Couverture du journal du 04/02/2025 Le nouveau magazine

UBB : Laurent Marti garde le cap

Président de l'Union Bordeaux-Bègles (UBB) depuis 2007, Laurent Marti a hissé le club bordelais en haut du rugby français et européen. Après une saison 2023-2024 marquée par une première finale douloureuse, l'UBB connaît cette année un engouement sans précédent avec une hausse de 50 % de ses abonnements particuliers et 100 nouvelles entreprises partenaires. Boosté par cette ferveur, le président Marti souhaite désormais franchir la dernière marche menant au bouclier de Brennus. Rencontre.

Laurent MARTI, président de l'UBB © Louis Piquemil

La Vie Economique : Quels sont les objectifs fixés cette saison ?

Laurent Marti  : Aucun ! Nous n’en avons pas parlé avec Yannick Bru (le coach) et avec les joueurs, car tout le monde les connaît (rires)…

LVE : Cette période de rentrée, c’est aussi le moment de recruter pour la saison prochaine. Vous recherchez quels profils en priorité ?

L. M.  : L’année dernière, il fallait augmenter la qualité de l’effectif dans sa profondeur. Là, on sait qu’il faudra moins de joueurs, mais avec une très forte valeur ajoutée pour aider ce groupe à franchir un palier. Après, on fera ce qu’on pourra, car les joueurs ne sont pas des produits que l’on trouve dans un catalogue ou sur un site Internet. Néanmoins, l’UBB reste un club attractif.

Nombre record d’abonnés

LVE : Vous affichez un nombre record de plus de 17 000 abonnés cette saison ?

L. M.  : On a une hausse de +50 % sur les abonnements particuliers ! Dès le lundi après la finale (perdue contre Toulouse en juin 2024), on a reçu un nombre impressionnant de messages de remerciements et d’encouragements qui m’ont fait réaliser que nous aurions un engouement exceptionnel. Ceci est dû aussi au fait que c’était notre première finale.

LVE : Un mot sur Toulouse, un club et une ville que vous connaissez bien ?

L. M.  : C’est un club qui a su se façonner au fil des ans. J’ai le souvenir de Skrela et Villepreux, et avant eux, Robert Bru, qui défendaient un style de jeu où l’on fait vivre le ballon. Derrière, Guy Noves a apporté de la combativité, le sens de la gagne. Ils ont progressivement rajouté des cordes à leur arc, tout en formant bien et en s’appuyant sur des anciens joueurs qui ont cette culture club et de la compétence à tous les niveaux. On loue, à raison, le jeu à la toulousaine mais on oublie que cela passe d’abord par la combativité de leurs avants.

100 nouveaux partenaires

LVE : En termes de partenaires, comment se porte l’UBB ?

L. M.  : Nous avons 750 partenaires, dont une centaine de nouveaux, allant de la petite entreprise aux grands groupes nés à Bordeaux et qui rayonnent partout en France et à l’international. Dans un contexte économique difficile, c’est un très bon résultat et le fruit d’un travail collectif de nos équipes. Nous organisons beaucoup d’animations avec UBB Business Club (déjeuners entre partenaires, rencontres avec les joueurs, UBB grands crus, tournois de golf, de tennis, une journée sur le bassin…) afin que nos partenaires puissent aussi rencontrer des prospects. Ils viennent pour la partie plaisir, pour supporter le club de sa ville, mais aussi pour faire du business. À nous de les y aider.

LVE : Ce sont essentiellement des partenaires girondins ?

L. M.  : Oui car il y a de la concurrence avec d’autres clubs de Top 14 ou de ProD2. Côté public, beaucoup de supporters viennent des départements limitrophes et entraînent, avec une moyenne de 28 000 spectateurs à chaque match, de fortes retombées économiques sur l’agglomération bordelaise. N’oublions pas non plus l’aspect social. Le stade est l’un des seuls lieux qui réunit toutes les couches sociales de la population.

LVE : L’UBB affiche un budget de 30 millions d’euros, le huitième du Top 14. De quoi est-il constitué ?

L. M.  : Pour bâtir un budget, on commence déjà par les dépenses (dont 55 % proviennent de la masse salariale). On connaît ensuite les recettes reversées par la ligue et c’est à nous derrière d’aller chercher le public et les partenaires. Depuis la saison 2019-2020, l’UBB n’est plus en difficulté financière grâce à nos bons résultats et l’arrivée de nouveaux partenaires. À ma connaissance, seuls Toulouse et La Rochelle, basés sur l’économie réelle, sont dans la même situation et peuvent présenter des budgets à l’équilibre ou bénéficiaires, comme c’est le cas pour l’UBB.

