Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

« Potamoi »: Histoire d’eau !

Médaille d’argent au concours Lépine, le Tarbais Christian Lozano a mis au point un système qui permet de contrôler la consommation de l’eau : l’heure est à la levée de fond et à la commercialisation.

Sarah et Christian Lozano, inventeur du boitier Potamoi

Sarah et Christian Lozano, inventeur du boitier Potamoi © D. R.

De l’instant où l’idée jaillit à la commercialisation du produit, chaque étape semble prendre une éternité et Christan Lozano l’a presque appris malgré lui. Pour transformer un inventeur en chef d’entreprise accompli, la patience est la meilleure alliée. Depuis le 10 novembre, la campagne de crowfunding est enfin en ligne et la levée de fond va de pair avec les premières précommandes mais il aura fallu huit ans avant d’arriver à ce moment. Entre légitime appréhension et enthousiasme, les yeux rivés sur l’écran, difficile pour le concepteur de se détacher de l’évolution des contributions : « C’est aussi une façon de mesurer l’intérêt des gens pour le Potamoi » souligne-t-il. Comme son nom ne l’indique pas ce n’est point d’un ami dont le Bigourdan parle mais bien de son bébé qui est un dispositif de contrôle de la consommation d’eau. S’il apparait un choix étonnant pour un système aussi sérieux, il est en réalité limpide, c’est celui des dieux fleuve de la mythologie grecque.  

Comme il n’y avait pas de solution, je l’ai inventée 

D’UN BESOIN FAMILIAL NAIT L’INVENTION 

Dans une époque où la prise de conscience est générale, économiser l’eau et l’énergie apparait comme une évidence. Pourtant en 2015, c’est sur fond d’exaspération que l’aventure de Christian Lozano et du Potamoi commence : « Notre fils Samuel était alors un ado de 16 ans et il prenait des douches interminables » raconte en souriant Sarah, épouse de l’inventeur et gérante de leur société Eco Green Shower. Un rituel qui ne tarde pas à peser sur les factures, surtout celle de l’électricité puisque l’eau est évidemment chauffée. Les parents tentent par tous les moyens de raccourcir le temps de ces effluves mais se heurtent à l’habitude bien ancrée. Las de taper à la porte de la salle de bain, ils se prennent à rêver d’un système qui couperait l’eau après un certain temps : « Persuadés que ça existait, on a cherché à en acheter un mais même sur Internet on n’a rien trouvé » explique Christian Lozano. Certains auraient simplement abandonné l’idée mais dans la tête de l’ingénieur qui travaille dans un bureau d’étude, elle prend racine : « C’est lié à mon métier, quand on a un problème, il faut qu’on trouve une solution. Comme il n’y en avait pas, je l’ai inventée ».  

4 ANNEES POUR BREVETER L’IDEE 

La suite coule de source ou presque. L’ingénieur s’attèle au projet, non pas pour lancer un nouveau produit mais d’abord répondre à son propre besoin : « En en parlant autour de moi, j’ai constaté que ça avait un vrai écho dans tous les foyers ». Couper l’eau de la douche sans perturber celle qui alimente la maison devient l’objectif et breveter l’idée s’impose comme la première étape : « Si ça avait été à de simples fins pédagogiques, l’investissement n’aurait pas été justifié. C’est assez cher, ça dépend du nombre de pays dans lequel on veut protéger l’idée et pour combien de temps ». Quatre années de travail intense mené en lien avec un cabinet spécialisé seront nécessaires afin qu’elle soit enregistrée. Un délai qui a quelque peu détaché Christian Lozano de la passion du début… et c’est à travers le concours Lépine qu’il va retrouver un vrai « coup de fouet » selon ses propres mots : « C’est un ami qui m’a soufflé l’idée. Pour moi c’étaient des gens bien particuliers qui y concouraient, un peu comme Léonard De Vinci, je ne me voyais pas dans cette catégorie ».  

MEDAILLE D’ARGENT AU CONCOURS LEPINE 

Après maints reports dus au Covid, le Bigourdan et son prototype sont sélectionnés en 2021 : « C’était une première version faite à l’imprimante 3D faite avec Luc Picard, un ami touche à tout. Depuis on l’a beaucoup retravaillé, il est plus petit, étanche et autonome en énergie ». Plus de 100 présentations quotidiennes sont assurées par les époux Lozano mais aussi leurs enfants, dont Samuel qui peut se targuer d’être la muse du Potamoi. Potamoi qui trouve son public et sera auréolé d’une médaille d’argent. Affiné et désormais optimal, le principe est aussi simple que futé : grâce au boitier programmable installé entre le mitigeur et le flexible du pommeau, la quantité d’eau de la douche est déterminée selon son choix via une application : « Dès que le volume est presque atteint, l’écran change de couleur et le système décompte la réserve d’eau, ce qui laisse le temps de finir son rinçage » explique l’inventeur. Quand les litres sont écoulés, l’eau est coupée durant 3 minutes, comme l’avait rêvé le père de famille. 

120 € D’ECONOMIES PAR AN 

Pour les utilisateurs, les bénéfices sont nombreux, au-delà des disputes autour du ballon d’eau chaude, c’est une vraie aide dans la gestion d’une ressource précieuse mais aussi un allègement du budget : « Une douche en France représente entre 60 et 80 litres. En diminuant de 30 litres cette moyenne comme le permet le Potamoi, ça fait 11 m³ à l’année, soit environ 120 € d’économies selon les tarifs de l’eau et de l’énergie de mars 2023 » souligne Sarah Lozano. Avec son design bon enfant qui semble faire un sourire, le Potamoi a tout pour transformer les habitudes des nouvelles générations qui sauront gérer leur douche au litre près… Et remercieront Samuel de ne pas l’avoir fait.