Couverture du journal du 02/10/2024 Le nouveau magazine

Manuel Godet, le toqué du goût

Manuel Godet, le chef du restaurant L’Empreinte, se démarque par une cuisine audacieuse et traditionnelle. Coassocié de la brasserie L’Europe, il y développe la production de pâtes fraîches et sa nouvelle passion pour la pizza.

Manuel Godet, chef du restaurant

Manuel Godet, chef du restaurant "L'Empreinte" à Tarbes © LilianCazabet - VieEconomique

Il arrive avec une énergie électrique mais surtout une boîte où des truffes du Périgord sont précieusement préservées. Lorsqu’il l’ouvre, leur parfum tenace s’échappe et le chef Manuel Godet s’exclame : « Quel beau produit ». Un moment suspendu en apparence car dans l’esprit du chef, les façons de les mettre en avant se bousculent déjà. Suivre cet artiste des fourneaux est un défi de longue haleine et nombreux sont ceux qui préfèrent l’attendre à la table. Celles du restaurant L’Empreinte sont devenues en huit ans une des plus prisées de Tarbes et une adresse incontournable du département. Une équipe solide de trois cuisiniers et cinq apprentis, un chef exécutif qui le complète et une carte audacieuse dont les plats sont inspirés par les saveurs : voilà les ingrédients d’une réussite insolente.

Une carte au fil des saisons

La volaille est du Sud-Ouest, la truite et les châtaignes des Pyrénées, les kiwis de l’Adour et les œufs de poule bio de chez Flament. Ce que le chef en fait est sa signature, accompagnant l’une d’une crème fouettée au gin, magnifiant l’autre en suprême avec un jus réduit au pomelo ou d’un pain à la pistache et aux cranberries… La carte change tous les deux mois et pour les amoureux des belles compositions, elle est toujours attendue : « On travaille les produits en fonction des saisons et pour certains, comme l’asperge verte par exemple, elle est très courte ». La star d’un mois ne sera pas celle du suivant et la brigade s’amuse à élaborer des créations aussi éphémères que surprenantes. Les maraîchers et les producteurs, Manuel Godet les connaît tous, toujours à la recherche de légumes qui sortent de l’ordinaire, des courges spaghettis au porc noir de Bigorre, il compose aussi bien avec les valeurs sûres locales que les agrumes lointains.

On garde le goût des choses, pas l’artifice

Cuisine « traditionnelle sublimée »

Une cuisine unique que le chef rechigne à qualifier de gastronomique, « le mot peut faire peur », et préfère décrire comme « traditionnelle sublimée » : « On garde le goût des choses et pas l’artifice, c’est notre priorité. On fait pas mal de jus de viande, ce qui se fait de moins en moins en cuisine car ça prend du temps ». Loin des standards, L’Empreinte assume son caractère à travers des créations où Robin Parnaud, le chef exécutif, joue un vrai rôle. Le binôme se connaît depuis 20 ans : « On est très complémentaires et sur des associations de goûts, on peut encore se surprendre », souligne ce dernier. Autant d’atouts qui ont reçu cette année une deuxième toque au guide Gault & Millau, une distinction rare dans les Hautes-Pyrénées, qui « fait toujours plaisir, surtout pour les clients » : « Ce qui me fait vibrer, c’est quand l’un d’eux me dit que ça lui a fait plus de bien de manger ici qu’aller chez le médecin ».

Manuel Godet

Des créations qui subliment la tradition © LilianCazabet – VieEconomique

L’apprentissage auprès des grands

Un beau parcours que Manuel Godet a commencé à 16 ans au lycée Lautréamont avec un CAP-BEP en hôtellerie-restauration. Le cursus est classique mais les cuisines savamment choisies et c’est au Viscos de Saint-Savin qu’il passe en alternance le diplôme de pâtissier en desserts de restaurant. Auprès du savoureux chef Jean-Pierre Saint-Martin, il restera 7 ans : « On allait cueillir des plantes dans les montagnes et on faisait des desserts avec, c’était le petit plus vraiment chouette ». Mais avant de devenir lui-même une référence, c’est auprès d’un autre maestro des fourneaux que le Tarbais a affiné son tour de main, n’hésitant pas à déménager à Paris pour œuvrer au Carré des Feuillants auprès du célèbre et doublement étoilé Alain Dutournier : « C’étaient des chefs qui me plaisaient et qui étaient dans la transmission du savoir, toujours dans la bienveillance ».

Des pâtes, des pizzas et des projets

Cette année, L’Empreinte devrait transformer le cadre de ses trois salles intimistes dans une version plus cocooning mais le projet demande du temps. Depuis 3 ans, Manuel Godet est coassocié de la brasserie L’Europe, une institution tarbaise, où, dans une tout autre ambiance, il revisite une de ses nouvelles passions : la pizza. « Le travail de la pâte est très sympa, j’ai même fait une formation pour aller plus loin dans le procédé avec une maturation longue pour plus de goût. » Il se pourrait même qu’il participe au concours du meilleur pizzaïolo, en attendant il développe sa société de pâtes fraîches et de ravioles, produites et vendues à L’Europe : « D’ici un an elles seront commercialisées ». Difficile de suivre ce chef à la trace, il pose son empreinte là où ses envies le mènent et, si les chemins sont nombreux, ils sont tous celui du goût.

Un chef sur tous les fronts

En 2023, L’Empreinte a été référencée au Collège culinaire de France, l’association créée par les grands chefs dont l’entrée est un gage de la qualité des artisans. En parallèle, Mathieu Godet fait partie de l’association Toques et Saveurs de Bigorre. Avec une dizaine de chefs emblématiques du 65, il participe à des actions de partage et de solidarité.