Couverture du journal du 07/05/2024 Le nouveau magazine

Des influenceurs responsables

La 2e édition de Tubecon, le festival des influenceurs, s’est tenue à Toulouse le 1er juillet. L’occasion pour les plus jeunes de rencontrer leurs idoles et pour les créateurs de contenus d’échanger notamment sur la récente loi encadrant leur profession.

Lucas Brasier (à gauche) et Ilias Morjane (à droite) prodiguent des conseils aux jeunes qui voudraient se lancer dans une carrière sur les réseaux sociaux influenceurs

Lucas Brasier (à gauche) et Ilias Morjane (à droite) prodiguent des conseils aux jeunes qui voudraient se lancer dans une carrière sur les réseaux sociaux © Maxime Fayolle

Cette jeune fille de 9 ans s’est offert un souvenir pour la vie. Après avoir fait la queue pendant plusieurs minutes avec sa maman, elle peut enfin serrer dans ses bras son idole, la youtubeuse Ophenya. L’influenceuse, qui cumule près de 500 000 abonnés sur la plateforme, reçoit des dizaines de cadeaux, dessins, peluches en tous genres… En retour, elle distribue des sourires, des selfies, et sèche quelques larmes des adolescentes les plus émotives.

Au festival Tubecon, près de 1 000 jeunes de 13 à 25 ans sont venus rencontrer les influenceurs de leurs rêves. Au programme, des échanges donc, mais aussi des initiations au rugby avec l’ancien ailier du Stade Toulousain, Vincent Clerc, ou encore personnalisation de sneakers avec un graphiste. Mais le festival proposait aussi plusieurs tables rondes sur des sujets qui touchent de près les adolescents.

PAPILLOMAVIRUS ET CYBERHARCÈLEMENT

La première discussion porte sur la sensibilisation au papillomavirus. Plus tard, la table ronde sur le cyber-harcèlement mobilise également plusieurs parents inquiets. Et il y a de quoi, au vu des chiffres rappelés par Lucie Pujol, de l’association E-Enfance. « Environ six adolescents sur dix ont été victimes de cyberharcèlement. Les chiffres ont explosé après le confinement. » Elle rappelle l’importance du 3018, le numéro national à composer en cas de violences numériques. Au bout du fil, des juristes et des psychologues écoutent et aident les adolescents.

LE RÊVE DE DEVENIR INFLUENCEUR

Les réseaux sociaux peuvent apporter le pire comme le meilleur. À Tubecon, beaucoup de jeunes adolescents rêvent d’imiter leurs stars et de se lancer dans une carrière d’influenceur. Une dernière table ronde est dédiée à ce sujet. Un jeune homme interpelle deux créateurs toulousains : « j’ai créé une chaîne YouTube, mais je n’arrive pas à percer. Quelle est la recette du succès ? ». Lucas Brasier (24 000 abonnés sur TikTok) et Ilias Morjane (vidéaste) échangent un sourire complice. « Il n’y a pas de recette miracle », détaille Lucas. Il faut tester ! Faire des vidéos, voir ce que les spectateurs aiment. Et surtout faire ce que tu aimes, toi ! » Ilias approuve : « C’est un domaine très concurrentiel, surtout depuis le confinement. Si tu produis des vidéos dans le but de gagner de l’argent ou d’être célèbre, je ne vais pas te mentir, il y a peu de chance que cela réussisse ».

Il ne faut pas confondre les influenceurs de la TV réalité et les créateurs de contenus

UN MAGICIEN AUX 3 MILLIONS D’ABONNÉS SUR TIKTOK

Un leitmotiv repris par Achille Breux, magicien aux trois millions d’abonnés sur TikTok. Le jeune homme de 19 ans gagne aujourd’hui très bien sa vie grâce à ses vues sur les différents réseaux, la vente de son livre, des prestations privées mais aussi grâce à des partenariats.

« Je choisis toujours les marques avec lesquelles je travaille. Je ne fais pas la promotion de produits inutiles pour mes spectateurs, simplement pour gagner de l’argent. Il faut que ce soit éthique, et que ça corresponde à mon contenu. » Achille a mis en place un concept sur TikTok où il réalise les rêves de ses abonnés : « la prochaine fois, on part à New York. Ça va nous coûter environ 10 000 €. C’est le partenariat qui nous permet de financer cela. En moyenne, quand une vidéo est sponsorisée, 90 % de la somme donnée par la marque sert à fabriquer la vidéo ».

Environ 6 adolescents sur 10 ont été victimes de cyberharcèlement. Les chiffres ont explosé après le confinement

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Yanis Le Pont, alias The Wingzer sur YouTube. Une influenceur qui choisit ses marques et refuse de promouvoir dle CBD ou les paris sportifs. © Maxime Fayolle

UNE LOI SUR LES INFLUENCEURS BIENVENUE

Tous les influenceurs présents à Tubecon ont suivi de près la dernière loi sur les influenceurs publiée le 9 juin. Elle encadre les partenariats commerciaux et vise à lutter contre les dérives. Plusieurs personnalités du web ont en effet été épinglées ces derniers mois pour des arnaques ou pour avoir fait la promotion de produits dangereux pour la santé.

« Mais il ne faut pas confondre les influenceurs de la TV réalité et les créateurs de contenus que nous sommes », prévient Achille. Le Toulousain Yanis Le Pont (alias The Wingzer sur YouTube) abonde : « les influenceurs de la TV réalité vont te vendre tout et n’importe quoi, dans le seul but de faire de l’argent. C’est dommage que les pratiques frauduleuses de certains jettent le discrédit sur tout le monde ». Lui aussi sélectionne les marques avec lesquelles il travaille. « Je ne mets pas en valeur les produits comme le CBD, l’alcool ou les paris sportifs. On m’a pourtant proposé de grosses sommes d’argent mais on a une responsabilité en tant qu’influenceur. » Une responsabilité d’autant plus grande que la DGCCRF vient de mettre en place une politique de « name and shame » sur les réseaux, en affichant publiquement les influenceurs qui ne respectent pas les règles. « Je trouve cela très bien », estime Ilias Morjane.

« S’attaquer à la notoriété, c’est ce qui fait le plus mal sur Internet. » Mais pour lui, la loi actuelle ne va pas assez loin. « On voit par exemple certains influenceurs proposer des formations en ligne payantes pour tout et n’importe quoi. »