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Bassin de Lacq, un consensus à bâtir

La concertation préalable du public autour du projet E-CHO, porté par Elyse Energy sur le bassin de Lacq, s’est achevée ce 17 janvier après trois mois d’échanges. Pascal Penicaud et Benoît Decourt, cofondateurs de l’entreprise lyonnaise, évoquent « des questions légitimes ».

Bassin de Lacq

© Agence Supermixx

Deux milliards d’euros d’investissements, 800 emplois directs et indirects, 70 hectares de foncier, 3 unités industrielles, 315 000 tonnes de molécules bas-carbone produites chaque année… : jamais le bassin industriel de Lacq n’a accueilli un projet d’une ampleur semblable à E-CHO, qui a pour ambition de produire « des carburants durables pour contribuer à décarboner l’industrie et les transports lourds » (lire encadré). C’est dire si cette future implantation fait grand bruit et éveille des questionnements de la part des habitants du territoire. À l’issue des trois mois de concertation préalable du public, le bilan est à première vue jugé « positif » par Pascal Pénicaud, président de la société Elyse Energy qui porte ce projet.

LES RESSOURCES EN QUESTION

Plus de 650 personnes ont en effet participé aux 19 rencontres organisées durant ce laps de temps et plus de 200 contributions ont été enregistrées sur le site dédié à la concertation. Pour Benoît Decourt, cofondateur d’Elyse Energy et directeur des opérations, cette dernière « a joué son rôle », faisant remonter trois inquiétudes, la première d’entre elles concernant l’utilisation des ressources naturelles, notamment forestière.

« Oui, ce projet mobilise de l’électricité, du carbone sous forme directement de CO2 ou de biomasse et de l’eau », resitue-t-il, précisant avoir pleine conscience de la responsabilité de l’entreprise dans l’élaboration d’un plan d’approvisionnement. « Il nous paraît important de rappeler que nous n’aurons besoin que de 30 % de biomasse. Le cœur du projet est l’électricité bas carbone qui représentera 70 % de notre approvisionnement en énergie ». Et Pascal Pénicaud, à ses côtés, d’intervenir : « Je vais être direct : aujourd’hui, on ne peut pas sortir des énergies fossiles sans biomasse ».

On ne peut pas sortir des énergies fossiles sans biomasse

CONFLITS D’USAGE ET SOBRIÉTÉ

La deuxième interrogation issue de la concertation s’est concentrée autour des conflits d’usages et de la sobriété. Benoît Decourt a d’abord souhaité préciser à ce sujet que 75 % des molécules produites par E-CHO seront destinées à l’industrie et au transport maritime, ce qui a soulevé peu d’interrogations quand la partie aviation du projet a davantage attiré l’attention « alors qu’elle ne représente que 25 % de nos produits ».

« On nous a demandé si on n’allait pas contribuer au statu quo des usages en fournissant l’aviation. Il n’y aura pas d’effet rebond, c’est ce que nous dit l’élasticité prix en matière de transport aérien : nous allons contribuer à la sobriété, il y aura une sorte de cercle vertueux en la matière », a justifié le dirigeant. Enfin, la troisième inquiétude concernant les impacts d’un tel projet sur l’écosystème est « évidemment considérée », selon les porteurs du projet, qui ont annoncé que « demain, seront mesurés plus directement ces impacts sur notre sol ».

Benoît Decourt et Pascal Pénicaud, cofondateurs et dirigeants d’Elyse Energy et Diane Beaucart, chargée de la concertation, Bassin de Lacq

Benoît Decourt et Pascal Pénicaud, cofondateurs et dirigeants d’Elyse Energy et Diane Beaucart, chargée de la concertation © E. L.-T. – La Vie Economique

« UNE DISCUSSION SAINE »

Si la concertation est close, ses conclusions ne seront données que dans deux mois par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). « Nous n’en sommes qu’au début », souligne de fait Pascal Pénicaud, qui précise : « Il était nécessaire pour Elyse Energy, en sa qualité de maître d’ouvrage, d’entendre le public pour pouvoir amender son projet. On ne fera jamais l’unanimité mais nous devons bâtir un consensus. La concertation préalable n’est pas un référendum sur la faisabilité d’un projet : c’est une discussion saine, source d’information et de compréhension ». Le président d’Elyse Energy s’est par ailleurs dit « déterminé » et « renforcé » dans l’idée de mener à bien « cette mission ».

UNE INSTALLATION À HORIZON

Le programme E-CHO est composé de 3 unités industrielles qu’Elyse Energy, qui porte ce projet avec l’IFP Énergies Nouvelles, le groupe Avril, Axens et Bionext, souhaite implanter sur le bassin de Lacq à horizon 2027-2028. Une première unité de production d’hydrogène bas-carbone serait localisée à Mourenx, Pardies et Noguères (HyLacq). Cet hydrogène serait ensuite utilisé pour fabriquer de l’e-méthanol grâce à une unité implantée à Lacq et Mont (eM-Lacq), qui serait destiné à l’industrie française et au transport maritime. Il permettrait également la production de carburants d’aviation durables pour le transport aérien, via une dernière unité située à Pardies et Bésingrand (BioTJet).