalie Simonin, passée chez Chanel, dirige le bureau Cosmetic Valley ouvert à Bordeaux en lien avec la Région. Il regroupe 75 des 650 adhérents de ce pôle de compétitivité national (industrie, formation, recherche). Ce 4 février, elle accompagnait une délégation en « cosmetic-visite ». Pour Sabine Kieser, c’est une vitrine du territoire auprès de ces entreprises d’envergure internationale. Et localement, le secteur cosmétique est bien représenté avec Coopéré-Elp, Novi, Interspray-Laboratoire du bain (Fareva) ou Berkem. L’assemblée générale de Cosmetic Valley, basée à Chartres, se déroulera à Bordeaux le 19 juin, doublée d’une convention d’affaires. Les enjeux principaux dans l’univers de la cosmétique portent sur la valorisation des agro-ressources et des circuits courts, et sur l’IA pour optimiser les formulations.
Recrutement permanent de testeurs
La structure réalise 1 140 études (920 et 890 les années précédentes) dans son laboratoire d’analyse sensorielle avec des dégustations en aveugle : la demande est croissante pour cette connaissance du ressenti des adultes mais aussi des enfants (6-12 ans) et ados. L’approche est ludique plus que technique. 5 000 testeurs sont inscrits au club consommateurs via le site teste-et-approuve.com, un large panel pour répondre aux critères CSP et âges, soit 68 000 participations réparties sur l’ensemble de ces volontaires. Leur disponibilité n’est pas rémunérée mais récompensée en bons d’achat.