LVE : Face à une grosse concurrence en Top 14, ce budget peut-il encore augmenter ?

L. M.  : Malheureusement, nous atteignons un plafond de verre dû principalement aux capacités du stade Chaban-Delmas qui est très limité sur ce qu’on peut faire autour, notamment le réceptif. Quand j’ai lancé une augmentation de capital il y a quatre ans, j’étais plus inquiet sur l’avenir du club, car les déficits étaient chroniques. Aujourd’hui, nous avons investi, nous nous sommes structurés et nous avons eu de bons résultats sportifs et donc plus de recettes pour développer le club et s’il en manque, je serai toujours là.

Avec une moyenne de 28 000 spectateurs à chaque match, l’UBB génère de fortes retombées économiques sur l’agglomération bordelaise

Quel avenir pour l’UBB ?

LVE : Comment voyez-vous l’avenir du club à plus long terme ?

L. M.  : Il existe plusieurs pistes pour assurer la pérennité du club, quand j’aurai décidé de céder la place. Ce n’est pas à l’ordre du jour, mais je l’ai toujours un peu à l’esprit. Quel que soit le recul que je prendrai, je m’assurerai que le club reste sur de bonnes bases autour de personnes proches comme Jean-Paul Calès (Cap Ingelec), Benjamin Salah (Human Immobilier) et Marc Prikazsky (CEVA). Si on participe à la construction d’un club qui s’écroule quand on part, c’est qu’on n’a pas fini le boulot. Cela passe donc par un premier puis plusieurs titres.

LVE : Entre un titre en Top 14 ou en coupe d’Europe, une préférence ?

L. M.  : Le Top 14 sans hésitation ! Tous les clubs du Top 14 jouent le championnat, mais pas forcément la coupe d’Europe… Après, si vous me dites demain qu’on gagne la coupe d’Europe, je signe tout de suite (rires). Sur la présence des provinces sud-africaines, je suis un peu déçu de voir que ça n’a pas attiré plus de public.

Quel que soit le recul que je prendrai, je m’assurerai que le club reste sur de bonnes bases autour de personnes proches

Dirigeant de Kariban à Toulouse et président de club de rugby à Bordeaux

LVE : Vous êtes aussi un chef d’entreprise (dirigeant de Kariban, marque de vêtements d’image). Comment organisez-vous votre emploi du temps entre les deux activités ?

L. M.  : Physiquement je suis à 90 % à l’UBB car j’ai la chance d’avoir des équipes, dans mon entreprise, qui gèrent les affaires et l’opérationnel même si je suis souvent en contact avec elles. Cela m’arrangerait beaucoup si mon entreprise était à Bordeaux et pas à Toulouse, mais sur les 500 collaborateurs de Kariban, 350 sont au siège à Toulouse. Alors c’est moi qui me déplace là-bas.

LVE : Dans un climat mondial difficile, comment se porte votre entreprise ?

L. M.  : Comme pour tout le monde, 2024 est difficile, mais l’activité est stable. On gagne même des parts de marché quand des concurrents baissent. Nous montons en gamme, en qualité de produits et de services grâce à notre travail et notre remise en question en s’inspirant de ce qui se fait dans la mode.

LVE : Vous repensez parfois à vos débuts en tant que président de l’UBB ?

L. M.  : Oui souvent, car c’est beaucoup plus dur que le parcours d’un chef d’entreprise alors que j’ai pourtant démarré en bas de l’échelle en vendant des briquets à Bergerac pour faire aujourd’hui 280 millions d’euros de chiffre d’affaires. Ce parcours de chef d’entreprise était plutôt linéaire et agréable comparé à celui de président de l’UBB où nous avons eu des moments difficiles, mais avec une adrénaline incomparable.

CHIFFRES CLÉS

30 : Le budget de l’UBB cette année s’élève à 30 millions d’euros, soit le 8e du Top 14

21 : Nombre d’internationaux dans l’effectif professionnel

26 : Membres du staff de la section professionnelle

28 280 : Moyenne de spectateurs au stade Chaban-Delmas, la meilleure affluence d’Europe

42 000 : Record d’affluence pour un match de l’UBB au stade Matmut

17 328 : le nombre d’abonnés pour la saison 2024-2025, un record pour le club

750 : Nombre de partenaires

32 500 : Capacité totale du stade Chaban-Delmas